Un parfum de francophonie yukonnaise flottait dans l’air lors de la prestation de serment de la 26e commissaire du Yukon qui s’est tenue le 12 mars dernier à la maison Taylor, sur la rue Main. L’actuelle vice-présidente de l’Association franco-yukonnaise (AFY), Angélique Bernard, est devenue officiellement la première francophone du Yukon à se voir nommer commissaire du Yukon. Mme Bernard succède à Douglas Phillips dont le mandat a pris fin en janvier dernier.
Une soumission anonyme
L’heureuse nouvelle en a surpris plus d’un, dont la principale intéressée, qui a reçu en février dernier un premier appel d’Ottawa : son nom avait été soumis pour le poste de commissaire du Yukon.
« Ils m’ont demandé si j’étais intéressée et j’ai dit oui immédiatement », confie tout sourire la commissaire Bernard, que l’Aurore boréale a rencontrée à son nouveau bureau de la maison historique Taylor. « J’ignore toutefois l’identité des gens qui ont soumis mon nom. Le processus n’est pas connu. Ça restera donc un mystère », précise-t-elle.
Mme Bernard voit dans cette nomination une reconnaissance positive de l’importance des francophones au Yukon, un thème qui lui est cher. L’AFY, l’organisme porte-parole de la communauté francophone du Yukon, dont Mme Bernard a été présidente de 2010 à 2017, y voit également une reconnaissance symbolique importante pour le fait français au territoire.
« Madame Bernard a toujours démontré son engagement pour la communauté franco-yukonnaise. On ne peut que se réjouir de cette initiative qui lance un message très positif pour notre communauté », souligne la directrice de l’AFY, Isabelle Salesse.
Au Yukon depuis 1995
C’est un stage de quatre mois en traduction au Bureau des services en français du gouvernement du Yukon qui a amené cette Québécoise d’origine à immigrer au Yukon en 1995. Elle a succombé rapidement au charme du territoire et a décidé une fois ses études complétées de s’y installer de façon permanente. Au fil des ans, elle s’est impliquée à plusieurs occasions au sein de la communauté franco-yukonnaise, que ce soit à la Garderie du petit cheval blanc ou à l’École Émilie-Tremblay, à titre de parent, ainsi qu’au journal l’Aurore boréale et comme bénévole à l’émission radiophonique Rencontres.
Mme Bernard a également occupé le poste d’agente de développement de l’organisme Les Essentielles de 1996 à 2001, en devenant officiellement la première employée de l’organisme représentant les intérêts des femmes franco-yukonnaises.
« On ne pouvait trouver meilleure personne qu’Angélique Bernard pour occuper le poste de commissaire du Yukon. Elle possède les qualités requises pour bien représenter toutes les communautés du territoire : probité, diplomatie et empathie », a d’ailleurs tenu à souligner le conseil d’administration des EssentiElles.
À 45 ans, Mme Bernard est également devenue le 12 mars dernier la plus jeune commissaire nommée à ce poste. Mère de deux jeunes garçons, Sébastien (9 ans) et Samuel (7 ans) qui fréquentent l’École Émilie-Tremblay, Mme Bernard désire s’impliquer également auprès de la petite enfance et des familles tout en portant une attention particulière à l’alphabétisation au Yukon.
Le rôle de la commissaire du Yukon
Cheffe officielle de l’État canadien, la Reine Elizabeth II est représentée, à l’échelon fédéral, par le gouverneur général. Un poste d’ailleurs occupé depuis l’automne 2017 par une autre femme francophone, Julie Payette. La Reine est également représentée dans les provinces par les lieutenants-gouverneurs, et dans les territoires par les commissaires. Les lieutenants-gouverneurs des provinces et les commissaires des territoires sont nommés pour un mandat d’au moins cinq ans, par le gouverneur général, sur recommandation du premier ministre canadien. Ils ont un rôle de gardien des institutions constitutionnelles qui peut devenir particulièrement délicat lorsqu’il y a des gouvernements minoritaires.
Ainsi, Mme Bernard aura à veiller à ce que le territoire dispose d’un gouvernement viable en tout temps. Sous l’avis du premier ministre, elle sera responsable de nommer les membres du Conseil exécutif, d’approuver et de signer les décrets du Conseil et de donner la sanction royale aux projets de loi. Il incombe également à la commissaire du Yukon de dissoudre le Parlement afin de pouvoir déclencher les élections territoriales.
C’est en 1898 qu’a été nommé le premier commissaire du territoire du Yukon. Toutefois, il faut rappeler que le rôle du commissaire du Yukon a changé au fur et à mesure que le territoire a obtenu un contrôle accru de sa gouvernance. Le commissaire était initialement chargé d’administrer le territoire, c’est-à-dire la gestion des écoles et des hôpitaux ainsi que la perception des taxes. Par contre, lorsqu’un premier gouvernement a été élu au Yukon en 1979, le rôle du commissaire a dû être révisé, en épousant davantage celui de lieutenant-gouverneur des autres provinces.
Une nouvelle administratrice territoriale
Le premier ministre Justin Trudeau a également annoncé la nomination d’Adeline Webber comme nouvelle administratrice territoriale. Mme Webber est membre de la Première Nation Teslin Tlingit. Elle est née et a grandi à Whitehorse où elle a passé la plus grande partie de sa carrière au sein de la fonction publique fédérale. Mme Webber a travaillé avec diligence pour faire reconnaître les droits des femmes autochtones, et elle a joué un rôle important dans la mise en œuvre de revendications territoriales et d’ententes sur l’autonomie gouvernementale des Premières Nations au territoire.