Denis Lord (L’Aquilon)
Une organisation transnationale de jeunesse autochtone arctique est fondée à Rovaniemi.
Contrôle des pêcheries, des affaires et du tourisme, dénonciation du colonialisme comme vecteur de la disparition et de l’assassinat des femmes autochtones; les jeunes leaders de l’Arctique y ont été d’une déclaration incisive pour le premier sommet de leur histoire, qui avait lieu en Finlande, à Rovaniemi, les 12 et 13 novembre derniers.
L’évènement avait lieu en marge du 6e Sommet des leaders de l’Arctique, qui réunit les six organisations autochtones qui ont le statut de participants permanents au Conseil de l’Arctique. En tout, 27 jeunes appartenant à ces organisations, hormis le Conseil athabascan de l’Arctique, y ont participé.
« Nous nous sommes entendus pour établir un Conseil de la jeunesse autochtone de l’Arctique », explique la présidente du Conseil national des jeunes Inuits, Crystal Martin-Lapenskie, qui devrait elle-même siéger à ce Conseil.
« Nous souhaitons avoir un sommet chaque année », dit-elle, soulignant la nécessité d’inclure la jeunesse autochtone dans les prises de décision sur l’Arctique. « Parce que ça nous touche aujourd’hui et ça continuera de nous toucher demain. »
À Rovaniemi, les jeunes leaders ont lu leur déclaration à leurs aînés.
« C’était un moment vraiment historique, s’émeut Crystal Martin-Lapenskie. Et chacun d’eux a reconnu l’importance de travailler avec les jeunes leaders de l’Arctique pour aller de l’avant. Ils ont dit qu’ils arrivent à une époque où ils devront se retirer et que ce sera aux jeunes de prendre la relève. »
Une déclaration autonomiste
La naissance de la nouvelle organisation se fait avec une déclaration très forte en faveur de la souveraineté autochtone sur nombre d’aspects.
Reconnaissant que l’intérêt grandissant pour le Nord provoquera une augmentation du tourisme, les auteurs de la déclaration exigent le droit de décider de qui voyagera dans leurs territoires traditionnels et à quelles activités ils participeront.
Dans le secteur du développement économique et des infrastructures, ils demandent le contrôle des pêcheries, arguant être les mieux placés pour adapter et gérer les ressources à l’heure de l’augmentation des températures et de la migration des poissons.
Ils demandent en outre plus de contrôle sur les hardes de caribous et sur le développement des affaires sur leurs terres.
Les auteurs demandent que les langues autochtones deviennent des langues officielles dans les pays où ils habitent et qu’elles aient la même valeur que les autres langues officielles.
« Nous reconnaissons, est-il écrit dans la déclaration, que l’épidémie d’assassinats et de disparitions de femmes et de personnes non binaires en Arctique est directement liée à la colonisation continue et au viol de nos terres et de nos eaux par les industries pétrolières et minières et par le colonialisme vert. La libération de nos corps et celle de nos terres sont inséparables. »
L’inclusion
« C’est tellement important dans nos communautés, avoir cette possibilité d’être inclus », observe Mme Martin-Laspenskie à propos de cette déclaration qu’elle dit longuement travaillée. Nous avons aussi mis beaucoup l’accent sur la sécurité alimentaire et la santé mentale. Il y a tellement de priorités que nous avons identifiées que nous sentons que nous devons continuer d’être inclus dans ces discussions. »
Gail Wallace est une Inuite de Rankin Inlet vivant à Winnipeg. Elle est l’une des deux personnes déléguées à Rovaniemi par le Réseau de la jeunesse arctique, un organisme axé sur la coopération internationale et le renforcement des capacités.
« Pour rédiger la déclaration, signale-t-elle, nous sommes rentrés dans une pièce où personne ne se connaissait, mais, à la fin de la journée, nous étions une famille. La déclaration est l’emblème de notre travail et de notre dévouement à créer un meilleur avenir pour notre peuple et notre terre. »
Gail Wallace espère rester en contact avec les gens qu’elle a rencontrés au sommet et travailler avec eux pour que leur déclaration devienne une réalité.
Les organisations autochtones qui participent en permanence au Conseil de l’Arctique sont : l’Association internationale aléoutienne, le Conseil athabascan de l’Arctique, le Conseil circumpolaire inuit, le Conseil gwich’in international, l’Association russe des peuples autochtones du Nord et le Conseil des Samis.