le Samedi 14 décembre 2024
le Jeudi 21 novembre 2024 7:54 Économie

Industrie minière : impact sur les communautés

Faro a abrité jusqu’à 2 000 habitants lorsque la mine de plomb et de zinc était à son plein potentiel dans les années 1970. Le village s’est retrouvé avec de nombreuses maisons abandonnées après sa fermeture en 1998. — Photo : Gwendoline Le Bomin
Faro a abrité jusqu’à 2 000 habitants lorsque la mine de plomb et de zinc était à son plein potentiel dans les années 1970. Le village s’est retrouvé avec de nombreuses maisons abandonnées après sa fermeture en 1998.
Photo : Gwendoline Le Bomin
L’ouverture d’une mine entraîne des répercussions tant positives que négatives sur la communauté environnante. Même chose lors de sa fermeture qui ne laisse pas son environnement indemne à la suite du départ du corps travailleur.

Plusieurs études ont été menées pour connaître l’impact social de l’industrie minière au Canada et au Yukon. Toutes sont en accord sur un point : elle modifie considérablement l’environnement des personnes vivant autour de la mine.

Lors de l’ouverture d’une mine, c’est toute une variété de changements qui sont apportés à la région. La mine crée des emplois généralement bien rémunérés et attire donc plusieurs nouvelles travailleuses et nouveaux travailleurs. Des routes sont construites et améliorées, les infrastructures se développent et des commerces s’ouvrent, dynamisant temporairement la région donnée.

Au Yukon, plusieurs villages se sont créés ou développés, ne serait-ce que le plus connu, le village de Dawson à la fin des années 1800. La plus grande ancienne mine de plomb et de zinc à ciel ouvert du monde, située à Faro, a créé un village abritant jusqu’à 2 000 personnes dans les années 1970. Elle était alors la deuxième ville la plus peuplée après Whitehorse. On trouvait une piste de curling, un grand magasin, un hôtel de luxe et un cinéma. Toutefois, après sa fermeture, on ne comptait plus que 300 personnes et de nombreuses maisons abandonnées.

Quels impacts?

Plusieurs études démontrent que la présence d’une mine aurait des effets néfastes sur la population locale. La violence et le harcèlement au travail affectent particulièrement les populations autochtones, les femmes et les minorités sexuelles et de genre.

La Société de conservation du Yukon rapporte que L’enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées (2019) a révélé que l’extraction des ressources aggrave l’insécurité économique et intensifie la violence et la discrimination raciale envers les femmes et les filles autochtones. Un rapport de 2000 (Gaining Ground : Women, Mining and the Environment) du Yukon Status of Women Council souligne que les femmes dans l’industrie minière occupent principalement des postes administratifs ou de soutien, bien que des progrès aient été réalisés dans des domaines comme la géologie ou l’ingénierie. Pour Kayla Brehon, analyste minière à la Société de conservation du Yukon (SCY), même si cette étude est un peu ancienne, les résultats sont encore d’actualité.

Les femmes restent également sous-représentées dans les postes de direction. Une étude de 2020 de la Liard Aboriginal Women’s Society (Never Until Now) a montré que les conditions de travail pour les femmes dans les camps miniers n’ont pas évolué favorablement en 20 ans. De nombreuses femmes occupent des postes mal rémunérés et éprouvants, comme cuisinières ou aides-cuisinières, et subissent des discriminations liées à leur sexe, orientation sexuelle ou origine. Les salaires entre hommes et femmes ne sont pas équitables.

De plus, dans les communautés du Yukon, le travail dans le secteur minier peut mener à une consommation accrue de substances et à un stress familial croissant, selon un rapport du gouvernement publié en 2023.

Les projets miniers peuvent également mettre à rude épreuve les infrastructures sociales du Yukon, comme les services de santé, d’urgence et de garde d’enfants. La demande accrue en matériaux, services, main-d’œuvre et énergie peut également entraîner une hausse du coût de la vie et réduire l’accès à des services essentiels.

Malgré tout, ce bilan peut être mitigé. En effet, dans le même rapport, le gouvernement nuance ces répercussions. L’industrie minière entraînerait à la fois des bénéfices positifs et des impacts négatifs. « Par exemple, les nouvelles infrastructures routières résultant de l’activité minière peuvent améliorer l’accès aux activités terrestres, mais cet accès accru peut également avoir des répercussions négatives sur les activités traditionnelles des autochtones et sur les zones de récolte », peut-on lire.

Kayla Brehon, analyste minière à la Société de conservation du Yukon, pense que « les personnes qui viennent travailler temporairement dans une mine peuvent poser des problèmes aux communautés locales. »

Photo : Gwendoline Le Bomin

Des solutions?

Selon Kayla Brehon, « il est certain que si vous deviez soutenir l’exploitation minière, vous devriez également soutenir les femmes, les personnes racialisées et les personnes de sexe différent pour qu’elles puissent travailler dans les zones minières, dans les sociétés minières ». Elle pense que ces violences se poursuivent, car les victimes de violence ou de harcèlement craignent de dénoncer.

De son côté, le gouvernement territorial élabore une nouvelle législation sur les minéraux en collaboration avec les gouvernements des Premières Nations du Yukon et les groupes et gouvernements autochtones transfrontaliers.

« Notre objectif est d’améliorer la gestion des ressources minérales du Yukon de manière à respecter les relations des Premières Nations avec la terre et à soutenir une industrie minière moderne et durable. L’un de nos objectifs est de veiller à ce que le nouveau régime minimise les impacts socio-économiques négatifs et maximise les avantages socio-économiques », rapporte un employé des communications du gouvernement.

« Au printemps 2023, nous avons organisé une consultation publique sur les approches potentielles que nous envisageons pour cette nouvelle législation. Les impacts socio-économiques ont fait partie des sujets abordés », ajoute-t-il.

En conclusion, la SCY estime que « toutes les mines s’épuisent inévitablement. Nous devons simplement tenir compte d’autres facteurs que les gains économiques à court terme. Les coûts environnementaux et sociaux à long terme que la fermeture entraîne inévitablement soulignent le danger de se concentrer uniquement sur les gains économiques à court terme. »

IJL – Réseau.Presse – L’Aurore boréale

Cet article s’inscrit dans une série pour mieux comprendre l’impact de l’industrie minière au Yukon. Le prochain article de cette série abordera le rôle des Premières Nations.