Un bref coup d’œil à l’extérieur suffit pour constater l’impressionnante quantité de neige qui n’a cessé de s’accumuler depuis novembre dernier. À l’aube d’un printemps que certain.es souhaiteraient hâtif, une inquiétude subsiste : les inondations. Quelles sont les étendues d’eau plus à risque et comment se préparer adéquatement?
Au grand bonheur des amateurs et amatrices de plein air qui ont profité des précipitations pour dévaler les pentes de ski et au grand dam des personnes qui tiennent la corvée de pelletage en aversion, cet hiver a amené un lot important de neige. De novembre à février, plus de 1m30 de neige a été enregistré à Whitehorse, notamment.
« En regardant la quantité de neige dans la région de Whitehorse, et du fait que nous avons un certain retard sur la fonte printanière, c’est sûr qu’on a actuellement le double de la moyenne historique », affirme Benoît Turcotte, professionnel des recherches senior au Centre de recherche de l’Université du Yukon. Les chiffres compilés dans le Bulletin des relevés nivométriques et des prévisions du gouvernement du Yukon démontrent qu’il y a eu 60 % plus de précipitations que la normale à Whitehorse entre octobre 2020 et février 2021.
Pour le chercheur, il ne fait donc aucun doute qu’il y aura des débordements ce printemps ou cet été, probablement dans les plus petits cours d’eau, et possiblement des inondations dans les lacs du Sud.
En soi, « une inondation est lorsque l’eau déborde d’un cours d’eau ou d’un lac ; la définition commune correspond non seulement à de l’eau sur la plaine inondable, mais également lorsque cette eau commence à affecter des personnes et des infrastructures, à causer des dommages et à engendrer des coûts pour la société », explique Benoît Turcotte.
Les débordements sont souvent causés par l’accumulation de blocs de glace qui forment un obstacle à l’écoulement de l’eau, soit un embâcle, ou bien simplement par une augmentation significative du ruissellement au-delà de la capacité d’évacuation d’une rivière, communément appelée une inondation en eau libre.
Année d’extrême
Plusieurs facteurs influent sur la fréquence ou la force des inondations. Pour le doctorant en génie civil et génie des eaux de l’Université Laval, il est clair que cette année record s’inscrit dans une tendance plus lourde, soit celle des extrêmes. Le constat? « L’effet des changements climatiques. C’est plus chaud et [il y a] plus de précipitations », avec une plus grande fréquence de records et d’extrêmes.
Si ces extrêmes ont moins d’impact sur les grandes rivières, puisque la dimension de leur bassin les rend moins assujetties aux événements météorologiques isolés, ce n’est pas le cas des petits bassins, comme la rivière Klondike ou la rivière Nordenskiold à Carmacks. Benoît Turcotte s’intéresse particulièrement aux communautés d’Old Crow et de Dawson dans le cadre de ses études, où un certain risque d’embâcle plane chaque printemps. Pour ce qui est du fleuve Yukon au centre-ville de Whitehorse, l’ingénieur croit qu’il ne représente pas une menace importante pour ce printemps ou cet été. L’accumulation de neige, cependant, semble inquiétante.
Préparer le territoire
« Dans tous les cas, une fonte avec un temps nuageux, sans pluie, serait idéale, mais on en demande beaucoup à la nature », affirme le chercheur. Ce dernier travaille à développer de meilleurs outils de prévention et de prévision des inondations qui pourront ensuite être employés par les services communautaires. Selon lui, « juste le fait de pouvoir prévoir une inondation, ça facilite le travail de l’Organisme des interventions d’urgence du Yukon et des services communautaires. Ils peuvent faire une évacuation préventive par exemple. Ça va réduire le coût des inondations, c’est certain. »
Il rappelle l’importance d’inspecter les digues et les barrages en remblai pour s’assurer que rien ne nuit à l’évacuation de l’eau. Au municipal, « il devrait y avoir des équipes déployées pour s’assurer que tout le système pluvial est capable d’évacuer le plus de neige fondue possible », ajoute-t-il. La Ville de Whitehorse s’affaire d’ailleurs à déplacer la neige accumulée en ville afin de limiter les risques d’inondations dans les rues de la capitale. Elle a également incité les personnes résidentes à prendre des mesures pour s’assurer que leurs propriétés soient protégées contre les inondations dues à la fonte des neiges.
