Le changement d’année est une période particulière. On en profite pour faire le bilan de la dernière année. On se montre tantôt critique, tantôt nostalgique. C’est aussi le moment d’un nouveau départ. Le regard tourné vers l’avenir, on se donne des résolutions, on se lance des défis, on espère le mieux pour les douze prochains mois.
Ce qu’on peut retenir de 2013, c’est que la confiance de la population en ces instances politiques continue de se désagréger. La population devient de plus en plus désabusée de la politique, que ce soit à l’échelle municipale, territoriale, provinciale ou fédérale. L’année 2013 a contribué à ce climat sur bien des plans : à Toronto, on a un maire qui a des problèmes de drogue, d’alcool (et de tempérament). Au Québec, la Commission Charbonneau nous a permis de voir que bien des maires sont aveugles, quand ils ne sont pas carrément des bandits. Mais la crise la plus profonde est celle du Sénat.
Depuis des années, les gens remettent en question l’utilité de cette instance. Le rôle des sénateurs n’a jamais été clair, de même que leur pouvoir dans la vie politique. Les mandats sont beaucoup trop longs. Mais avec le scandale qui a secoué le Sénat, on se rend compte qu’il est temps d’apporter des réformes à cette institution qui est au cœur de notre système politique. Mike Duffy, Pamela Wallin et Patrick Brazeau, trois sénateurs et membres du caucus conservateur ont été emportés par la tourmente, alors qu’ils ont reçu des allocations de logement qui leur ont été payées alors qu’ils n’auraient jamais dû y avoir droit.
La tempête a pris encore plus d’envergure quand le chef de cabinet du premier ministre, Nigel Wright, a signé un chèque personnel de 90 000 $ à Mike Duffy pour lui permettre de rembourser les sommes qu’il devait. Duffy, Wallin, Brazeau et Wright ont disparu de la scène politique. Mais le vrai problème n’est pas tant celui des individus qui ont profité du système que l’existence même de ce système qui ouvre la porte à tous ces abus.
Pire encore, ce scandale a éclaboussé jusqu’au premier ministre. Après tout, Nigel Wright était un membre de sa garde rapproché. L’Opposition soulève, avec raison, des questions pour savoir jusqu’à quel point le premier citoyen du pays était au courant de tout cela. La vraie réponse, nous ne l’aurons probablement jamais. Mais cela ne fait qu’apporter un peu plus au cynisme ambiant. Espérons pour 2014 et le futur que cette crise amènera des réformes au sein du Sénat… et, puisque nous sommes en train de rêver, pourquoi pas à l’ensemble de notre système politique.
Du côté de la francophonie, on ne peut passer sous silence les différents procès intentés par les francophones pour faire reconnaître leur droit à l’éducation dans leur langue : en Colombie-Britannique, en Saskatchewan, aux Territoires du Nord-Ouest et, bien sûr, au Yukon. Le 20 janvier, les audiences du procès médiatisé de la Commission scolaire francophone et de la Fédération des parents francophones de la Colombie-Britannique reprendront. Les deux organismes poursuivre la province pour l’obliger à donner à la Commission scolaire les moyens d’offrir le même niveau de services aux élèves des écoles francophones que celui offert aux anglophones.
Mais peu importe à quel endroit ça a lieu, le cœur du problème reste le même : le réseau francophone en milieu minoritaire manque de moyen et ne peut poursuivre son mandat d’assurer que les générations futures puissent parler français dans une société en changement constant. On parle d’une poursuite de 350 millions de dollars. Une des écoles de Vancouver est passée de 60 à 300 élèves depuis sa création en 2001. Ici, l’espace de l’école Émilie-Tremblay et l’Académie Parhélie est occupé au maximum de sa capacité et un juge a ordonné au gouvernement territorial d’installer les portatives. Pendant ce temps, dans une volonté de désengorger les locaux, la Commission scolaire a déménagé ses pénates dans un édifice de Tahkini.
L’année 2014 devrait voir la résolution de quelques-uns de ces procès. C’est la troisième vague d’action juridique dans ce domaine, après celles des années 1990 et celles des années 2000. Chaque fois, la cour a donné raison aux francophones qui voulaient faire valoir leurs droits en matière d’éducation. Malheureusement, les problèmes ont été réglés au cas par cas plutôt que de manière globale. Alors, il faut revenir à la charge chaque décennie. La judiciarisation de la question n’aide pas à résoudre le problème. On est en droit de se demander s’il y a une véritable volonté politique d’assurer que les francophones sont respectés à la grandeur du pays. Espérons que cette fois-ci soit la bonne. Et pour le Yukon, espérons que 2014 permettra de voir l’arrivée d’une nouvelle école secondaire francophone.
Quant à vous, chers lecteurs, je vous souhaite une année en santé, car c’est la base sur laquelle on peut bâtir pour réaliser tous nos projets. De notre côté, si 2013 marquait la trentième année d’existence du journal, nous souhaitons que 2014 soit la première année d’une nouvelle trentaine.