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le Mercredi 13 janvier 2021 23:11 Société

Les bonnes nouvelles ne font pas les nouvelles

« La faible proportion de personnes racialisées dans les médias canadiens affecte la diversité des discours et des perspectives et n’offre pas une représentation juste de la réalité », écrit notre chroniqueuse Paige Galette. Photo ;  Christina @ Wochintechchat.com – Unsplash
« La faible proportion de personnes racialisées dans les médias canadiens affecte la diversité des discours et des perspectives et n’offre pas une représentation juste de la réalité », écrit notre chroniqueuse Paige Galette. Photo ; Christina @ Wochintechchat.com – Unsplash

, Francopresse

L’année 2020 a laissé un goût amer à plusieurs d’entre nous. Comme chaque début d’année, notre premier réflexe peut être de rejeter le négatif de l’année précédente pour entamer la nouvelle. Mais avant d’attaquer 2021 de front, penchons-nous sur quelques moments marquants de l’histoire canadienne qui sont passés sous le radar et qui méritent réflexion : je parle ici de représentation de personnes et de femmes noires dans les médias.

« La faible proportion de personnes racialisées dans les médias canadiens affecte la diversité des discours et des perspectives et n’offre pas une représentation juste de la réalité », écrit notre chroniqueuse Paige Galette. Photo ; Christina @ Wochintechchat.com – Unsplash

L’automne dernier, deux journalistes noires ont brisé le plafond de verre et on doit s’en réjouir.

Tout d’abord, à la fin octobre, la CBC annonçait la nomination de la journaliste afro-latino-musulmane Ginella Massa à titre d’animatrice d’une nouvelle émission et correspondante pour The National.

En 2015, elle est devenue la première journaliste canadienne à porter le hijab à la télévision ; puis, l’année suivante, la première cheffe d’antenne canadienne à porter le hijab à la télévision. Sa nomination à la CBC a suscité beaucoup d’applaudissements, mais elle a peu fait les manchettes.

En novembre 2020, CTV Montréal annonçait pour sa part la nomination de Maya Johnson à titre de cheffe d’antenne des téléjournaux de début et de fin de soirée à compter de mars 2021. Elle devient ainsi la première femme noire à occuper ce poste auprès du réseau.

Actuellement cheffe du bureau de Québec, Maya Johnson a gravi les échelons auprès du diffuseur depuis l’âge de 21 ans, lorsqu’elle est devenue la plus jeune journaliste de la salle de rédaction. Malheureusement, sa nomination est passée inaperçue alors que les élections américaines et le décès d’Alex Trebek retenaient notre attention.

Un travail immense à faire

Dans un article publié en juin dernier, la journaliste indépendante de Calgary Hadeel Abdel-Nabi rappelle que les salles de rédaction canadiennes sont encore majoritairement blanches. La faible proportion de personnes racialisées dans les médias canadiens affecte la diversité des discours et des perspectives et n’offre pas une représentation juste de la réalité.

La diversité culturelle et de genres dans les salles de rédaction amène une diversité dans les perspectives de couverture des sujets. Le fait que l’on soit représenté dans les salles de rédaction apporte un autre aspect à la présentation des faits, soit culturel ou représentatif.

Le narratif, lorsqu’il ne nous inclut pas souvent, prend un penchant plutôt négatif où il laisse le public croire aux préjugés déjà véhiculés en société. Si nous sommes plutôt représentés et en charge de produire l’information, nous sommes en mesure de faire ressortir les histoires sous un angle plus positif plutôt que de présenter uniquement les cas exceptionnels et négatifs.

Quand je vois des journalistes de la diversité à l’écran ou dans les journaux, j’ai envie de lire les textes et de regarder les reportages parce que je sais qu’il y aura eu une réflexion sur le sujet qui est plus proche de ma réalité.

Être la première dans son domaine d’expertise, comme les deux journalistes susmentionnées, n’est pas chose facile. Il est important de célébrer la représentation, mais celle-ci devrait s’accompagner d’un engagement à agir contre la discrimination raciale et le racisme systémique.

Enfin, en tant que publics, nous ne pouvons plus nous contenter de déclarations d’excuses ou de solidarité. Il faut que nos médias rattrapent leur retard et fassent mieux.

Je salue les Ginella Massa et les Maya Johnson, qui sont les premières dans leur domaine à pousser les barrières pour que d’autres puissent prendre les devants et entrer dans un monde qui, espérons-le, ne sera pas aussi discriminatoire qu’aujourd’hui. Leur travail va au-delà de ce que nous pouvons voir sur nos écrans. Leur travail crée un changement organisationnel, qui est en soi, une forme de justice sociale.