Des éditoriaux sur le printemps, il en a plu, il en a neigé et il en a venté. Ces écrits ont célébré chacun à leur façon — des crocus poilus hâtifs aux merles éperdus tardifs — l’influence du climat sur la population yukonnaise.
Mais la belle saison 2013 s’annonce différente puisqu’un artiste singulier a chanté sa survenance. L’astronaute canadien Chris Hadfield est rentré sur Terre le lundi 13 mai. Quelques heures avant de toucher terre, l’homme aux multiples talents a interprété un vieux succès du Britannique David Bowie : Space Oddity. Et la prestation a été filmée et présentée à un public trop vaste pour être recensé.
Quelque chose d’infiniment touchant se dégageait de cette vidéo. Était-ce l’immensité presque palpable entrevue par la fenêtre de la capsule spatiale (spirale sans fond que les poètes n’ont pas encore chantée) ou cet homme qui chantait tout simplement afin d’entrer en contact avec l’humanité demeurée derrière, en bas sur la Terre? Était-ce la justesse du ton et la légèreté de la guitare qui ne perdait pas sa puissance malgré ses ailes invisibles?
Était-ce le fait de se savoir l’invité d’honneur dans ce théâtre onirique, bien installé aux premières loges qui était troublant? Quelle surprise que d’entendre la musique, cette guérisseuse de l’âme humaine, réchauffer une nef froide vouée à la recherche savante et méthodique! L’espace de quelques minutes, tous les drames ont pris la fuite et il ne restait que le talent, l’empathie et l’espoir.
Le voyage de cinq mois du Canadien dans la Station spatiale internationale a été balisé par un partage constant de ses expériences grâce aux médias sociaux. Son extraordinaire aventure qui hier encore tenait de la science-fiction est réelle et vérifiable. Les férus de sciences ou de voyages astraux ainsi que les internautes ont joint l’équipage et voyagé dans le confort de leur maison, de leur travail ou de leur voiture. Les voyages virtuels forment la jeunesse et un jour on dira peut-être : « Heureux qui comme Hadfield a fait un beau voyage. »
Dans cet immense vaisseau spatial qui semble sorti tout droit d’une émission de télévision des années 1960, des hommes de différentes nationalités travaillent et vivent ensemble dans ce qui semble être un endroit paisible et contrôlé. Les malheurs et vicissitudes du genre humain n’y sont point présents ou n’y ont pas été invités. Une serre expérimentale en orbite qui cherche qui, qui cherche quoi? La connaissance de l’infini sans limites qui tourbillonne dans l’obscurité totale ou dans une explosion de lumière pourrait-elle être une réponse aux problèmes des hommes?
Combien de distance faut-il mettre entre le genre humain et son habitat naturel afin qu’il puisse établir des rapports harmonieux avec ses voisins de palier? Nul ne le sait encore, mais l’avenir le dira peut-être.