le Samedi 14 décembre 2024
le Jeudi 21 novembre 2024 8:00 Éditoriaux

Une égalité des genres vaine?

  Photo : Adobe
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La Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes aura lieu le 25 novembre. Cette journée ouvre la campagne des 16 jours de lutte contre les violences basées sur le genre. Elle se termine le 10 décembre par la Journée des droits de la personne.

Seize jours donc pour parler, sensibiliser et éduquer sur les violences basées sur le genre. Il s’agit également de mobiliser les communautés pour dénoncer les actes de violence commis envers les femmes.

Beaucoup de travail reste à faire. En 2022, au Canada, 184 femmes et filles ont été violemment tuées, principalement par des hommes. Ainsi, une femme ou une fille est tuée toutes les 48 heures, selon l’Observatoire canadien du féminicide pour la justice et la responsabilisation. Ce nombre correspond à une augmentation de 20 % par rapport à 2019. Ces données sont plus élevées dans les territoires du Nord. Par exemple, environ six femmes autochtones sur dix ont vécu une forme ou une autre de violence entre partenaires intimes au cours de leur vie.

Ces violences genrées proviennent des injustices et inégalités entre les genres qui se manifestent un peu partout : dans les familles, la politique, les communautés, les groupes religieux, les médias, les milieux professionnels, les écoles, et ailleurs. Les messages patriarcaux et sexistes sont encore largement véhiculés.

La récente élection de Donald Trump à la tête des États-Unis donne froid dans le dos. Ses discours racistes et misogynes sont de sa réputation. Par exemple, il a tenu des propos racistes sur les personnes étrangères sans papiers qui « empoisonnent le sang » des Américain·e·s, les traitant aussi de « vermine ».

L’accès à l’avortement a été l’un des thèmes centraux pendant la campagne présidentielle américaine. En juin 2022, la Cour suprême des États-Unis a procédé à l’annulation de la garantie fédérale du droit à l’avortement, « Roe v. Wade ». Les États disposent désormais de la pleine liberté pour légiférer sur cette question. Une vingtaine d’entre eux ont adopté des restrictions, qu’elles soient partielles ou totales. Ces interdictions ou restrictions mettent en danger la santé de milliers de femmes qui feront face à un dilemme : agir illégalement ou voyager en dehors de leur État, si elles souhaitent choisir de ne pas mener à terme une grossesse non désirée.

Les violences peuvent se dérouler sur les lieux de travail. Le rapport Never Until Now: Indigenous & Racialized Women’s Experiences Working in Yukon & Northern British Columbia Mine Camps, publié en 2021, analyse l’impact de l’industrie minière sur les femmes et filles autochtones. Il met en lumière l’éthique coloniale de cette industrie, soulignant les traitements dégradants réservés aux travailleuses autochtones et racialisées dans les camps miniers. Ces femmes occupent souvent des emplois mal rémunérés, comme dans la cuisine ou le nettoyage, et sont confrontées à des taux élevés de harcèlement, de discrimination, d’abus de pouvoir et de violence fondés sur leur sexe, leur genre, leur race et leur origine autochtone. Par exemple, 36 % ont subi un harcèlement ou une discrimination fondée à la fois sur le sexe et la race, 63 % sur le sexe ou l’orientation sexuelle et 45 % sur la race ou l’origine autochtone.

Il semble alors essentiel d’informer et d’éduquer dès le plus jeune âge à ces questions, que ce soit à l’école, ou au sein de la famille. Sensibiliser aux violences, mais parler aussi de l’importance de l’égalité des genres. Expliquer aux filles leurs droits et le respect de ces droits, elles ont leur mot à dire.

Briser les tabous. On parle de plus en plus de consentement, de charge mentale. Conscientiser aussi pour que ce genre de violence et d’injustices ne se reproduisent plus. Le 6 décembre prochain, le Centre des femmes Victoria Faulkner et Les Essentielles organisent une vigile au Centre culturel Kwanlin Dün en mémoire des 14 femmes assassinées lors de la tragédie de l’École Polytechnique de Montréal en 1989.

Il s’agit de la responsabilité de chacun et chacune, mais celle aussi du gouvernement. Celle d’assurer un cadre sécuritaire dans lequel les filles et les femmes peuvent grandir, s’affirmer et évoluer, ainsi qu’offrir des services de soutien et de soins de santé. Celle aussi de mettre en place des politiques pour garantir une égalité des sexes, des droits et des chances.

Il y a tout de même bon espoir, car des avancées notables se sont accomplies au cours des dernières décennies. On observe, par exemple, une diminution du taux des violences familiales selon le Centre canadien de la statistique juridique. Ce déclin s’expliquerait en partie par l’augmentation de l’égalité et de l’autonomie financière des femmes. Ainsi, ces dernières peuvent quitter plus facilement les relations violentes dès qu’elles en perçoivent les signes.

Bref, le respect des femmes, ce n’est pas seulement le 25 novembre ou la Journée internationale des droits de la femme, le 8 mars, c’est chaque jour de l’année.