Voilà le début de l’hiver et du « freeze up » lorsque l’arrivée sur le fleuve des premiers morceaux de glace vient modifier la vie des habitants de Dawson. L’heure où Dawson-Ouest se met en hibernation et profite d’un repos et d’une isolation forcés.

Le traversier, posé sur le bord de la rive, a été retiré du fleuve le 30 octobre et n’y retournera pas avant l’arrivée du printemps. Photo : Hélène Roth
Il y a quelques semaines déjà, des morceaux de glace faisaient leur apparition sur le fleuve : le signal pour le traversier de se retirer, et le préavis pour les habitants de la partie ouest de s’approvisionner pour quelques mois : nourriture, bois, eau, essence, alcool, propane, vêtements chauds, jeux de société et occupations en tous genres. Tous les ans, la même rengaine revient avec pour seul changement la durée du suspense quant à la date des gelées.
Cette année, c’est au petit matin du 30 octobre que le traversier a été sorti des eaux du fleuve et c’est environ une semaine avant que les habitants ont été prévenus de l’opération. Une période un peu stressante pour ces derniers, engagés dans une course contre la montre afin de faire les dernières réserves et de s’approvisionner en produits frais.
Entraide entre voisins
Guillaume Couture, un jeune Montréalais qui fait sa première expérience de l’autre côté du fleuve, vit une aventure singulière : « Se préparer pour le freeze up a été beaucoup de travail et de stress, mais au final, il n’y a rien de sorcier à prévoir, bouffe, gaz, alcool… avec les conseils et l’entraide des voisins, ce n’est qu’une question de temps et d’argent. »
Venu à quelques reprises à Dawson, principalement à l’automne, il n’y avait encore jamais passé l’hiver. Amoureux des grands espaces et de la vie en plein air, c’est tout naturellement qu’il se retrouve à vivre sur la rive ouest. « J’ai l’impression qu’à travers les rencontres et les expériences que j’ai faites au Yukon, la forêt a poussé au milieu de mon cerveau. Depuis, elle est au centre de mes préoccupations », raconte Guillaume Couture.
S’occuper en hiver
Un amour pour la nature qui ne l’a pas empêché d’appréhender certains défis. « Comme plusieurs, j’avais peur de la solitude et de l’ennui. Aujourd’hui, je m’inquiète plutôt de construire une belle relation avec mes colocs et de ne pas trop m’enfermer ou me complaire dans la solitude », confie le jeune homme.
La période du gel permet à beaucoup de personnes de prendre du temps pour eux. Pour Guillaume et ses colocataires, les occupations ne manquent pas.
« Depuis que j’habite ici, mes colocs et moi n’avons jamais manqué de choses à faire. Quand je peux prendre du temps pour moi, je joue de la musique, je dessine, je regarde un film ou je lis. Je fais aussi des expérimentations sur la fermentation ou je me balade. Sinon, on aime bien inviter des voisins pour boire un verre, brasser de la bière ou cuisiner. »
Ne reste plus qu’à savoir combien de temps la rivière mettra à geler. L’an dernier, cela avait pris sept semaines, une période exceptionnellement longue qui avait poussé une partie de la population à se réapprovisionner en hélicoptère.