Nelly Guidici
Le travail de la Commission de vérité et réconciliation a commencé en 2009 comme suite aux excuses présentées par Stephen Harper aux survivants des pensionnats indiens en 2008. Pendant six ans, elle a rencontré les survivants à travers tout le pays et a recueilli leurs témoignages. Aujourd’hui, la commission dont le président est l’honorable juge Murray Sinclair finalise son travail. L’événement de clôture se tiendra à Ottawa du 31 mai au 5 juin 2015. Selon M. Sinclair, cet épisode de l’histoire du Canada a affecté la relation entre les peuples autochtones et la société : « Nous devons être capables de concevoir ce que nous voulons être dans les générations futures lorsque nous parlons de relation entre les Autochtones et les non Autochtones dans ce pays. »
En marge du travail de la commission, le Cercle des femmes autochtones de Whitehorse a eu l’idée de recueillir des photos des étudiants de l’école indienne de la Mission baptiste à Whitehorse. Ancienne étudiante de cet établissement et membre du CFAW, Adeline Webber a réalisé qu’il y avait peu d’archives disponibles sur cette école. Pour entreprendre ce travail de collecte d’images, le projet a reçu de l’aide financière de l’Église anglicane ainsi que du gouvernement du Yukon. Une partie des photos récoltées proviennent des musées de la ville comme le MacBride et des archives de l’école détenues par l’Église baptiste de Whitehorse. Melissa Carlick, coordonnatrice du projet, précise lors d’une entrevue : « Nous avons obtenu plusieurs boîtes d’archives de l’école de la part de l’Église baptiste. Ces boîtes ne contenaient pas uniquement des photos, mais aussi des documents internes à l’établissement. La communauté baptiste a montré de l’intérêt dans ce projet et elle nous a apporté du soutien. »
Grâce à plusieurs messages à la radio et dans les journaux de la ville, les anciens étudiants ou leurs familles étaient invités à partager leurs photos qu’ils pouvaient transmettre avec des clés USB. Aujourd’hui, ce sont plus d’une centaine de photographies qui ont été recueillies. Lors de séances qui ont eu lieu deux fois par semaine aux mois de décembre 2014 et janvier 2015, les anciens étudiants ont été invités à découvrir ces photos et à identifier les visages de leurs camarades. « Parfois, quand ils voient certaines photos, les aînés rient et racontent une histoire qui leur revient en mémoire comme le spectacle de Noël. Il y a toujours des histoires qui refont surface », explique Mme Carlick.
Une étape vers la guérison
« Le but du projet est d’engranger la guérison. Il fait partie du processus de la Commission de vérité et réconciliation. Documenter cette partie de l’histoire est important », rappelle Mme Carlick. Contrairement à d’autres établissements qui ont révélé des histoires terribles, l’école indienne de la Mission baptiste a laissé de bons souvenirs. Localisée à l’époque sur la 4e Avenue en face de l’actuel hôtel High Country Inn, cette école fait figure d’exception dans le passé des pensionnats : « C’est unique, car peu de gens ont dit que c’était une mauvaise école. En général, dans les écoles résidentielles il y a beaucoup de zones sombres, mais là les personnes ont parlé des compétences qu’ils ont acquises. Il n’y a pas vraiment de mauvais souvenirs qui ont émergé. » Ouverte dans les années 1940, l’école a accueilli des enfants de Whitehorse, des environs ainsi que du nord de la Colombie-Britannique.
Vers la création d’un livre
L’un des objectifs du projet est la création d’un ouvrage regroupant les photos recueillies. « Lorsque quelqu’un reconnaît un enfant, nous vérifions l’information avec quelqu’un d’autre », précise Mme Carlick. Le projet va se poursuivre avec un atelier les 6 et 7 février 2015. D’anciens étudiants du territoire, de la Colombie-Britannique et de l’Alberta participeront au processus d’identification des visages. Ils décideront également quelles photographies figureront dans le livre. Des travailleurs de soutien en santé seront présents en cas de besoin et des histoires seront également enregistrées. « Nous souhaitons avoir un maximum de personnes identifiées sur les photos. Après, nous pourrons commencer la création du livre et les personnes choisiront aussi quelles histoires elles souhaitent voir être racontées dans l’ouvrage. » Le projet sera finalisé en mars 2015 et chacun pourra faire un voyage dans le temps en découvrant les photographies du livre dont la date de parution n’a pas encore été dévoilée.