le Mardi 17 septembre 2024
le Jeudi 16 septembre 2021 5:37 Société

Little Footprints, Big Steps : le documentaire bientôt disponible

La situation est encore critique depuis le passage du tremblement de terre le 14 août dernier au sud-ouest d’Haïti. Selon l’UNICEF, près de 14 000 personnes ont dû être déplacées. Photo fournie.
La situation est encore critique depuis le passage du tremblement de terre le 14 août dernier au sud-ouest d’Haïti. Selon l’UNICEF, près de 14 000 personnes ont dû être déplacées. Photo fournie.

Près de dix ans après que les premières images aient été tournées, le documentaire Not About Me, qui aborde la réalité des orphelinats haïtiens, sera officiellement disponible sur Nortwestel le 20 novembre prochain, à l’occasion de la Journée mondiale de l’enfance. Il sera accompagné de guides informatifs pour conscientiser les gens à la réalité de l’engagement international.

La situation est encore critique depuis le passage du tremblement de terre le 14 août dernier au sud-ouest d’Haïti. Selon l’UNICEF, près de 14 000 personnes ont dû être déplacées. Photo fournie.

 

 

« Pas à propos de moi. » Pour Morgan Wienberg, directrice de Little Footprints, Big Steps (LFBS), il était important que le documentaire aille au-delà d’un portrait de son engagement. Elle a tenu depuis le début à ce qu’il constitue un réel levier de conscientisation. Morgan Wienberg a grandi à Whitehorse et a fait d’Haïti son pays d’adoption en 2010, après avoir réalisé un stage de coopération dans un orphelinat. « C’est les Yukonnais.e.s qui avaient financé mon voyage grâce à mon travail à Alpine Bakery! », se souvient-elle.

Son rêve de dévouement et de coopération s’était rapidement assombri une fois sur place. La bande-annonce du film nous met d’ailleurs immédiatement la puce à l’oreille : « Je raconte mon histoire, comment je suis arrivée à Haïti en tant que bénévole. Je veux que les personnes réalisent l’impact qu’elles peuvent avoir dans la vie des gens, mais je ne veux pas qu’elles fassent ce que j’ai fait », affirme-t-elle.

En effet, une fois sur les lieux, elle a rapidement compris que le système des orphelinats dans lequel elle souhaitait s’investir avait plutôt des conséquences néfastes pour les enfants, qui se retrouvaient éloigné.e.s de leur famille et vivaient dans des conditions de vie inhumaines. Pire, ce système contribuait à nourrir une industrie « dans laquelle les enfants sont traité.e.s comme des attractions touristiques et, dans certains cas, victimes de trafic humain et d’exploitation », expose le site Internet de LFBS.

C’est pour remédier à cette situation qu’elle a fondé LFBS en 2011, afin de réunir les familles et de les garder ensemble.

Un outil de sensibilisation

Plus qu’un simple portrait, le documentaire se veut un outil de sensibilisation contre les méfaits du volontourisme, contraction entre les mots volontariat et tourisme. Cette forme d’engagement communautaire n’a pas toujours les impacts escomptés, explique Morgan Wienberg. C’est pourquoi le documentaire est accompagné d’un guide de discussion et d’un autre conçu spécialement pour les écoles : pour éviter que les bénévoles ne causent plus de tort que de bien. Ces guides devraient être finalisés d’ici janvier, en français et en anglais.

« Une grande partie du travail, c’est de s’assurer que le documentaire aura un impact, ajoute Kelly Milner, la réalisatrice du film et directrice de Shot In the Dark, une compagnie de production vidéo basée à Whitehorse. Ça a été une longue épopée, mais je sens que c’est seulement le début maintenant. J’ai très hâte de voir les gens s’interroger sur la façon d’apporter leur soutien. » Le projet est passé dans les mains de plusieurs producteurs avant d’aboutir dans celles de Kelly Milner, en 2018.

Les catastrophes comme catalyseur

Le séisme du 14 août dernier qui a dévasté le sud-ouest de d’Haïti a ravivé de vieilles blessures et fait craindre le pire à Morgan Wienberg : est-ce que la communauté internationale répétera les mêmes erreurs qu’après le tremblement de terre de 2010?

Ses craintes sont bien fondées : lorsque Port-au-Prince a été secoué de plein fouet en 2010, les dons provenant de l’international n’ont pas toujours atterri entre de bonnes mains, et ont fait bondir le nombre d’orphelinats d’au moins 150 %. Après une large enquête menée de 2017 à 2018, les services sociaux, LFBS et d’autres partenaires ont conclu que 95 % de ces institutions ne répondaient pas aux normes minimales de protection de l’enfance.

« Avec toute situation d’urgence, il y a un risque accru, explique Morgan Wienberg, et les personnes bien intentionnées n’arrivent pas toujours à transposer leur désir d’aider en une aide concrète.Il y a des besoins, et nous voulons que les personnes s’engagent. Mais tout est dans la façon d’aider », rappelle Morgan Wienberg.

Le bilan continue de s’alourdir après le passage du séisme : à l’heure actuelle, plus de 2 200 personnes sont décédées et plus de 12 000 autres sont grièvement blessées. Ceux et celles qui souhaitent apporter de l’aide aux organisations peuvent effectuer des dons à des organismes déjà sur place qui possèdent une connaissance accrue des besoins. Sur ce point, Morgan Wienberg voit des avancées positives : « Les gens font plus l’effort d’aller vers des organisations locales au lieu des grandes organisations non gouvernementales. Ça peut devenir rapidement chaotique quand on n’a pas de connexion ici. »

Année difficile pour la perle des Antilles

La population haïtienne n’a pas été épargnée depuis quelques mois. Une montée des violences dans la capitale de Port-au-Prince avait déjà commencé à ébranler les citoyen.ne.s, quelques mois avant l’assassinat du président Jovenel Moïse par un commando armé, le 7 juillet dernier. « Puis, il y a eu le tremblement de terre, et deux jours après, une tempête tropicale », lâche Morgan Wienberg, en soupirant. La population doit composer avec un chômage endémique, une forte inflation et une instabilité politique qui constitue désormais presque la norme pour ce pays de quelque 11 millions d’habitant.e.s.