le Mercredi 22 janvier 2025
le Jeudi 5 Décembre 2024 8:00 Éditoriaux

Bleu

  Photo : Maryne Dumaine
Photo : Maryne Dumaine

Chez certaines familles, quand on joue à un jeu de société, on se chicane pour le pion blanc ou le pion rouge… Chez nous, c’est le pion bleu qui domine! Est-ce à cause de mon nom, de la couleur des yeux de ma fille ou de la charte graphique du journal? Je ne sais pas! Mais, en ces longues soirées d’hiver, puisqu’on joue souvent aux jeux de société – qu’il est d’ailleurs possible d’emprunter à la ludothèque – la couleur bleue semble être une sorte d’inspiration constante…

En hiver, entrons collectivement dans une période bleue, à l’instar de Picasso, où nos émotions naviguent sur la palette immense de cette couleur primaire…

L’avez-vous remarqué? Des reflets des lacs gelés qu’on découpe pour les baignades nordiques aux cieux immenses lorsque le soleil pointe son nez, les nuances de bleus semblent infinies et bercent nos âmes au quotidien.

Dans nos régions arctiques, elle revêt aussi une dimension psychologique complexe. Lorsqu’elle fend le gris hivernal, elle devient un signe d’espoir, une promesse d’éclaircie. Mais, tel le personnage Tristesse dans le film Sens dessus dessous, elle peut aussi refléter la mélancolie. Ce blues qui s’intensifie lors des nuits les plus longues. Le phénomène d’encabanement, ou dépression saisonnière, n’est pas une légende urbaine. Les chiffres sur la santé mentale dans le Nord sont tristement éloquents. Le taux de suicide reste élevé, reflétant une réalité préoccupante partagée avec d’autres territoires nordiques. En 2018, le taux de suicide au Yukon était de 21,2 pour 100 000 habitants, soit près de deux fois la moyenne nationale canadienne.

Ces données soulignent la nécessité d’initiatives de prévention, telles que celle proposée par le Partenariat communauté en santé, le 6 décembre prochain. S’éduquer, en parler et agir sont des moyens d’atténuer l’ombre du blues.

Cette même date marque également la commémoration de la tragédie de l’École Polytechnique de Montréal, où 14 femmes ont été victimes de violence misogyne en 1989. Chaque année, cette journée nous rappelle l’importance de la mémoire collective et du combat contre la violence basée sur le genre.

Enfin, nous abordons aussi dans ces pages les relations entre le Yukon et l’Alaska, à l’aube du nouveau leadership de notre État voisin. Une autre nuance de bleu…

Mélancolie, dépression, commémoration, anxiété. L’hiver est propice au blues.

Dans ce bleu hivernal, il nous revient d’ajouter des touches de chaleur humaine. Passer voir des proches, appeler notre famille, cuisiner un peu plus pour apporter un plat à une personne que l’on sait seule ou désœuvrée sont des gestes simples, à notre portée et qui ne coutent presque rien.

Et pourquoi ne pas normaliser les câlins (avec consentement, bien sûr!)? Selon Harvard Health Publishing, « un câlin d’au moins 20 secondes peut réduire les niveaux de cortisol, l’hormone du stress, et augmenter la production d’ocytocine, l’hormone du bien-être. Le contact physique prolongé favorise donc la réduction du stress et améliore la santé mentale. » Voilà une bonne raison de prolonger les au revoir lors des partys du temps des fêtes!

En ce qui concerne les petites choses qui peuvent faire du bien, parlons aussi du répit de la TPS. Bien que critiquée et surprenante, je suis persuadée que, dans notre conjoncture économique, cette mesure devrait permettre de mettre un peu de baume au cœur dans plusieurs foyers. Certes, la consommation n’est pas le fondement du temps des fêtes (du moins, espérons-le), mais, avouons-le, la facture d’épicerie n’a jamais été aussi lourde.

En parlant de réconfort, saluons le succès de la Fabrique d’impro, portée par des bénévoles dévoué·e·s. Ce soir, le 5 décembre, la finale entre les jaunes et les rouges promet encore rires et émotions. Avec des salles presque toujours pleines, cette saison nous a offert des moments précieux de rires et de chaleur humaine, essentiels pour traverser l’hiver avec le sourire.

Enfin, soulignons les nouveaux bacs bleus de recyclage dans nos rues. Un geste quotidien modeste, mais porteur d’espoir pour un avenir durable.

Dans l’étendue des teintes de bleu, je vois le reflet de nos hivers : froid, mais lumineux et propice à la solidarité. Parce qu’au-delà des gris et des ombres, le bleu reste une couleur d’équilibre, un miroir de notre âme.

Alors, en ce cœur d’hiver, prenez un moment pour contempler l’immensité, réfléchir à vos émotions et à vos espoirs. Rappelez-vous que, dans la froideur de cette saison, un simple geste, une pensée ou un sourire peuvent, à eux seuls, colorer la journée de quelqu’un.

Bonne lecture!