Nelly Guidici
Le 14 mai 2015 à midi, les piétons de la rue Main pouvaient lire sur les nombreux panneaux colorés des messages tels que : « Les femmes ont le droit d’avoir le choix », « Mon créateur m’a donné le choix » ou encore, « Le choix reproductif est un droit humain. » En effet, une trentaine de personnes, hommes et femmes, se sont réunies devant l’édifice Elijah Smith à la suite de l’appel du Centre des femmes Victoria Faulkner et du groupe Les EssentiElles. Cette manifestation silencieuse est un soutien pour le droit des femmes à choisir.
« Nous défendons le droit légalement protégé d’une femme à choisir ce qui se passe dans son corps. Le choix reproductif est un droit humain que toutes les femmes devraient avoir », a déclaré Hillary Aitken, coordonnatrice du programme travaillant au centre Victoria Faulkner. Parmi les personnes présentes, des députés de l’opposition du Nouveau Parti démocratique comme Kate White ou Jan Stick, ainsi que des femmes enceintes ont montré leur soutien à celles qui choisissent un avortement. Rappelons que le 28 janvier 1988, au terme de plusieurs années de bataille juridique, une décision majeure de la Cour suprême du Canada abrogeant la loi canadienne qui criminalisait l’avortement donnait aux femmes le droit d’interrompre librement leur grossesse. Au Yukon, deux médecins pratiquent cette intervention à l’hôpital général de Whitehorse.
Une marche pro-vie
Cette manifestation silencieuse est une réponse au mouvement national appelé pro-vie qui a réuni des milliers de personnes devant le parlement d’Ottawa. À Whitehorse, c’est une quarantaine de personnes : hommes, femmes et enfants qui ont marché depuis la vieille église en rondins jusqu’à la 2e Avenue avant de retourner vers leur lieu de départ. Le tracé choisi a évité le lieu de rassemblement du groupe pro-choix. Membres de plusieurs églises de la ville comme Cœur sacré, l’Église baptiste ou encore l’Armée du Salut, les messages de ces personnes étaient clairs : « Une femme enceinte a besoin d’aide, pas d’avortement », « La vie, le seul choix » ou encore « L’adoption est l’option d’amour. » Le Père Kieran Kilcommons a précisé lors d’une entrevue les raisons de cette marche : « Je pense que chaque vie est précieuse et sacrée, et je crois que la vie commence au moment de la conception. Nous n’avons pas besoin de tuer une vie pour en préserver une autre, nous pouvons prendre soin des femmes et des enfants », assure-t-il.
L’accès à l’avortement
Dans le cadre de cette journée, le thème de l’accès à l’avortement a été soulevé à l’Assemblée législative par la députée de l’opposition Jan Stick. En effet, si l’avortement se pratique à l’Hôpital général de Whitehorse, la situation se complique davantage pour les femmes qui habitent à l’extérieur de la capitale. Les communautés de Dawson et Watson Lake ont chacune un hôpital où des services médicaux sont proposés. Cependant, une interruption volontaire de grossesse ne peut y être pratiquée. Les délais d’attente peuvent donc être rallongés, car il convient de prendre en compte les déplacements depuis ces communautés rurales jusqu’à Whitehorse afin de mettre en place le processus. Après avoir obtenu un référencement par un médecin de famille, une échographie doit être pratiquée au préalable. Comme le rappelle Mme Stick en session parlementaire, le délai de douze semaines peut être dépassé pour celles qui n’habitent pas à Whitehorse. Au-delà, les patientes sont envoyées à l’extérieur du territoire. « Le processus peut prendre entre deux et cinq semaines pour les résidentes des communautés rurales. Quelles actions immédiates le gouvernement va-t-il prendre afin d’améliorer l’accès à l’avortement pour les femmes de ces communautés? » Dans sa réponse à madame la députée, le ministre de la Santé, M. Nixon, a indiqué : « Nous allons continuer à explorer des options pour les pratiques de soins supplémentaires et des modèles de prestation novateurs qui serviront à répondre aux besoins de soins de santé de tous les résidents du Yukon. » L’avortement et son accès pour les femmes yukonnaises, quel que soit leur lieu de résidence sur le territoire n’est pas forcément un sujet facile puisque celles qui résident en dehors de la capitale doivent considérer des délais plus longs et peut-être la possibilité d’être envoyées loin de leur domicile et de leur famille pour subir une intervention.