Lucien Chaput (Francopresse)
Un bureau national à Ottawa sans employé permanent sur place. Une deuxième année sans financement de projets. Un site web abandonné. La Commission nationale des parents francophones (CNPF) est en état critique. Doit-on parler réanimation ou extrême-onction?
« On est en mode survie, concède Ghislaine Pilon, directrice général par intérim à demi temps. Nous avons eu le renouvellement des fonds de programmation de Patrimoine de 212 000 $ pour 2014-2015. Mais aucun projet n’est envisagé malgré que nous soyons toujours à la recherche de financement pour un scan environnemental menant aux demandes de l’année prochaine. »
Un autre projet sans financement est la recherche intitulée Là où le nombre le justifie. À chaque recensement depuis 1986, la CNPF effectue des analyses pour estimer le nombre d’enfants d’ayants droit, leur langue d’usage et leur connaissance du français.
« Nous sommes rendus à notre sixième étude, souligne celle qui a présidé l’organisme de 2002 à 2012. C’est Patrimoine qui finançait. Mais il ne semble pas avoir de sous pour cette recherche. »
Directeur général de l’Association des parents fransaskois pendant 19 ans et employé de la CNPF pendant deux ans avant de devenir directeur du Réseau Santé en français de la Saskatchewan, Roger Gauthier se dit inquiet de la situation.
« La CNPF a joué pendant 25 ans un rôle important pour la défense des droits des francophones en matière d’éducation, le développement des services à la petite enfance et, plus récemment, dans la question de l’accueil et l’accompagnement des parents.
« Ce rôle-là qui revient aux parents en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés est toujours aussi pertinent. La Saskatchewan vient de passer à travers une énorme crise scolaire. C’est l’engagement des parents qui a mené à sa résolution et à des discussions entre le ministère et le conseil scolaire. »
Son de cloche semblable au Nouveau-Brunswick. Gilles Vienneau est directeur général de la Société Santé et Mieux-être en français du Nouveau-Brunswick. De 1992 à 1994, il a œuvré comme directeur de recherche et de formation à la CNPF.
« Ici au Nouveau-Brunswick, on a une loi sur l’éducation qui ne respecte pas l’article 23 de la Charte. À qui revient la responsabilité de dire qu’on a un problème de gouvernance par rapport à l’article 23 ? Certainement pas le ministère de l’Éducation, parce que c’est lui qui a créé le problème. Et il n’y a pas d’autre groupe présentement qui a ce mandat. Il n’y a plus de chien de garde. »
L’AGA de la CNPF aura lieu à Toronto du 7 au 9 novembre, en « classe économie ». Explication de Ghislaine Pilon : « Avec les billets d’avion, les chambres d’hôtel, les repas, ça nous prendrait de 30 à 40 000 $ pour faire venir tout le monde. Les membres du CA seront là parce qu’ils reçoivent une formation. Il n’y aura pas de directions générales. »
Le thème de l’AGA est Avant tout… PARENT après tout! « On se fait dire que, maintenant qu’on a des conseils scolaires, ils vont s’en occuper des besoins des parents, rapporte la résidente de Mississauga (ON). Je ne suis pas tout à fait d’accord. Après tout, c’est encore le parent le premier responsable, le premier éducateur, le premier soignant et gardien.
« En matière de service de garde, c’est encore le parent qui va décider de la langue, le français ou l’anglais. S’il n’est pas bien outillé, il risque de ne pas faire le bon choix. S’il ne sait même pas qu’il a des choix, on fait de nos enfants des anglophones. »
Il est temps que la CNPF revoit son mandat, évalue Roger Gauthier. « Il y a une réflexion importante à faire de l’ensemble du mouvement au pays. Si le mouvement qui vient de la base se dissout, il n’y a plus de raison d’être.
« Même au niveau de la gestion, les parents ont un mot à dire sur la direction que doivent prendre les conseils scolaires en matière des services éducatifs et sur la question du développement identitaire. Il n’y a pas d’autre regroupement qui soit en mesure de se substituer à cette énorme responsabilité qui appartient aux parents. »