Sophie Muller (Francopresse)
Si pour beaucoup d’entre nous la période des fêtes fut synonyme de joie partagée, elle fut pour certaines personnes un moment de souffrance et de solitude. Cela touche surtout les personnes âgées qui se trouvent isolées par la géographie, le manque de relations sociales et familiales ou bien la langue. Des solutions plutôt simples existent, mais elles diffèrent selon que l’on est à la ville ou à la campagne.
« Le moment des fêtes est toujours délicat », explique Yannick Freychet, directeur général de la Fédération des aînés franco- albertains (FAFA). Il y a une certaine pression sociale, dit-il, qui fait que nous nous devons d’être heureux. Mais en réalité, c’est une période difficile, surtout pour les célibataires », ajoute-t-il.
L’isolement : géographique comme social
Les personnes âgées en mauvaise santé ou dont les capacités sont fortement diminuées sont aussi susceptibles de souffrir d’isolement physique, note Patricia Brennan, gestionnaire de projets à l’Association franco-yukonnaise. « La période des fêtes est un problème pour plusieurs aînés, surtout quand les enfants sont loin. Ici, au Yukon, beaucoup de gens ont leur famille à l’extérieur », explique-t-elle.
L’isolement géographique est en effet un facteur important, confirme Leslie Quennehen, chargée de projets à la Fédération de Terre-Neuve et du Labrador. Mais l’avantage des petites communautés, pense-t-elle, c’est qu’il y a beaucoup d’entraide.
C’est aussi l’avis de Mme Brennan, car les gens se connaissent et s’invitent les uns les autres. C’est peut-être plus difficile pour les aînés qui vivent dans les grands centres urbains, suggère-t-elle. Pour briser l’isolement, il est important de développer son réseau social, en créant des occasions telles que des services de lecture, des soirées de jeux, ou des sorties randonnées. Cela est plus facile à faire dans une petite communauté, pense-t-elle.
Il est vrai que cette solidarité est moins naturelle en milieu urbain, observe M. Freychet. Cela est d’autant plus dommageable que le nombre d’aînés franco-albertains a doublé en l’espace de dix ans, souligne-t-il. Selon une étude conduite en 2012 par la FAFA, les personnes âgées de 65 ans et plus représentent plus de 15 % de la population franco- albertaine comparativement à 10 % pour l’ensemble de la population provinciale. C’est une tendance que l’on observe dans beaucoup de communautés francophones en situation minoritaire, et pas seulement en Alberta, note le directeur.
La solution à l’exclusion sociale de cette population passe par les nombreuses activités mises en place par les clubs locaux, dit-il, mais ceux-ci ont peu de ressources et fonctionnent essentiellement grâce au bon vouloir de bénévoles.
Une initiative porteuse en Alberta
À Edmonton, et dans le nord de la province, une initiative a récemment vu le jour : « Santa for Seniors ». Mise en place par la chaîne de magasins London Drugs, elle consiste à faire appel à la générosité des clients en leur donnant l’occasion d’offrir quelques cadeaux de Noël à des personnes âgées dans le besoin.
À l’aide d’étiquettes accrochées sur le sapin de Noël du magasin, les clients découvrent les noms des aînés et ce qu’ils ont demandé au père Noël : une couverture ou des chocolats, par exemple. Développée en partenariat avec l’Operation Friendship Seniors Society, qui offre toute une gamme de services sociaux à destination des aînés, l’initiative permet ainsi d’apporter un peu de réconfort pendant les fêtes.
Démarré l’an dernier dans un seul magasin, le projet a touché environ 500 aînés. Devant le succès remporté, cela a été étendu en 2016 à plusieurs magasins et va concerner plus de 2 000 personnes. « C’est une opération très populaire, les gens viennent même de Calgary pour y participer », explique Natalie Harper, responsable des relations publiques à London Drugs et cofondatrice du projet. Il est évident que le projet va continuer de s’étendre, la population vieillit et les aînés sont de plus en plus dans le besoin et sans famille, affirme-t-elle.
« L’impact d’un tel projet est énorme », dit Jimmy Morrison, gestionnaire des relations avec la communauté à Operation Friendship Seniors Society. « Le temps des fêtes est difficile pour nos résidents, ils sont un peu oubliés, et ça m’attriste », raconte-t-il.