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le Mercredi 19 octobre 2016 15:33 Société

L’école Nomade dans les bagages des voyageurs

L’enseignement à domicile et en français se démocratise au Yukon. L’École Nomade offre même la possibilité aux jeunes francophones d’apprendre sur la route. Photo: Catherine Forest
L’enseignement à domicile et en français se démocratise au Yukon. L’École Nomade offre même la possibilité aux jeunes francophones d’apprendre sur la route. Photo: Catherine Forest

Après avoir été nomades durant la période du Paléolithique, les humains se sont sédentarisés petit à petit au Néolithique, ce qui s’est traduit par une diminution progressive de l’importance de la chasse, de la cueillette et de la pêche au profit de la production de nourriture par l’agriculture et l’élevage. Et voilà que depuis une vingtaine d’années, le nomadisme reprend du souffle, et le vent de la modernité pousse bon nombre de nos contemporains à vivre l’expérience de nos ancêtres… avec la technologie en plus, bien sûr.

L’enseignement et l’éducation font partie de cette mini- révolution. Toujours plus léger grâce aux nouvelles technologies, toujours plus portable, le savoir presque absolu est dans notre sac, ou dans notre poche. Cet accès instantané à des milliards d’octets de connaissances humaines fait parfois tourner la tête, mais c’est aussi une occasion unique pour certaines familles d’éduquer leurs enfants en dehors des écoles. Les livres sont bien sûr toujours très présents, mais il faut avouer que l’aspect pédagogique de la technologie est une voix particulièrement intéressante.

L’enseignement à domicile se fait depuis de nombreuses années au Yukon. Le gouvernement a organisé il y a quelques années du côté anglophone Aurora Virtual School (auroravirtualschool.ca). Cette école soutient les familles qui désirent offrir l’enseignement à la maison, mais les services offerts ne sont disponibles qu’en anglais.

Il y a un peu plus de deux ans, la Commission scolaire francophone du Yukon (CSFY) a demandé au gouvernement de pouvoir prendre la responsabilité de l’enseignement à domicile pour les familles qui n’ont pas accès à l’éducation en français. « Cette année, huit élèves sont inscrits au programme de l’école Nomade. La commission scolaire offre un soutien aux familles sur le plan de la planification de l’enseignement et des ressources qui sont disponibles. Elle offre aussi la possibilité d’évaluer les élèves pour les parents qui veulent s’assurer que leur enfant progresse bien. « Mais au bout du compte, c’est le parent qui est l’enseignant de son enfant, c’est lui qui est responsable », nous explique Marc Champagne, directeur général de la Commission scolaire francophone du Yukon.

Le profil des familles de ce programme est assez diversifié : il y a des familles qui habitent à Whitehorse, mais qui souhaitent faire l’enseignement à domicile. Certaines habitent à l’extérieur de la ville et n’ont donc pas accès à une école en français. Et il y a également des familles qui sont en voyage, pour six mois ou un an, ou plus, qui choisissent cette option pour continuer à pourvoir un enseignement de qualité en français.

« C’est la deuxième année que nous offrons ce service, c’est toujours en évolution, et nous développons en ce moment à la CSFY la capacité d’offrir des cours à distance pour les élèves en secondaire », déclare Marc Champagne.

L’enseignement à domicile et en français se démocratise au Yukon. L’École Nomade offre même la possibilité aux jeunes francophones d’apprendre sur la route. Photo: Catherine Forest

L’enseignement à domicile et en français se démocratise au Yukon. L’École Nomade offre même la possibilité aux jeunes francophones d’apprendre sur la route. Photo: Catherine Forest

Catherine et Jean-François sont tous les deux traducteurs-voyageurs. Ils ont travaillé à Whitehorse pendant quelques années. Ils ont réalisé qu’ils étaient facilement mobiles avec leur travail, ils ont donc décidé de prendre la route avec leurs trois filles. « Tant qu’il y a de la connexion Internet, nous pouvons travailler où nous voulons. Cela fait deux ans et demi que nous vivons dans un autobus, sur la route à temps plein. On revient passer nos étés au Yukon, puis à l’automne, on descend vers le sud. Cette année, nous sommes passés au Québec pour voir notre famille, et nous passons nos hivers dans l’ouest des États-Unis, en Californie et en Arizona, entre autres. Les trois filles sont nées au Yukon, et dès le départ, c’était clair pour nous voulions faire l’éducation en famille. Cela a été la continuité du style de vie qu’on avait choisi », confie Catherine.

« Aucun système n’est parfait », ajoute la mère des trois filles. « L’école nomade, c’est très exigeant, c’est beaucoup de travail de mon côté. Parfois, ce n’est pas toujours facile sur la relation, je pense qu’on a la chance d’avoir des filles qui sont contentes d’avoir ce style de vie. Mais pour nous, les avantages prennent le pas sur les inconvénients. »

Catherine, qui est la principale enseignante pour ses trois filles, consacre plusieurs heures par jour à leur éducation. Depuis deux ans, elles ont adopté un rythme de cinq jours par semaine. Cela commence dès le matin au réveil, environ de 9 h jusqu’à 13 h pour les deux jumelles qui ont 12 ans et qui sont en secondaire, et un petit peu moins pour Mathilde, la plus jeune, qui est en cinquième année.

Catherine s’inspire et se base sur la pédagogie Steiner-Waldorf pour l’éducation de ses filles. C’est un courant pédagogique qui articule enseignements intellectuels et activités artistiques et manuelles en vue d’une participation active des élèves à leurs propres apprentissages. Elle est fondée sur les théories éducatives de Rudolf Steiner. Cette pédagogie, destinée aux enfants de 3 à 18 ans, est pratiquée dans des jardins d’enfants (environ 2 000 dans le monde) et dans des écoles Steiner-Waldorf (environ 1 000 dans le monde), principalement en Europe et en Amérique du Nord.

Pour plus d’information, vous pouvez consulter le site de la CSFY ainsi que le blogue de Catherine et Jean-François.