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le Lundi 20 avril 2015 9:49 Société

Offre active en santé

Pier Bouchard est la principale chercheuse du Groupe de recherche et d’innovation sur l’organisation des services de santé. (Photo P. Bouchard)
Pier Bouchard est la principale chercheuse du Groupe de recherche et d’innovation sur l’organisation des services de santé. (Photo P. Bouchard)

Jean-Pierre Dubé (Francopresse)

Le sujet préoccupe patients, soigneurs et gestionnaires. Dans ce pays bilingue, il ne manque pas d’histoires de conversations périlleuses entre professionnels et patients qui se comprennent mal. L’offre active ainsi est devenue une priorité nationale.

Pier Bouchard est la principale chercheuse du Groupe de recherche et d’innovation sur l’organisation des services de santé. (Photo P. Bouchard)

Pier Bouchard est la principale chercheuse du Groupe de recherche et d’innovation sur l’organisation des services de santé. (Photo P. Bouchard)

Derrière le rideau, le francophone qui attend une opération à cœur ouvert confie son impression d’aller à l’abattoir. Le médecin ne le comprend pas mais lui donne raison avec des signes de tête et confirme que tout va très bien se passer.

L’anecdote que rapporte la professeure du Département d’administration publique de l’Université de Moncton, Pier Bouchard, fait désormais partie du folklore médical en milieu minoritaire. De telles histoires angoissantes sur les enjeux de l’adaptation linguistique et culturelle ont été partagées lors d’un forum en mars, réunissant à Moncton une trentaine d’étudiants, chercheurs, professionnels et gestionnaires.

« On a produit pour le national des vidéos avec des témoignages de patients, souligne la professeur. On leur a donné la parole pour voir comment l’incompréhension peut causer des drames. Dès qu’on se met à parler d’une situation concrète, les gens se mettent à donner des exemples. »

Le but du forum était de favoriser les échanges autour de pratiques novatrices. « Il y a un décalage chez les étudiants, soutient Pier Bouchard. Ils sont très compétents en matière de soins mais ils ne savent pas nécessairement comment intervenir en milieu minoritaire. »

Le Département est un des partenaires de l’Université, membre du Consortium national de formation en santé. « On travaille avec la coordination locale du CNFS pour l’intégration des contenus d’offre active dans les cours, déclare-t-elle. Les étudiants ont beaucoup envie de travailler là-dessus.

« On forme aussi les futurs gestionnaires, explique la professeure, parce que la culture organisationnelle est importante. La situation est complexe. On prend une approche multidisciplinaire et ça demande un engagement des recteurs d’université.

« Dans notre système, il faut aussi servir les anglophones, poursuit Pier Bouchard, et c’est la même chose avec les autochtones. On parle de gestion des risques, de qualité et de sécurité. On part de l’expérience vécue du patient. »

Le CNFS s’est lancé en 2008 dans le développement de l’offre active, souligne la directrice exécutive Lynn Brouillette, au bureau d’Ottawa. « En plus de la théorie et la technique, on développe la capacité d’intégrer les concepts dans la centaine de programmes qu’on soutient chez nos membres. On veut que les étudiants soient des catalyseurs de l’offre active.

Lynn Brouillette est la directrice exécutive du Consortium national de formation en santé. (Photo CNFS)

Lynn Brouillette est la directrice exécutive du Consortium national de formation en santé. (Photo CNFS)

« On est partis de la définition du Conseil du Trésor, précise-t-elle, qui est de présenter ses services dans la langue de la clientèle, avec confiance et conviction au premier contact. C’est devenu une priorité du CNFS : on a une douzaine de projets pour appuyer les membres dans ce sens-là. »

En 2013-2014, les 11 établissements membres du CNFS ont reçu quelque 1 300 nouvelles inscriptions dans les formations en santé. Le réseau produit près de 800 diplômés par année. Selon Lynn Brouillette, « c’est toujours tout nouveau de se retrouver sur le marché du travail anglo-dominant. »

Au Nouveau-Brunswick, on fait des études de cas et on propose aux étudiants d’imaginer comment réagir, détaille Pier Bouchard. « On a développé une liste de comportements et de pratiques institutionnelles face à ces comportements. On va mettre des produits en ligne dès septembre pour sensibiliser les enseignants et les étudiants.

« Dans les médias, il est beaucoup question du bilinguisme dans les services de santé, reconnaît-elle. Même des ambulanciers nous ont approchés. Ils n’aiment pas se faire dire qu’ils ne font pas bien leur travail. »

La professeure fait remarquer que le Département s’intéresse de plus en plus au dossier. Il a créé le Groupe de recherche et d’innovation sur l’organisation des services de santé et il offre un programme unique de maîtrise en gestion de services de santé, en plus de sa maîtrise en administration publique.