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Développer un prototype simple et peu coûteux, qui pourra intéresser et sensibiliser les citoyennes et citoyens : c’était l’idée derrière les conteneurs en métal de John Postma, construits selon un modèle international en acier inoxydable d’un diamètre de 200 mm et d’une hauteur de 400 mm.
Les trois prototypes ont été placés sur des trépieds en bois et l’ouverture à deux mètres au-dessus du sol, à Whistlebend, à Cowley Creek et au lac Fish. « Les endroits ont été choisis et par commodité, et pour respecter les vents », précise le scientifique spécialiste de l’atmosphère.
John Postma voulait qu’un des récipients se retrouve plus au nord de la ville et qu’un autre soit au sud, puisque les vents dominants du Yukon proviennent du sud. Le but était de récolter les microplastiques présents dans l’atmosphère, soient de fines particules de plastique dont la taille est inférieure ou égales à cinq millimètres.
Première collecte de microplastiques atmosphériques
De l’eau ultrafiltrée a été placée dans le fond des récipients pour empêcher les particules atmosphériques d’être emportées par le vent. Ensuite, l’analyse des résultats a été effectuée après le filtrage du contenu des récipients.
Les résultats sont clairs : « quoiqu’en petite quantité, un nombre significatif de [particules de] plastique tombe continuellement du ciel de Whitehorse, et probablement du reste du Yukon ».
Le taux de dépôt à Whitehorse est en moyenne de 10 fibres par mètre carré, et ce, quotidiennement. Le gouvernement du Yukon a déjà récolté des échantillons dans les eaux du territoire, mais jamais dans l’atmosphère. L’étude de John Postma, réalisée avec l’aide de Maude Bergeron-Lambert et de Sophie Di Tullio, est donc la première en son genre au territoire.
« En fait, je croyais que les résultats allaient être pires. Mondialement, Whitehorse est plutôt propre », précise John Postma. Les données d’autres recherches avec des méthodes d’échantillonnage similaires ont conclu que la zone urbaine de Paris avait en moyenne un taux de dépôt de 110 fibres par mètre carré, et que l’ouest des États-Unis, 132 fibres par mètre carré.
Sensibiliser la population
« On espère que la conception simple favorisera des collectes de données dans plus d’endroits, par des établissements d’enseignement et de la science citoyenne. On pourrait alors établir un portrait plus fidèle de la situation et une base de référence des flux de dépôts de microplastiques atmosphériques dans le monde », mentionne le chercheur dans son étude.
C’était d’ailleurs son ambition pour le territoire : « Le projet a été appelé avec optimisme “l’étude sur les microplastiques du Yukon”, car le plan était de déployer ces collecteurs dans diverses communautés. » Les restrictions de voyage dans les communautés pendant la pandémie ont rendu ce partage de conteneurs difficile; désormais, c’est le temps et l’argent qui manquent à John Postma.
Il espère tout de même que sa recherche sensibilisera les Yukonnaises et Yukonnais à leur consommation de plastique. « D’un point de vue citoyen, nous pouvons tous faire un meilleur travail pour réduire notre consommation de plastique », lance-t-il.
Selon le chercheur, il est également important de penser à la finalité de ces plastiques, pour qu’ils aboutissent dans des installations de recyclage ou à la décharge. « Il faut les empêcher de s’échapper dans l’environnement, parce qu’une fois qu’ils sont dans l’environnement, ils se dégradent et deviennent des microplastiques. »
Entre construction et pollution
Les alentours de Whistlebend sont un exemple parfait des risques de dégradation de plastiques. Depuis que le quartier a entamé des chantiers de construction importants, les bordures des forêts et de gazon sont, à certains endroits, couverts de déchets.
Questionné à ce sujet, le responsable des communications de la ville de Whitehorse affirme que des inspections ont lieu régulièrement sur les sites de construction. Oshea Jephson croit que les forts vents automnaux ont contribué à la situation actuelle à Whistlebend. « Dans le but de rappeler aux constructeurs leurs responsabilités, les inspecteurs continueront de visiter les chantiers de Whistlebend et d’informer les promoteurs de cette préoccupation communautaire », affirme ce dernier.
John Postma voit d’un bon œil l’interdiction des sacs de plastique à usage unique au territoire, mais demeure réaliste : le plastique n’est pas prêt de quitter nos vies. « Les plastiques ont apporté de la commodité à nos vies. C’est pourquoi il est si difficile de s’en débarrasser, car qui n’aime pas la commodité? »
IJL – Réseau.Presse – l’Aurore boréale
LECTURE SIMPLE
Les microplastiques
Les microplastiques sont de petits morceaux de plastique qui peuvent se retrouver dans l’eau, dans l’air et même dans la terre. Ils sont plus petits que 5 millimètres (la longueur d’une fourmi!) et sont composés de plusieurs types de plastique.
Pourquoi est-ce un sujet important?
Parce qu’ils se retrouvent plus souvent dans l’environnement, en raison des habitudes de consommation de la population. En gros, on consomme plus de plastique que jamais dans l’histoire de l’humanité.
Quand le plastique se dégrade, il peut avoir des conséquences sur les milieux marins et les animaux. Plus encore : on détecte maintenant des microplastiques dans la nourriture… et dans l’eau qu’on boit!
D’où sortent-ils?
Le plus souvent, les microplastiques proviennent des vêtements (l’industrie du textile) et de l’usure des pneus d’automobiles.
Que peut-on faire?
Selon le chercheur John Postma, le mieux, c’est de prendre conscience de notre consommation de plastique et essayer de la diminuer. Si on utilise des produits en plastique, on doit s’assurer de les recycler ou de les envoyer à des endroits où ils seront traités, pour éviterqu’ils se retrouvent dans l’océan ou dans les forêts.