Préparer sa maison
Selon le communiqué de la Ville, il est essentiel de prendre des mesures préventives : enlever la neige pour éloigner l’eau de fonte des fondations et des puits des fenêtres des maisons est une première étape.
Pour prévenir les inondations résidentielles, une certaine préparation devient nécessaire « Ce que je conseille aux gens, c’est de se rappeler la direction de la pente de leur terrain et d’essayer d’éviter le plus possible d’avoir des accumulations de neige proche de la maison. » Aussi, il faut porter une attention particulière au gel pendant la nuit, qui risque de bloquer les gouttières et les drains, ce qui nuit au système d’évacuation d’eau.
« Envisagez de faire appel à un professionnel pour déneiger votre toit ou pour transporter la neige loin de votre propriété vers une zone de déneigement autorisée, suggère également la Ville de Whitehorse. De plus, ne placez pas de neige contre les bornes d’incendie, les boîtes utilitaires et la signalisation routière. Il est important que la neige ne s’empile pas sur les égouts pluviaux, car cela peut empêcher le drainage », indique le communiqué. Selon l’expert, les sacs de sable ne représentent pour leur part qu’une solution de dernier recours.
Pour plus de conseils, le site Prévention Inondation, du gouvernement du Canada, dispose d’une section « trousse à outils ». La Ville de Whitehorse quant à elle suggère, en cas de problèmes de drainage sur la propriété de la capitale, d’appeler Eau et déchets au 668-8350 pour les problèmes urgents liés aux égouts pluviaux gelés, et Opérations au 668-8345 pour les problèmes urgents liés à un fossé bloqué ou à un cours de drainage pouvant affecter la propriété privée. Enfin, d’autres ressources sont également disponibles sur le site Web du Yukon.
Seul le temps nous dira si les inondations de cette saison auront des effets dévastateurs sur les infrastructures ou pour les foyers. « On croise nos doigts pour que ce ne soit pas le cas, mais une bonne frousse aide à apprendre pour mieux se préparer dans le futur », conclut Benoît Turcotte.
Lecture débutante
Se baigner dans des rivières ou des lacs, c’est toujours amusant. Ce qui est moins amusant, c’est quand ces rivières ou ces lacs débordent, et causent des inondations.
C’est quoi, une inondation?
Une inondation, c’est quand l’eau déborde d’un cours d’eau ou d’un lac. Et beaucoup plus que quelques gouttes! Ça peut être dangereux, parce que ça peut inonder des maisons et des sous-sols, et causer des dommages aux bâtiments.
Pourquoi est-ce qu’il y a plus d’inondations au printemps?
Tu as surement remarqué qu’il y a eu beaucoup de neige cette année, au Yukon. Le problème, c’est que quand la température se réchauffe, la neige fond en peu de temps. La neige se transforme en eau et le niveau des eaux augmente.
D’après des experts, à cause des changements climatiques, il y a plus souvent de la pluie ou de la neige au Yukon. Ces changements ont des conséquences sur les plus petits bassins d’eau et rendent la prévision des inondations plus difficile.
Prédire les inondations, ça t’intéresse?
Il y a des gens qui travaillent à développer toutes sortes d’outils pour essayer de prédire les inondations. Comme Benoît Turcotte, qui est un expert en la matière au Yukon. Son métier s’appelle ingénieur. Il existe plusieurs sortes d’ingénieur.es, comme ingénieur.e des eaux, par exemple.
Pour faire ce métier, il faut être ingénieux.se et toujours vouloir améliorer les choses, en créant des outils ou en faisant des recherches. Si ce métier t’intéresse, tu peux en parler à tes parents ou à ton enseignant.e. Il y a des études spéciales pour ça et c’est très intéressant.