Ces derniers jours, les moments remarquables pour l’Histoire de l’Amérique du Nord ont été nombreux. L’intronisation du nouveau président américain a donné lieu à une avancée sans précédent vers l’égalité des genres : pour la première fois de l’Histoire, une femme a été nommée à la vice-présidence. Joe Biden, déjà, lutte contre la pauvreté de son pays et légifère en matière de protection de l’environnement de notre territoire. Et il y aurait tant d’autres choses à dire! Pourtant, depuis le 20 janvier dernier, notre univers connecté s’est enflammé pour autre chose…
Même lorsqu’on se concentre principalement sur ce qui se passe dans le mètre carré autour de soi (ici et maintenant, oui oui…), impossible d’ignorer ce phénomène de l’actualité en ligne : les mèmes les plus populaires du Web en ce moment ont un petit je ne sais quoi de Yukonnais. Avez-vous remarqué?
Un mème, c’est une photo humoristique déclinable à loisir qui inonde de façon virale (sans jeux de mots) les médias sociaux. Et ce qui déferle sur les murs et dans les chroniques internationales ces jours-ci, c’est un p’tit monsieur américain sur sa chaise pliante.
Quel est le rapport avec le Yukon?
C’est que le monsieur en question (sénateur et candidat démocrate aux présidentielles de 2020) porte des mitaines et un manteau non « griffé ». Voilà ce qui a attiré l’attention de la planète!
Dans un monde qui milite pour qu’on cesse de juger des gens sur leur apparence, le phénomène semble incongru : ce n’est pas la robe de Lady Gaga (ni sa broche dorée en forme d’oiseau) qui symbolise la résistance et la libération à l’occasion de cette passation de pouvoirs. C’est bien la marque du manteau d’un spectateur et le nom de l’artisane qui a fabriqué ses mitaines qui volent la vedette!
Des mitaines faites à partir d’un vieux chandail, fourrées avec une feutrine issue de bouteilles recyclées… ça sent le Yukon, les free store et la prof « un peu hippie » tout ça! Monde d’ailleurs, préparez-vous! La mode est sur le point de prendre un tournant décisif. Après la tendance Lumberjack des années 2010, c’est bien le style yukonnais qui pourrait arriver au sommet des regards.
Au Yukon, chacun va travailler dans la tenue qui lui convient, pas dans celle qui convient au regard d’autrui. Un pantalon Carhartt propre répond tout à fait à un code vestimentaire de soirée chic. La tendance organisationnelle du « vendredi décontracté » est ici un standard de tous les jours, même au sein des personnes qui occupent des postes avec de hautes responsabilités.
Cravate de travers, manteau léopard, bottes de caoutchouc, bandes réfléchissantes semi-greffées et bout de chemise qui dépasse en conférence de presse côtoient talons hauts et magnifiques apparats traditionnels… Ici, on peut toutes et tous faire notre boulot, être pris au sérieux et réussir, vêtu comme on l’entend.
Le mème populaire, c’est ainsi que je le vois : un symbole d’une libération bien plus révélatrice qu’un geai moqueur doré. C’est le message, modélisé, que pour changer le monde, on n’a besoin ni d’un costume trois-pièces (dont la valeur pourrait nourrir toute une famille pendant un an), ni d’un uniforme et encore moins d’un décolleté. On a seulement besoin d’une bonne dose de clairvoyance, d’une attitude respectueuse, militante et positive. Et d’outils pour communiquer : parfois d’un mégaphone (tel que l’a compris Sophie Molgat, activiste environnementale de 14 ans), parfois juste d’un papier et d’un crayon. Et on a surtout besoin d’écouter.
« Mouais, ici, on le savait déjà », diront les puristes. N’empêche, en voyant défiler le mème du p’tit monsieur, bien tranquille, sur sa chaise pliante, je ne vois pas la moquerie. Ce que je vois de ma fenêtre, c’est plutôt une façon, pour les internautes, d’affirmer une sorte de #jesuisbernie.
Monsieur Sanders, vu du Yukon, les mitaines et le manteau passent très bien. Le masque jetable, quant à lui, pourrait susciter un autre débat…