le Mardi 17 septembre 2024
le Jeudi 23 novembre 2023 8:00 Éditoriaux

Vulnérable

Comme c’est souvent le cas, le thème de cet éditorial s’est dessiné de lui-même : entre campagne contre la violence genrée, conférence sur le pouvoir de l’échec, préparation aux urgences et collecte de fonds pour la banque alimentaire, prenons un petit moment pour réfléchir à la notion de vulnérabilité.

Comme c’est souvent le cas, le thème de cet éditorial s’est dessiné de lui-même : entre campagne contre la violence genrée, conférence sur le pouvoir de l’échec, préparation aux urgences et collecte de fonds pour la banque alimentaire, prenons un petit moment pour réfléchir à la notion de vulnérabilité.

Par définition, le terme « vulnérable » signifie « être exposé à recevoir blessures, maladie ou souffrance ». Notre société associe donc souvent la vulnérabilité à une sorte de faiblesse. On parle fréquemment des personnes « vulnérables » comme étant en situation précaire, voire impuissantes.

Cependant, bien que la vulnérabilité soit quelque chose qui nous rende fragiles, elle mérite aussi d’être vue sous un autre angle. Dans une société qui glorifie la résilience et la force, pourrions-nous reconnaître que la vulnérabilité est un terreau fertile où la véritable connexion et la croissance émotionnelle prennent racine?

Partout, des standards de perfection s’imposent, surtout sur les médias sociaux. « Nous vivons une vie triste avec des photos joyeuses », me lançait une de ces phrases motivationnelles dont l’Internet est rempli. C’est vrai! Qui afficherait en ligne ses plus grandes faiblesses?!

Cependant, c’est peut-être dans le courage de partager nos peurs, nos incertitudes et nos échecs que réside la véritable compréhension de la vulnérabilité. Car ce sont souvent dans les moments de fragilité que se tissent des liens authentiques. Ainsi se crée une toile sociale solide et résiliente. C’est ce qui est ressorti d’ailleurs de la conférence Fail Boldly (voir en page 2), animée par Lauren Beille lors de la Semaine de l’innovation.

Être vulnérable, c’est reconnaître avec nos proches qu’une rupture a fait mal, c’est avouer à notre supervision qu’on a de la difficulté au travail, c’est remédier à une tension latente avec la personne concernée au lieu de ressasser sans avancer, c’est reconnaître qu’on s’est trompé… En d’autres termes, se montrer dans toute notre vulnérabilité, c’est avouer qu’on n’est pas une machine.

Notre vulnérabilité est l’essence même de ce qui nous rend humains. Elle transcende les masques de perfection et brise les barrières de l’isolement émotionnel.

C’est aussi un appel à la compassion et à l’empathie, qui renforce notre capacité à comprendre les autres et à construire des relations significatives.

Vous est-il déjà arrivé de vous tromper d’endroit pour un événement? D’arriver costumé à une soirée non déguisée? De manquer un avion ou d’oublier un rendez-vous?… La liste est longue (en tout cas, pour moi elle l’est!). Et la plupart du temps, nous gardons nos échecs bien enfouis au fond de nous, car la société perpétue l’idée que la vulnérabilité est incompatible avec le succès.

Alors, derrière un voile d’assurance, nous dissimulons nos insécurités, nos grands ratés, « nos actes manqués », comme chantait J.-J. Goldman. Tout en faisant cela, nous contribuons à faire perdurer une culture qui valorise l’apparence plutôt que l’authenticité.

Se montrer vulnérable n’est pas une entrave à la réussite. Au contraire, c’est un catalyseur de croissance personnelle. C’est en reconnaissant nos faiblesses que nous ouvrons la porte à l’amélioration et à l’apprentissage continu. C’est un acte de foi en soi-même : loin de la perfection, nous sommes en constante évolution.

Apprendre à embrasser notre vulnérabilité, c’est aussi créer un espace pour la compréhension mutuelle. Trop souvent, la crainte du jugement entrave notre capacité à partager nos véritables sentiments. Qui n’a jamais gardé pour soi « une crotte sur le cœur », de peur de ce que l’autre en penserait… Pourtant, en ouvrant nos cœurs, nous encourageons les autres à faire de même, établissant ainsi des liens profonds et significatifs.

Se montrer vulnérable, c’est une déclaration audacieuse que nous sommes prêts à être authentiques, malgré les défis.

La vulnérabilité est une force sous-estimée qui façonne notre humanité. Alors allons-y, embrassons cette force créatrice de connexion. Lançons-nous sans filet un peu plus souvent, car c’est peut-être ainsi que se formera notre parcours commun vers une plus grande compréhension et compassion pour le monde qui nous entoure.

Bonne lecture.