Attendue depuis longtemps, cette accréditation marque un tournant dans l’histoire du Collège nordique, mais aussi dans l’éducation francophone dans le Nord. Médias ténois s’est entretenu avec la présidente du conseil d’administration du CNF, Angélique Ruzindana Umunyana, et le directeur général du Collège, Patrick Arsenault.
Médias ténois : Combien de temps est-ce que vous avez attendu cette accréditation en français?
Angélique Ruzindana Umunyana : Déjà la loi… Ça a pris du temps avant d’avoir une loi sur le postsecondaire.
M t : On parle de combien de temps à peu près?
ARU : On a commencé les consultations avant la COVID […] 2018-2019.
Quand la loi est plus ou moins sortie, il fallait encore qu’il y ait des règlements spécifiques.
Il y avait des règlements qui devaient sortir pour que la loi soit complétée. Ça, c’était en décembre 2022, je pense. À partir de janvier 2023, on s’est dit, « bon, c’est quoi que ça nous prend; le processus d’assurance qualité par lequel il faut passer, etc. »
M t : Vous avez mentionné la COVID. Est-ce que la pandémie a retardé le processus? Ou bien ça n’a pas changé grand-chose?
ARU : Ça c’était vraiment l’objet du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest (GTNO), mais la bonne nouvelle c’est qu’on a vraiment été consultés, même quand ils étaient en train de développer la loi et les règlements, on l’a toujours été. […] Ils nous ont vraiment consultés pour que nous, aussi, on ait une idée de ce qui s’en vient donc, quand c’est sorti, on n’a pas vraiment été surpris. On voyait où ça s’en allait donc, ça a été facile, même si ça a été long, c’était en quelque sorte facile.
M t : Quelles sont les retombées d’une telle reconnaissance? Évidemment, c’est de pouvoir donner des diplômes, de pouvoir donner des certifications. Est-ce qu’il y a d’autres retombées à court ou moyen terme d’avoir cette accréditation officielle?
Patrick Arsenault : Je dirais qu’une des choses qu’on a maintenant, c’est qu’on peut devenir membre de l’ACUFC, qui est l’Association des collèges et universités francophones du Canada. Ils sont un joueur politique assez important au niveau national et ils ont des liens privilégiés avec beaucoup de politiciens et d’employés du gouvernement au niveau fédéral. On pense que cette nouvelle stature au sein de cette organisation-là pourrait nous permettre d’aller chercher peut-être plus de fonds ou de participer à des projets de plus grande envergure au niveau national alors qu’avant, quand on n’avait pas le statut de collège accrédité, c’était parfois difficile de participer à ce genre de projet.
On n’avait pas toujours non plus des relations d’égal à égal quand on était en partenariat avec d’autres établissements qui, eux, étaient crédités. On dépendait beaucoup de leur processus. Alors que, maintenant, on va pouvoir vraiment faire des partenariats d’égal à égal.
M t : C’était ma prochaine question, les équivalences… Est-ce qu’il n’y a pas cette peur de faire face à de la discrimination nordique?
PA : Je me souviens d’avoir déjà travaillé pour une université canadienne qui avait plusieurs campus qui offraient le même programme, mais les cours ne transféraient pas d’un campus à l’autre, alors que tout le monde venait de la même université, mais ce n’était pas tout à fait les mêmes cursus.
C’est sûr qu’on ne pourrait jamais garantir que tout va transférer. Cependant, on est sûr que le fait qu’on soit reconnu par les Territoires du Nord-Ouest et par notre gouvernement va inspirer la confiance de nos partenaires dans le Sud.
M t : À la lumière de la récente entente panterritoriale, est-ce que cela va renforcer les relations avec le Nunavut et le Yukon?
PA : Le fait qu’on a un partenariat avec les autres territoires, c’est parce qu’on avait notre accréditation « en devenir », sinon, le partenariat n’aurait pas pu fonctionner, car aucun de nous trois ne pouvait décerner de diplômes, mais maintenant on peut. C’est dans cette lignée-là qu’on avait entamé le partenariat.
M t : C’est quoi, la prochaine étape pour le Collège nordique?
PA : Je pense que, les prochaines étapes, ça peut être de s’atteler à développer des programmes ou à transformer les cours qu’on a déjà pour qu’ils soient crédités. Par exemple, on a beaucoup de cours de langue qui pourraient facilement être mis peut-être dans un certificat de français au travail, par exemple, ou en tłıcho.
Donc, on a déjà des offres qu’on pourrait modifier pour qu’ils soient créditables, pour bénéficier aux gens qui sont déjà immédiatement aux Territoires du Nord-Ouest, qui étudient peut-être au Collège Aurora, mais qui voudraient faire des cours de français en option chez nous pour les faire transférer ou des cours de tłıcho ou peut-être des étudiants qui sont dans le Sud, mais qui viennent de partir un été ici. Peut-être que pendant l’été, s’ils sont en train de travailler, ils pourraient faire un cours avec nous qui serait transféré.
Donc, je pense qu’on va commencer par voir ce qu’on peut adapter […] puis développer dans les axes dans lesquels on est déjà actifs… des programmes bien à nous.
ARU : Comme on a rejoint l’Université de l’Arctique aussi, il y a des programmes auxquels on a accès. On va voir dans ces programmes-là qui sont déjà existants, mais qu’on peut adapter, qui sont en plus développés par d’autres universités du Nord et de l’Arctique. Je pense que là aussi il y a un gros potentiel à aller chercher.
PA : Les cours que nous allons développer vont être reconnus par l’Université de l’Arctique, donc il y a des gens qui sont dans d’autres pays : au Danemark ou en Écosse ou en Finlande, qui pourraient suivre des cours du Collège nordique.
M t : Ça ouvre donc la voie à plus de reconnaissance sur les langues autochtones?
ARU : Tout à fait.
PA : Exactement. Ça nous donne beaucoup de visibilité, beaucoup de crédibilité, puis ça nous permet de renforcer la qualité du travail d’équité, mais aussi de renforcer nos actions en ayant cet appui-là.
IJL – Réseau.Presse – L’Aquilon