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le Jeudi 5 avril 2018 12:14 Société

Le Plan d’action dévoilé : « Le plus gros investissement de l’histoire »

Plusieurs intervenants intéressés par l’annonce du plan d’action mercredi 28 mars, dont la Fédération de la jeunesse canadienne-française et la Fédération des communautés francophones et acadienne. Photo : Facebook melanie.joly.965
Plusieurs intervenants intéressés par l’annonce du plan d’action mercredi 28 mars, dont la Fédération de la jeunesse canadienne-française et la Fédération des communautés francophones et acadienne. Photo : Facebook melanie.joly.965

Lucas Pilleri (Francopresse)

Le Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023 : Investir dans notre avenir a été dévoilé ce mercredi 28 mars à l’école Mauril-Bélanger d’Ottawa. Le plan repose sur trois piliers : renforcer les communautés, améliorer l’accès aux services et promouvoir un Canada bilingue. Avec 2,7 milliards de dollars investis sur cinq ans, il constitue ainsi le plus gros effort fédéral depuis 2003, soutient la ministre responsable, Mélanie Joly. Le tout avec un accent porté sur l’immigration francophone, l’accroissement du bilinguisme, et la mise en avant d’un « par et pour » les communautés.

Plusieurs intervenants intéressés par l’annonce du plan d’action mercredi 28 mars, dont la Fédération de la jeunesse canadienne-française et la Fédération des communautés francophones et acadienne. Photo : Facebook melanie.joly.965

Le choix de l’école élémentaire publique Mauril-Bélanger à Ottawa ne s’est pas fait au hasard. Le député libéral franco- ontarien, décédé il y a deux ans, a été salué par Justin Trudeau. Le premier ministre lui a rendu hommage en saluant ce « grand amoureux de la langue française et ardent défenseur des intérêts des communautés en situation minoritaire », évoquant, sourire aux lèvres, le fait qu’il était « techniquement un Franco-Ontarien » lui aussi.

Trudeau engagé dans le dévoilement

Le premier ministre a évoqué sa propre situation en introduction : « Je considère mon bilinguisme non pas seulement comme un atout, mais aussi comme une partie fondamentale de qui je suis ». Il a ensuite fait référence à la « riche histoire de nos ancêtres et de leur culture qui, depuis, est devenue la nôtre », avant d’ajouter qu’il incombait désormais aux nouvelles générations de poursuivre l’héritage de cette dualité linguistique.

Le chef du gouvernement a souligné la situation préoccupante de la place du français dans la société. « Ce n’est pas un secret que le français à l’extérieur du Québec a pris du recul dans les dernières années », a-t-il avancé, étayant son propos par l’argument que « pendant presque dix ans le gouvernement conservateur a choisi de sous-investir dans les programmes, signalant clairement que le maintien du caractère bilingue de notre pays n’était tout simplement pas une priorité pour lui ».

Le premier ministre a déclaré, non sans satisfaction, que le total de la contribution fédérale pour les cinq ans à venir s’élèverait à 2,7 milliards de dollars, constituant ainsi « le plus gros investissement dans les communautés de langues officielles dans l’histoire de notre pays ».

« Par et pour » les communautés

Trudeau a également insisté sur le fait que cet argent serait investi directement dans les communautés, « car elles savent mieux que personne quels sont leurs besoins et défis ». Le Plan d’action aurait ainsi été conçu « par et pour » les communautés.

Puis, Mélanie Joly s’est avancée au pupitre. « Aujourd’hui, nous réitérons l’un des principes fondamentaux de notre contrat social : la dualité linguistique », a-t-elle démarré. Se décrivant comme « témoin privilégiée de la vitalité des communautés de minorité de langue officielle », la ministre du Patrimoine canadien a assuré reconnaître les nouvelles réalités des communautés et vouloir répondre à ces « tendances préoccupantes » évoquées précédemment et révélées par le Recensement de 2016.

Parmi elles figure la baisse du poids démographique relatif des francophones à l’extérieur du Québec qui passerait de 3,8 % en 2016 à 3 % en 2036, contre 6,1 % en 1971. Joly souhaite ainsi rétablir la proportion de francophones vivant en milieu minoritaire à 4 % d’ici 2036.

D’autre part, la ministre entend lutter contre le faible taux de bilinguisme à l’extérieur du Québec, de seulement 6,8 % en 2016 et prévu à 6,7 % en 2036. L’objectif fixé est d’atteindre 9 % d’ici 2036. « Nous voulons une francophonie canadienne forte et un Canada bilingue », a-t-elle résumé.

Un gros investissement

En plus de poursuivre les investissements courants en appui aux langues officielles engagés depuis 2003, le nouveau Plan d’action prévoit 500 millions de dollars supplémentaires pour les cinq prochaines années. « On parle au total de 2,7 milliards investis », a présenté Mélanie Joly. La somme additionnelle inclut les 400 millions proposés dans le budget de 2018, surenchéris des initiatives récentes telles que l’investissement dans les infrastructures éducatives communautaires.

« Nous avons entendu le cri du cœur des organismes », a lancé la ministre pour commenter ce budget généreux. Dans un discours ponctué d’applaudissements, la ministre du Patrimoine canadien a listé la panoplie de mesures en soutien aux communautés : aide à la petite enfance, réponse à la demande d’enseignantes et d’enseignants de français, investissement dans les infrastructures éducatives, lancement d’un outil en ligne d’apprentissage, soutien au caractère bilingue de la capitale, stratégie nationale d’immigration francophone, « la première de notre histoire », et appui aux médias en situation minoritaire, « pour leur permettre de continuer à être le vecteur de l’identité des communautés ».

Une affaire à suivre

Lors de la période de questions- réponses avec les médias, l’immigration francophone est revenue dans le débat. Mélanie Joly a alors précisé qu’il s’agira « d’aider à la promotion à l’étranger, à l’accueil et finalement à l’intégration et à la rétention ». Elle a ajouté que l’immigration francophone était la clé face au vieillissement des communautés linguistiques. Ici, l’objectif du gouvernement reste de faire passer la proportion d’immigrants francophones hors Québec à 4,4 % d’ici 2023.

Quant à la lutte contre le bilinguisme stagnant, Mélanie Joly a confirmé qu’elle miserait sur les professeurs de français, « avec davantage de formations et d’échanges » pour répondre à la grande demande. L’outil en ligne d’apprentissage permettra en outre d’accroître l’accès aux deux langues officielles.

La ministre a aussi réitéré le concept du « par et pour » les communautés, « au cœur même du Plan d’action ». Elle a d’ailleurs fait référence aux consultations et au travail de collaboration mis en œuvre par le gouvernement.

Puis, une élève de 6e année de l’école Mauril-Bélanger a elle aussi posé sa question : « Lorsque vous prenez des décisions, prenez-vous aussi en compte l’opinion des enfants? » Joly l’a alors confortée en parlant du soutien aux professeurs et de l’investissement en petite enfance et en éducation.

Reste à savoir ce que les premiers intéressés, à savoir les organismes communautaires, penseront de ce nouveau Plan d’action.