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le Vendredi 1 mai 2015 9:01 Société

Le devoir de neutralité religieuse de l’État

Photo : fournie
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Gérard Lévesque, avocat et notaire

« L’État est tenu d’agir dans le respect de la liberté de conscience et de religion de chacun. C’est un droit fondamental que protègent la Charte des droits et libertés de la personne du Québec (Charte québécoise), et la Charte canadienne des droits et libertés (Charte canadienne). Son corollaire veut que l’État demeure neutre en la matière. »

C’est ce qu’écrit le juge Clément Gascon tout au début de la décision unanime de la Cour suprême du Canada dans le dossier Mouvement laïque québécois c. Saguenay (Ville), 2015 CSC 16, rendue publique le 15 avril dernier. Voici un résumé des faits.

Alain Simoneau est non croyant. Il assiste aux séances du Conseil de la ville de Saguenay où un règlement municipal prévoit qu’au début des délibérations du conseil, les membres du conseil qui le désirent se lèvent pour prononcer une prière.

Monsieur Simoneau et le Mouvement laïque québécois intentent un recours devant le Tribunal des droits de la personne du Québec contre la Ville et son maire. Ils allèguent que les intimés ont porté atteinte de façon discriminatoire, au motif de la religion, à la liberté de conscience et de religion de M. Simoneau ainsi qu’à son droit au respect de la dignité. Ils demandent notamment que la récitation de la prière cesse.

Le Tribunal accueille la demande de M. Simoneau en partie, mais la Cour d’appel du Québec infirme la décision au motif que la teneur de la prière ne viole pas l’obligation de neutralité imposée à la Ville et que, même si la récitation de la prière constituait une entrave aux valeurs morales de M. Simoneau, cette entrave serait négligeable ou insignifiante dans les circonstances.

Contrairement à ce que suggère la Cour d’appel, les juges de la Cour suprême du Canada ne croient pas que l’obligation de l’État de demeurer neutre en matière religieuse soit conciliable avec une bienveillance qui lui permettrait d’adhérer à une croyance religieuse. « Le parrainage par l’État d’une tradition religieuse, en violation de son devoir de neutralité, constitue de la discrimination à l’endroit de toutes les autres… Si l’État favorise une religion au détriment des autres, il crée en effet une inégalité destructrice de la liberté de religion dans la société… Si, au lieu de réciter une prière, les représentants d’une municipalité déclaraient solennellement que les délibérations du conseil se fondent sur le déni de Dieu, cette pratique serait tout aussi inacceptable. »

Dorénavant, au Yukon comme ailleurs au pays, aucune autorité étatique ne peut instrumentaliser ses pouvoirs afin de promouvoir ou d’imposer une croyance religieuse.