Jean-Pierre Dubé (Francopresse)
Des membres des familles représentant 1200 femmes autochtones assassinées ou disparues se réuniront à Ottawa, le 26 février. Le lendemain, quatre d’entre eux vont s’adresser aux participants à une table ronde nationale.
« Les familles veulent avoir encore l’occasion de s’exprimer, explique Claudette Dumont-Smith, directrice générale de l’Association des femmes autochtones du Canada. On va écouter et montrer du respect à ceux et celles qui ont subi ces pertes. Il faut être tous ensemble pour régler ce problème. »
L’association compte parmi les cinq qui organisent la table ronde, avec l’Assemblée des premières nations, le Conseil national métis ainsi que les regroupements nationaux de femmes métisses et inuit. Selon les statistiques, les femmes et jeunes filles autochtones ont cinq fois plus de risques d’être victimes de violence que toute autre personne au Canada.
La directrice générale reconnait que l’appui du public canadien s’est avéré déterminant dans la tenue de l’évènement du 27 février. « Les gens sont derrière nous. On a reçu beaucoup d’appels, de conseils et de dons. Les gens voient la situation des femmes autochtones comme une tache à la réputation du Canada. »
D’après Claudette Dumont-Smith, la rencontre de quelque 200 participants (dix représentants de chacune des cinq associations nationales, dix de chaque province et territoire ainsi que dix du fédéral) n’a pas été facile à organiser. Les provinces étaient prêtes à participer si le fédéral embarquait et vice-versa.
« Les ministres fédéraux Kellie Leitch (Transport et Condition féminine) et Bernard Valcourt (Affaires autochtones et Nord canadien) seront parmi nous, souligne-t-elle. Mais on voulait aussi avoir les ministres de la Justice, de la Santé et de la Sécurité publique. Le premier ministre Harper a déclaré qu’il ne voulait pas de commission d’enquête nationale, que cette question n’est pas dans les priorités du gouvernement.
« Je sais que ce n’est pas une priorité pour tous les gouvernements, poursuit l’ancienne membre de la Commission vérité et réconciliation sur les écoles résidentielles autochtones. Mais ça doit le devenir pour que les meurtres et les disparitions arrêtent. Il y a de nouvelles victimes presque chaque jour. »
Une adolescente manitobaine laissée pour morte en 2014 à la suite d’une agression violente a aussi réclamé une commission d’enquête. Rinelle Harper a été ovationnée en décembre lorsqu’elle s’est adressée à 3000 délégués réunis à Winnipeg pour l’élection d’un nouveau chef national des Premières nations.
« Certaines personnes qui sont venues me voir ont partagé leur histoire de guérison, a-t-elle déclaré. Je demande à tout le monde ici de retenir ces quelques mots simples : amour, bonté, respect et pardon. »
Selon Claudette Dumont-Smith, un énorme travail de sensibilisation reste à faire. « Il faut changer l’attitude du public envers les femmes autochtones, qui sont considérées comme citoyennes de deuxième classe. Toute la communauté doit se concentrer sur la prévention de la violence, pour qu’il y ait une meilleure réponse à l’agression dans les couples et les familles. Il y a déjà des initiatives sur le terrain.
« Un dialogue va commencer, croit-elle. On va s’assoir, on va parler et voir comment on peut améliorer la situation. La table ronde ne remplace pas la demande d’une enquête nationale. »
L’Association invite le public à signer sa pétition en ligne en faveur d’une enquête fédérale. Elle affirme avoir documenté près de 600 cas de femmes disparues ou assassinées. La GRC a fait état en 2014 d’une liste de près de 1200 victimes.