Jean Chalifour
Le samedi 1er février aura lieu le départ de la 31e édition de la Yukon Quest. Vingt musheurs et leur attelage de quatorze chiens partiront de Fairbanks, Alaska, en direction de Whitehorse, sur un parcours exigeant de 1 600 kilomètres.
Normand Casavant participera à la course pour la 4e fois depuis 2009. Il l’a toujours complétée et, cette année, pour lui et sa conjointe Karine Grenier, l’objectif est de finir parmi les cinq premiers avec des chiens heureux. Selon Karine, le travail, l’énergie et l’investissement requis pour participer à la course sont énormes et, à moins de maladie, l’option de ne pas la terminer est inacceptable.
Dans un café de Whitehorse en compagnie d’Anaïs, fraîchement arrivée au Yukon, Karine raconte avec passion son rôle et celui de l’équipe CasAventures dans la Yukon Quest.
Le début de l’aventure yukonnaise
Avant de venir au Yukon, Karine, originaire de la Mauricie, exploite avec Normand une entreprise touristique de traîneau à chiens dans les Laurentides au nord de Montréal. Désireux de participer à la Yukon Quest en 2009 et de compétitionner avec les meilleurs musheurs, Karine et Normand partent vers l’ouest en 2008 en compagnie de quelque 35 alaskans.
La préparation de la Yukon Quest
Installés à Tagish, Karine et Normand, tout en travaillant à l’extérieur, s’occupent d’une quarantaine de chiens avec l’aide de quatre valets de chenil (handlers) qu’ils ont formés. Ils se partagent les tâches, notamment l’entretien du chenil, le soin des chiens (nourriture, massage, etc.) et les activités liées à leur entraînement.
Les chiens s’entraînent pratiquement toute l’année, Karine s’occupant surtout des plus jeunes, alors que Normand entraîne ceux qui sont en âge de participer à la Yukon Quest. La stratégie d’entraînement est en grande partie secrète de façon à ce que les autres musheurs ne la connaissent pas. Ainsi, pas question de divulguer de l’information détaillée sur les programmes d’entraînement, la durée, les distances parcourues et les trajets empruntés lors des sorties.
Karine mentionne que les programmes d’entraînement ont pour objectif de développer la relation de confiance des chiens entre eux et avec le musheur, ainsi que leurs capacités athlétiques comme leur musculature, leur souplesse et leur endurance. Ainsi, à l’été, beaucoup de course libre avant la venue des entraînements plus structurés où les chiens sont attelés à l’automne.
Enfin la Yukon Quest
Le grand jour approche. Les derniers entraînements des chiens de la Yukon Quest sont complétés. Normand, les chiens sélectionnés pour la course et deux de ses valets de chenil, Bill et Ray, partent pour Fairbanks. Pendant ce temps, à Tagish, Karine, assistée d’Anaïs et d’Audren, assume la responsabilité de s’occuper des chiens et de poursuivre l’entraînement des futurs prétendants à une participation à la Yukon Quest.
Pendant la course, au point de contrôle de Dawson, les musheurs et leurs attelages doivent faire une pause obligatoire de 36 heures. C’est là que Karine fera son entrée dans la course et jouera le rôle de coordonnatrice des valets de chenil Bill et Ray qui auront à s’occuper des chiens pendant la pause. Ainsi, elle veillera à les superviser de façon à ce qu’ils exécutent bien et au bon moment les tâches à accomplir pour établir le campement, nourrir et abreuver les chiens, veiller à leur confort, les soigner et les masser au besoin.
Aux autres points de contrôle entre Dawson et Whitehorse, Karine jouera un rôle d’observatrice et d’analyste, sans s’occuper des chiens comme le stipule le règlement de la Yukon Quest, ce rôle étant strictement réservé au musheur. Elle notera le temps qui sépare l’attelage de Normand de celui des musheurs qui le poursuivent et le précèdent de près. Elle analysera leur état de fatigue et celui de leurs chiens en essayant notamment de soutirer subtilement quelques renseignements à leurs valets de chenil. Elle dressera le portrait de la situation à Normand afin qu’il adapte sa stratégie de course au besoin, par exemple en raccourcissant ou en prolongeant le temps prévu d’une pause à un point de contrôle.
L’expérience et la connaissance des chiens participant à la Yukon Quest que partagent Karine et Normand les aident à juger de leur état de fatigue, à identifier la présence de douleurs, à décider du retrait d’un chien de la course ou à identifier les soins que Normand devra leur donner pour les rendre heureux et motivés. Pour Karine, la qualité première d’un grand musheur est celle d’être capable de pressentir les problèmes des chiens avant qu’ils ne surviennent.
Les projets de Karine
Karine participe déjà à des courses de traîneau à chiens comme musheur et elle désire continuer à le faire, surtout sur de courtes distances, celles qu’elles préfèrent.
Elle a aussi d’autres projets, comme celui d’éduquer les gens sur la réalité du traîneau à chiens en constante évolution, tant sur les plans des équipements et de la technologie que de la génétique des chiens. Dans les écoles, le projet est déjà commencé sous forme d’ateliers éducatifs qui visent à parler aux élèves de traîneau à chiens et de la Yukon Quest dans le cadre de programmes scolaires sur diverses thématiques telles les mathématiques, l’histoire du Yukon, la biologie, etc.
Un autre projet qui lui tient à cœur est la formation de gens intéressés à démarrer une entreprise de traîneau à chiens ou à devenir musheur.
Karine a bien d’autres passions, en particulier l’archéologie. Au Yukon, à titre d’aide-technicienne en fouille archéologique, elle a déjà trouvé une partie de microlame et plusieurs éclats de roche, dont une obsidienne, les pièces datant de 2 000 à 8 000 ans. Dans le jargon de l’archéologue, le terme éclat désigne un fragment de roche détaché intentionnellement d’un bloc par percussion ou par pression, donc par l’homme. Karine a l’intention de continuer à faire de belles trouvailles…