« Les conséquences d’un acte sont incluses dans l’acte lui-même. » George Orwell
Le 19 octobre, deux cent cinquante démonstrations s’opposant à la fracturation hydraulique ont eu lieu dans vingt-six pays pour la deuxième édition d’un événement appelé Global Frackdown. En Angleterre, en Espagne, en France, au Canada, des gens électrisés par les notions de qualité de l’eau et ultimement de survie de la planète se sont rassemblés pour faire entendre leur voix.
Dans les sous-sols de la terre sommeillent des amas tranquilles de gaz ou d’huile, des combustibles fossiles qui ont pris des millions d’années à se former. Enfouis à des profondeurs imposantes, dans des crevasses mille fois plus obscures que nid de chauves-souris, ces monceaux de carburant potentiel font la grasse matinée.
Dans leur voisinage, personne ne se doute des noirs desseins conçus pour les projeter hors de leur cocon millénaire afin de les transformer en ressources gazières… qui ne feront pas long feu. Encore moins que pour les débusquer, il faut utiliser une technique musclée : la fracturation hydraulique.
Des jets puissants d’une mixture d’eau, de sable et de produits chimiques variés sont violemment projetés dans le cœur de la Terre afin de libérer ces précieux gaz. Des poussées hydrauliques si violentes que des fracturations en résultent; il arrive même que la terre en tremble, réagissant à grands coups de soubresauts, prise soudainement d’un mauvais hoquet.
Devrait-on y voir le signe que cet assaut est excessif, voire fou furieux? À qui appartiennent les entrailles de la terre et leur doit-on un certain respect? Et qu’advient-il de cette quantité prodigieuse d’eau souillée par des produits chimiques que nul ne veut nommer? Cette eau pourrie pourrait-elle se frayer un chemin jusqu’aux cours d’eau cristalline qui alimentent la faune, la flore et l’humanité?
Peut-on penser que ces nappes souterraines ont leur raison d’être, là où elles sont, emprisonnées dans le grand mystère d’une forteresse rocheuse? Le gaz de schiste existe dans l’intimité de la terre, gardien de secrets que les hommes ne soupçonnent même pas.
Ces secrets, s’ils étaient percés, parleraient d’équilibre et de répit nécessaires pour refaire l’énergie de la planète. Mais la perspicacité n’est pas la qualité d’une industrie affamée en mal d’énergie.
La fracturation est un procédé qui ne fait pas l’unanimité. Tout récemment au Nouveau-Brunswick, une protestation organisée par les Mics Macs a été réprimée par une injonction et l’aide de la police. Cet été, le Conseil des Premières nations du Yukon a fait savoir sa position sur la fracturation : pas d’extraction de ce type sur son territoire. Est-ce que cette décision aura du poids?
Il est tentant de faire un parallèle avec les protestations des Dénés de Ross River quant à la question des claims miniers. Dans son jugement, la Cour suprême du Canada a statué que le gouvernement du Yukon devait consulter les Premières nations avant d’accorder des claims miniers pouvant avoir des conséquences négatives sur leurs revendications territoriales.
Y aura-t-il consultation sur la question de la fracturation?
La raison pour laquelle ce mot est sur toutes les lèvres est évidente. C’est un mauvais mot, un mot à bannir du vocabulaire de l’industrie minière et gazière.