Le nouveau gouvernement libéral a annoncé le 19 janvier avoir déposé auprès de la Cour suprême du Canada son mémoire sur le Plan régional d’aménagement du bassin hydrographique de la rivière Peel. Cette étape fait suite à la décision prise le 9 juin dernier par la plus haute cour du pays d’accepter d’entendre l’appel lancé par une coalition de plaignants opposés au gouvernement du Yukon.
« La décision de la Cour suprême aura pour effet d’éclairer toutes les parties sur l’utilisation des terres, ce qui nous permettra de poursuivre le processus d’aménagement du territoire au Yukon et de finaliser le Plan d’aménagement du bassin de la Peel », a affirmé la ministre de la Justice du Yukon, Tracy-Anne McPhee.
Rappel des faits
En désaccord avec un plan d’aménagement qui proposait de protéger 80 % de la région, le gouvernement conservateur de Darrell Pasloski avait choisi de passer outre les recommandations d’une commission d’experts et de ne protéger que 30 % des terres. Un nouveau plan avait alors été soumis à une série de consultations publiques. Cette pratique avait cependant été dénoncée par la Première nation des Nacho Nyak Dun, la Première nation des Tr’ondëk Hwëch’in, la section yukonnaise de la Société pour la nature et les parcs du Canada, la Yukon Conservation Society et deux particuliers. En 2014, la Cour suprême du Yukon leur avait donné raison lors d’un premier procès.
La Cour d’appel du Yukon avait alors été saisie par le gouvernement Pasloski. La décision rendue en novembre 2015 ordonnait finalement au territoire de reprendre les consultations et le processus d’aménagement à l’étape où la commission d’experts avait déposé son plan final. Une décision qui ne respecte pas toujours les ententes territoriales autochtones, selon les plaignants. Ces derniers souhaitent donc désormais que la Cour suprême du Canada intime l’ordre au gouvernement du Yukon d’adopter sans réserve le plan final de la commission indépendante.
Un fardeau inévitable
Bien que l’adoption de ce plan final ait été l’une des principales promesses de campagne du gouvernement libéral, celui-ci se voit toutefois contraint de porter pour encore quelque temps le fardeau judiciaire du gouvernement précédent. Les mots se font plus doux, mais la position de la ministre McPhee résonne toutefois naturellement avec la déclaration faite l’été dernier par le gouvernement conservateur.
« […] Nous espérons que la Cour suprême du Canada pourra trancher et fournir des précisions concernant la façon dont le processus de planification régionale de l’utilisation des terres doit se dérouler, et qu’elle établira clairement que l’État a le pouvoir de prendre des décisions sans appel en ce qui a trait aux terres publiques », expliquait il y a sept mois le gouvernement Pasloski.
La ministre McPhee explique cependant que son gouvernement respecte et partage le désir des Premières nations et des organismes de conservation de connaître l’interprétation de la Cour suprême dans le dossier.
« Nous tenons à travailler avec les Premières nations dans un esprit de collaboration et de respect en vue de mettre en œuvre les ententes définitives et les ententes sur l’autonomie gouvernementale et de suivre les processus établis dans ces ententes », nuance-t-elle ainsi. « Les ententes définitives et les ententes d’autonomie gouvernementale sont des outils qui favorisent la collaboration dans l’édification de notre pays, la protection de l’environnement, la stimulation d’une croissance économique durable et, surtout, la réconciliation. À la suite de cette affaire, nous sommes déterminés à travailler de manière ouverte, respectueuse et transparente avec les Premières nations, la population et les autres intervenants dans la poursuite de l’aménagement des terres dans le territoire. »
À la lumière des déclarations de la ministre McPhee, il est ainsi plus probable que le gouvernement du Yukon veuille profiter de cette audience devant la Cour suprême pour tenter de repartir sur de bonnes bases avec les plaignants. Une volte-face du gouvernement Silver sur le dossier de la Peel serait en effet considérée comme une promesse brisée, alors même que les libéraux viennent de signer avec les Premières nations yukonnaises une déclaration intergouvernementale placée sous le signe de la confiance et de la réconciliation.