Vous êtes vous déjà arrêté, le visage face au vent, tentant de ressentir ce que le souffle apportait avec lui? Un vent chaud du sud, venant de l’Alaska et de ses zones côtières, apporte en plein hiver une caresse sur la peau mêlée à un pincement au cœur (pensant aux bourrasques parfois dévastatrices qu’il a pu y engendrer). L’Aquilon (vent du Nord) apporte avec lui les températures glaciales des Terres arctiques.
Le fait est que quand il vente, c’est souvent un signe que les temps changent.
Voilà une métaphore qui virevolte sans souci des frontières en ce moment : le vent du changement. « Seul l’arbre qui a subi les assauts du vent est vraiment vigoureux, car c’est dans cette lutte que ses racines, mises à l’épreuve, se fortifient », écrivait Sénèque, philosophe de la Rome antique. Si l’on s’en tient à cette citation, 2020 aura sans aucun doute fortifié plus d’un arbre!
Partout, les racines ont été mises à l’épreuve. Que ce soit en tant qu’individus, communautés, nations ou même en tant qu’espèce, nous avons toutes et tous été mis à l’épreuve des changements.
Des élections américaines aux conséquences de la pandémie, des accomplissements de projets individuels aux stratégies politiques mises en place (et notamment à une ampleur sans pareil, par des femmes autochtones, cette semaine!), le changement de décennie aura marqué l’Histoire à tous les niveaux : local, régional, national et mondial.
Ici, au Yukon, privés de voyages dans le Sud, les Oiseaux des neiges ont encouragé l’économie des rénovations et de la construction locale. Au lieu de bourlinguer aux quatre coins du monde, nous avons exploré ou redécouvert nos propres contrées. (Peut-être avez-vous eu l’immense chance de voir l’hôtel de Keno de Léo Martel, qui dans une triste bourrasque vient de s’envoler en fumée).
Nous avons aussi découvert des nouvelles méthodes et acquis des compétences technologiques qui, quelques années auparavant, nous paraissaient tirées de romans de science-fiction : nous pouvons désormais être proches dans la distance, pour travailler, échanger, développer, connecter, partager et même aimer.
Adaptations, travaux, persévérances, nouveaux départs, réalisations, résilience… Nous sortons de cette année grandis et plus forts. Exténués, certes, pour beaucoup d’entre nous, car voyager à contrevent ne se fait pas sans effort. Les défis de la vie, tels les éléments déchainés, ont testé nos capacités, mais nous ont aussi renforcés en tant qu’individus et probablement également, en tant que communauté. Pris dans un tourbillon incontrôlable nous avons recommencé à regarder plus proche de nous, dans le moment présent. Nous nous sommes engagés dans notre quotidien et avons pris soin les uns des autres.
En plein cœur d’un hiver qui ne ressemblera à aucun autre pour nombreux d’entre nous, prenons le temps d’apprécier la caresse du vent sur nos visages. Pour ces fêtes de fin d’années, je vous souhaite, au nom de toute l’équipe du journal, d’aller jouer dehors, d’observer les aurores avec un chocolat chaud, de lire auprès du feu…
Profitons de cette accalmie hivernale pour reprendre notre souffle, nous ressourcer, appeler nos proches du Yukon ou de l’autre bout du monde.
Nous ne savons pas quel bon vent pointera son nez à l’arrivée de janvier, mais d’ici là, regardons le chemin parcouru, et plus que jamais, reprenons des forces, ici et maintenant.