C’est la rentrée! « You know the sunshine when she’s gone » dit la chanson. Je crois que cette année, la rentrée a le goût doux amer qui résonne avec ces paroles…
Tant de choses nous ont manqué depuis le début d’une longue, très longue « relâche de mars ». Nous avons toutes et tous eu l’occasion de réaliser quels étaient les choses, les gens, les ressources qui nous manquaient le plus. Qu’est-ce qui brillait le plus par son absence, pour vous? Les amis, le social, l’école, une situation économique, la vie culturelle et les sorties, une routine?
Mon sunshine, c’est vous! Communauté et francophonie, je vous ai écrit deux lettres d’amour à travers mes éditoriaux. C’est vous dire à quel point je vous affectionne. Vous m’avez manqué pendant la pandémie! Car oui, avec la COVID, nous avons eu l’occasion de vérifier un fait désormais indéniable : notre lectorat yukonnais nous lit moins sur écran.
Quelle fierté je ressens en écrivant ces mots!
Oh qu’on l’aime, ce journal qui se froisse dans nos mains! Vous êtes, vous lecteurs et lectrices de l’Aurore boréale, fidèles au papier. Le numérique est un outil, mais l’essence même du journal, c’est d’être entre vos mains. Bonheur!
Un journal communautaire, c’est ce qu’on garde, découpe et affiche parfois ici ou là… En numérique, pas de journal qui traîne dans la bécosse. Pas de moment devant le poêle à bois à lire (ou relire) un article. Pas de journal qui se passe de main en main (lavées!) au sein de la cellule familiale ou qui sert à protéger un verre dans un déménagement!
L’équipe du journal croit au rayonnement de notre communauté, à ce sentiment d’appartenance que nous développons en apercevant un visage connu. Nous croyons en la fierté de se voir en format tabloïd et aussi à l’histoire qui se crée au travers des archives qui seront feuilletées dans le futur… Tout cela, bien honnêtement, sans papier, c’est plus difficile.
Immense fierté, donc. Tout d’abord, en constatant que notre lectorat a préféré les activités extérieures plutôt que les écrans. Bravo! Nous nous sommes goinfrés de sourires d’enfants, de rires, de baignades, de randonnées, de jeux, de temps de qualité pour prendre soin et nous enquérir de ceux qui comptent pour nous. Quel étrange, mais bel été! « C’est presque gênant », ai-je entendu à plusieurs reprises, « de vivre au Yukon, en ce moment, tellement nous sommes choyés! » J’approuve.
Soulagement aussi de savoir que nous sommes capables de revenir au format papier. Tellement de journaux ont malheureusement dû mettre la clé sous la porte. Plusieurs journaux de la francophonie canadienne considèrent publier dorénavant exclusivementen numérique. Les temps sont durs. Oui, nos communautés sont capables de s’adapter, mais économiquement, pour plusieurs, les répercussions de cette crise mondiale seront ressenties pendant encore des années. « Le nouveau normal »…
Doit-on pour autant abandonner des concepts qui sont à l’origine de ce que nous sommes en tant que communauté? Oui, l’importance du papier, mais bien d’autres piliers sont remis en question. Pour n’en citer qu’un seul autre, je voudrais parler des comptoirs communautaires (free stores).
Ces lieux où le bric-à-brac qui nous encombre trouve une nouvelle vie ailleurs. Certes, le bon vieux corona pourrait y voir un lieu de prédilection. Mais honnêtement, dans une période aussi difficile économiquement, pensons-nous vraiment que fermer les comptoirs communautaires est un geste anodin? Aux portes de l’automne, les dépenses se multiplient.
Sans comptoir communautaire, c’est le pouvoir d’achat qu’on restreint encore plus. Quelles sont les options pour équiper un foyer de vaisselle ou de petit mobilier? Pour renflouer une garde-robe? Pour donner un sourire à un enfant grâce à un nouveau jouet « dont un autre enfant ne se servait plus ». Que reste-t-il comme option au-delà des achats en ligne ou au Walmart, si notre revenu ne nous permet pas d’acheter un ensemble fait par des artisans locaux? Lorsque la possibilité de se procurer des équipements variés de seconde main n’est plus possible, vers quoi nous tournons-nous? Vers l’équipement de basse qualité, fabriqué très loin de chez nous, malheureusement… Au lieu de remplir les dépotoirs de matériel encore utilisable, on voit éclore des initiatives de quartier, des zones « gratuites ». C’est dire que le besoin est là!
Nous avons perdu des emplois, des ressources, des revenus… Responsables qui ont fermé ces lieux de bric-à-brac, avez-vous évalué les économies faites grâce à ces endroits indispensables? Ces économies mêmes qui nous permettaient d’encourager par ailleurs les commerces locaux? Sans parler du coût de traitement de ces déchets qui n’en sont pas!
Les rumeurs courent sur de probables réouvertures. Alors, croisons nos doigts (même s’ils sont un peu noircis par l’encre) pour que ce soit vrai, car ça aussi, c’était un peu de rayon de soleil, et avec la pluie qu’on a en ce moment, on a tous besoin d’une bonne dose de baume au cœur!