C’est une première! Cet hiver, le gouvernement du Yukon n’a pas pu mettre en place le pont de glace reliant les parties est et ouest de Dawson. Une centaine d’habitants vivent cependant à l’ouest du fleuve et dépendent chaque année de ce pont de glace pour avoir accès aux services d’urgence comme les pompiers. Le pont éphémère est habituellement praticable de novembre à avril et sa mise en fonction dépend des conditions climatiques.
Un pont de glace officieux
De novembre à janvier, de l’eau libre coulait sur six kilomètres à hauteur de Dawson. Les résidents ont donc d’abord utilisé un passage moins risqué en amont de la ville, qui a été élargi pour l’occasion. La communauté a ensuite balisé un pont de glace non officiel à hauteur de l’embarcadère du traversier, mais celui-ci a cédé le 25 février sans faire de victime.
Le dégel prématuré n’a pas dérangé les habitants de Dawson Ouest, habitués à l’isolement. Une mère de famille francophone témoigne : « Seul le fleuve décide où et quand il gèlera. Nous nous préparons pour le gel en octobre et avons suffisamment de nourriture pour tenir jusqu’aux Fêtes. Si quelque chose manque, c’est là que la créativité embarque! »
Peu de conséquences
En temps normal, le ministère de la Voirie et des Travaux publics du Yukon utilise le pont de glace pour maintenir l’état des routes sur la rive ouest du fleuve. Cette année, une solution alternative a été trouvée. « Ils ont embauché une compagnie minière de Dawson Ouest pour nettoyer la route », explique Paul Robitaille, responsable du marketing à la Klondike Visitors Association. « Nous estimons que la Top of the World Highway sera ouverte en temps raisonnable, elle est essentielle au succès de l’industrie du tourisme. »
La saison touristique hivernale a été particulièrement bonne, malgré l’absence de pont de glace. « Pour le Trek Over the Top, un événement de motoneige, il a fallu trouver un passage sécurisé pour la traversée des 200 participants, ce n’était pas insurmontable », ajoute-t-il.
Le projet du pont fixe toujours en attente
Le gouvernement du Yukon a confirmé qu’il n’y avait « aucune mise à jour sur la construction d’un pont fixe surplombant le fleuve à Dawson ». Le projet a été abandonné en 2006 pour des raisons économiques.
Depuis 1967, c’est un traversier gratuit qui relie les deux rives de Dawson lorsque les glaces cèdent. Son coût de fonctionnement annuel est d’un million de dollars. Sur le long terme, la construction d’un pont, estimée à trente millions de dollars, serait donc plus rentable pour le territoire.
De nombreux Dawsoniens adhèrent au projet de construction, comme Lisa Anderson, une autochtone qui travaille pour la Première nation Tr’ondëk Hwëch’in. « Il ne s’agit plus de préservation, mais de croissance communautaire et de sécurité globale pour nos concitoyens », dit-elle.
Paul Robitaille partage son avis. « Cela serait un plus pour l’économie de Dawson. Avec le réchauffement climatique, c’est une conversation que l’on entend régulièrement en ville. Mais la beauté de ne pas avoir de pont fixe, c’est que cela rend notre région originale et authentique. »
Une majorité des habitants de Dawson Ouest restent opposés à l’idée, malgré les problèmes rencontrés cet hiver. « S’ils construisent un pont, l’électricité nous sera imposée. Chacun des résidents devra payer les frais, environ 60 000 $ par propriété. Plusieurs personnes ici vivent une vie simple. Cette somme les obligerait à changer de mode de vie ou encore à déménager », confie une habitante francophone qui souhaite garder l’anonymat.
Entre développement économique, sécurité et protection environnementale, les Dawsoniens auront certainement un choix à faire dans les années à venir.