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L’enseignement du français au Yukon : une passion inépuisable

 Mme Sandra Henderson continue d’entretenir une vive passion pour l’enseignement de la langue française au Yukon. Photo : Marie-Hélène Comeau
Mme Sandra Henderson continue d’entretenir une vive passion pour l’enseignement de la langue française au Yukon. Photo : Marie-Hélène Comeau

Après avoir enseigné au programme d’immersion de l’école secondaire F.H.-Collins, Mme Henderson prend sa retraite en 2007. Depuis, son horaire reste très chargé. Portrait d’une ancienne enseignante qui a gardé le français à cœur.

Mme Sandra Henderson continue d’entretenir une vive passion pour l’enseignement de la langue française au Yukon. Photo : Marie-Hélène Comeau

Le regard allumé, le sourire invitant et surtout, un calendrier bien rempli; décidément, la définition de la retraite prend une tout autre signification lorsqu’on s’appelle Sandra Journeaux-Henderson. Cette septuagénaire franco-yukonnaise garde toujours l’enseignement du français à cœur et ça la tient très occupée.

Première enseignante d’immersion précoce au Yukon

Le travail de Mme Henderson au territoire est intimement lié à celui de l’histoire de l’enseignement du français au Yukon. Arrivée en 1981 avec son conjoint et ses enfants, cette Gaspésienne d’origine devient alors la première enseignante d’immersion précoce au Yukon entre les murs de l’école Whitehorse Elementary.

« C’était la classe numéro 110; je me souviens bien », confie-t-elle. « Aujourd’hui, mes anciens élèves de cette première classe sont devenus des adultes qui ont eu à leur tour des enfants. Je les croise toujours et certains viennent encore me rendre visite. On a gardé de bonnes relations », raconte avec bonheur Mme Henderson.

Durant cette première année en sol yukonnais, elle remarque la présence de nombreux francophones qui se sont assimilés à la langue anglaise. Cette observation la stimule alors, pendant ses vacances d’été, à consulter le bottin de téléphone du Yukon afin de pouvoir identifier les gens ayant un nom à consonance francophone. Une fois cette identification complétée, elle a contacté chaque personne de sa liste afin de sonder leur intérêt à inscrire leur enfant à une éventuelle école francophone au Yukon. Ce premier tour de piste a permis à 65 parents de répondre positivement à l’appel. C’est ainsi qu’est né le programme-cadre en français qui est devenu par la suite l’école Émilie-Tremblay.

Cette Franco-Yukonnaise dotée d’une détermination à en faire pâlir plus d’un est également à l’origine d’autres projets comme celui des premiers camps d’été francophones qu’elle a mis sur pied dès sa première année d’enseignement au Yukon. C’était à l’époque où Yann Herry, aujourd’hui coordonnateur des programmes en français du ministère de l’Éducation du Yukon, était le moniteur du camp qui se déroulait à Silver City.

Mme Henderson, en collaboration avec des parents de Whitehorse, participe également à la mise sur pied en 1982 du premier programme préscolaire en français, c’est-à-dire le Parent Participation Preschool. Elle embauche à l’époque Mme Cécile Girard, qui s’est fait connaître par la suite par son travail à la direction du journal l’Aurore boréale.

Récipiendaire de nombreuses distinctions, dont celle de l’Ordre du Canada, Mme Henderson prend plaisir aujourd’hui à se rappeler cette époque des balbutiements de l’enseignement du français au Yukon. Questionnée sur le sujet, elle en profite d’ailleurs pour ressortir des cahiers d’école de ses anciens élèves qu’elle garde précieusement. Elle pointe alors du doigt différentes dates qui y sont inscrites. On voit ici et là mai 1982 ou avril 1983, ces dates étant entremêlées aux compositions en français de ses premiers élèves yukonnais.

Parcours d’une enseignante franco-yukonnaise

Née à Port-Daniel en Gaspésie au Québec, Sandra Journeaux, de son nom de fille, avait 15 ans lorsqu’elle a terminé ses études et a commencé sa carrière d’enseignante. Elle a eu sa première classe à l’école Penouille située dans ce qui s’appelle aujourd’hui le parc Forillon en Gaspésie. L’enseignement l’a amené à pratiquer son métier à différents endroits dont Val-d’Or, St-Hubert, Chomedy Laval, Terre-Neuve ainsi qu’en Saskatchewan avant de s’établir pour de bon au Yukon.

« Une de mes tantes était enseignante et me permettait, lorsque j’étais enfant, de m’asseoir dans sa salle de classe. Déjà à cette époque j’aimais l’enseignement, et ça n’a jamais changé », confie-t-elle. « C’était d’ailleurs important l’éducation dans la famille, et particulièrement pour mon père qui n’avait terminé que sa 6e année », confie Mme Henderson. Elle prend plaisir à souligner que l’éducation a permis à la sœur de son père, Hazel McCallion née Journeaux, d’obtenir le record de longévité au poste de mairesse de la ville de Mississauga, siégeant de 1978 à 2014.

Après avoir enseigné de 1987 à 2004 au programme d’immersion de l’école secondaire F.H.-Collins, Mme Henderson a pris sa retraite en 2007. Pourtant, l’horaire de la Franco-Yukonnaise n’a pas dérougi depuis cette décision, car elle a depuis géré un gîte du passant jusqu’à tout récemment et a offert (et offre toujours) des cours de français particuliers à des élèves du primaire et du secondaire du Yukon, ainsi qu’à deux élèves de l’Ontario par le truchement de FaceTime. Comme si ce n’était pas suffisant, elle s’implique auprès du conseil scolaire de l’école secondaire F.H.-Collins et séjourne régulièrement en Australie pour donner un coup de main à l’une de ses filles qui vient d’avoir un enfant.

Cet horaire de « retraite » semble tout à fait convenir à cette dame qui semble avoir rayé depuis longtemps de son vocabulaire le mot fatigue.