L’affaire du bassin versant de la rivière Peel sera finalement jugée devant la Cour suprême du Canada, a-t-on appris le 9 juin. La plus haute cour du pays a en effet annoncé qu’elle acceptait d’entendre l’appel lancé par la coalition de plaignants regroupant plusieurs Premières nations et groupes environnementaux opposés au gouvernement du Yukon.
En désaccord avec un plan d’aménagement qui proposait de protéger 80 % de la région, le gouvernement avait choisi de passer outre les recommandations d’une commission d’experts et de ne protéger que 30 % des terres. Ce nouveau plan avait été soumis à une série de consultations publiques, mais cette façon de faire avait été jugée inacceptable par les plaignants. La Cour suprême du Yukon leur avait donné raison lors d’un premier procès.
Saisie par le gouvernement du Yukon, la Cour d’appel du Yukon mitigeait cependant la décision de première instance et ordonnait en novembre dernier au territoire de simplement reprendre les consultations et le processus d’aménagement du bassin de la Peel à l’étape où la commission d’experts avait déposé son plan final. Une décision d’appel qui ne respecte toujours pas les ententes territoriales autochtones, selon les plaignants qui souhaiteraient que la Cour suprême du Canada intime désormais l’ordre au gouvernement du Yukon d’adopter sans réserve les recommandations de la commission d’experts.
« Bien qu’avoir recours aux tribunaux ne soit pas l’approche privilégiée du gouvernement du Yukon, nous espérons que la Cour suprême du Canada pourra trancher et fournir des précisions concernant la façon dont le processus de planification régionale de l’utilisation des terres doit se dérouler, et qu’elle établira clairement que l’État a le pouvoir de prendre des décisions sans appel en ce qui a trait aux terres publiques », a fait savoir le gouvernement du Yukon le 9 juin dernier. « Le moratoire visant les activités liées au jalonnement de claims miniers et à la mise en valeur des ressources pétrolières et gazières dans le bassin hydrographique de la rivière Peel demeure en vigueur jusqu’au 1er janvier 2018. D’ici là, nous l’espérons, l’affaire aura été entendue. »
L’opposition officielle néo-démocrate a également réagi à la nouvelle par la voix de sa chef Liz Hanson. Fermement opposé à la décision du gouvernement d’ouvrir 80 % de la région à l’exploitation industrielle, le NPD yukonnais a assuré dans l’optique des prochaines élections qu’un gouvernement néo-démocrate s’engagerait à respecter le plan final déposé par la commission d’experts.
« La décision de la Cour d’appel a essentiellement offert au gouvernement formé par le Parti du Yukon un nouvel essai en dépit de la mauvaise foi dont il a fait preuve envers les gouvernements des Premières nations et les citoyens yukonnais tout au long du processus de planification », a déclaré Elizabeth Hanson par voie de communiqué. « C’est une seconde chance qu’il ne mérite pas. Le premier ministre Darrell Pasloski et son gouvernement ont échoué à honorer la lettre et l’esprit des ententes territoriales autochtones et ont ramené le processus de planification sur l’utilisation des terres des années en arrière. »
Selon le chef du Parti libéral du Yukon, Sandy Silver, le fait de laisser la Cour suprême du Canada décider de l’avenir de la Peel risque de priver le Yukon de sa capacité et de sa responsabilité à négocier son propre futur.
« Bien qu’il soit très décevant de devoir aller devant la plus haute cour du pays pour être entendu, au moins le Yukon aura des certitudes quant à notre environnement et notre économie après une décennie d’échecs », a affirmé M. Silver. « Le gouvernement formé par le Parti du Yukon s’est battu contre la volonté du peuple à chaque instant. La décision d’aujourd’hui est un rappel de son incapacité à consulter ou négocier avec les Premières nations. »
La Cour suprême du Canada n’a pas encore fait savoir à quelle date se tiendrait le procès.