Les tensions générées par les mesures de distanciation physique entraînent une augmentation des violences domestiques à travers tout le pays. Au Yukon, les centres d’hébergement pour femmes craignent le pire.
Les mesures de distanciation physique mises en place par le gouvernement fédéral ont été essentielles dans la lutte contre la pandémie de la COVID-19. Mais la fermeture des écoles et des entreprises, l’isolement et la précarité ont également généré certaines tensions au sein des familles. Ces tensions peuvent déclencher ou aggraver des situations de violence. Une enquête de Statistique Canada sur les répercussions de la COVID-19 montre d’ailleurs qu’une femme sur dix ressent beaucoup ou énormément d’inquiétude à propos de la possibilité de violence familiale.
« Les victimes se retrouvent coincées avec leur agresseur dans un climat hautement anxiogène », note Ketsia Houde-Mclennan, responsable de la maison d’accueil pour femmes Kaushee’s Place à Whitehorse. « En temps normal, elles peuvent sortir pour demander de l’aide, ou profiter de l’absence de leur conjoint pour s’enfuir. Ici, elles sont prises au piège. »
Paradoxalement, le centre a observé une baisse importante des demandes d’hébergement durant le mois d’avril. « Les femmes suivent les directives du gouvernement et restent chez elles », explique la responsable. « Mais ce n’est pas une bonne solution. Il ne faut jamais rester dans un environnement dangereux. » Elle redoute le pire pour les prochains mois.
Au Centre Victoria Faulkner également, on craint un rebond. « Dans les provinces voisines, après une première phase plus calme, les demandes ont littéralement explosé », souligne Tracey White, défenseure des droits des femmes. « Après une crise majeure, c’est lorsque les choses commencent à revenir à la normale que le personnel en première ligne se trouve tout à coup submergé. »
Interdire la vente d’alcool
Afin de réduire la violence familiale durant la période de confinement, la vente d’alcool a été interdite dans la capitale du Groenland, Nuuk, à la fin du mois de mars. Une solution qui ne convainc guère Ketsia Houde-Mclennan : « Cela risque d’entraîner d’autres problèmes. Les personnes alcooliques ne peuvent pas arrêter du jour au lendemain sans accompagnement médical. Elles vont tomber malades et nécessiter des soins. »
« Les violences domestiques ne sont pas vraiment liées à l’alcool », ajoute Tracey White. « Il s’agit d’une prise de pouvoir et de contrôle sur sa victime. Interdire l’alcool ne résoudra pas le problème. »
Les deux expertes insistent sur l’importance de demander de l’aide en cas de danger. « Les services sont ouverts, autant les nôtres que ceux de la police et de l’hôpital », souligne Ketsia Houde-Mclennan. « Des mesures spécifiques ont été mises en place pour limiter la propagation du virus dans nos maisons d’hébergement. Il ne faut pas hésiter une seconde à venir. »
Les victimes de violences domestiques peuvent appeler en tout temps la ligne de crise au 867 668-5733. Des services en français sont disponibles sur demande. La nouvelle équipe d’intervention en cas d’agression sexuelle peut quant à elle être jointe au 1 844 967-7275.
Initiative de journalisme local APF – Territoires