Christopher Scott
Cette année, pour un troisième hiver consécutif, la Ville de Dawson expérimente une technologie novatrice, basée sur la biomasse, qui lui permet de réaliser des économies substantielles dans le domaine du chauffage des installations.

Mike Fraser dans le hangar où sont remisés les copeaux de bois qui alimentent la chaudière. Photo : Christopher Scott.
Chaque année, dès l’arrivée des temps froids, les dépenses en carburant occupent une place importante dans le budget de la municipalité. Entre autres, les deux citernes qui gardent les eaux potables de la ville doivent être maintenues à une température de 5 oCelsius afin de faciliter le déplacement du liquide dans les aqueducs. Jusqu’à récemment, cette tâche occasionnait l’achat de quelque 250 000 litres de diesel annuellement, au coût estimé de 325 000 $.
Toutefois, depuis janvier 2013, l’exploitation d’une chaudière industrielle alimentée avec des copeaux de bois située dans un bâtiment sur la 5e Avenue permet de fournir la majorité de cette énergie à un moindre prix.
Le tout a été rendu possible par un don de 5 millions $ déboursé en 2012 par le gouvernement fédéral et géré par le ministère des Routes et Travaux publics du gouvernement du Yukon.
Achetée à la société allemande Viessman Kob, la chaudière est alimentée par un système informatisé qui fournit les copeaux à un débit régulier en fonction des besoins en énergie. L’engin chauffe un liquide à base d’eau jusqu’à 90 oCelsius, avant de l’acheminer par des aqueducs vers la station du réservoir de la ville située à quelques centaines de mètres. La chaleur générée est ensuite transférée à travers un système de plaques métalliques directement dans les citernes.
Le bois, quant à lui, est récupéré d’une société forestière locale, la Arctic Inland Resources qui, auparavant, se débarrassait de près de 40 % de son volume de coupe qu’il n’était pas possible de transformer en planches ou en poutres. Selon un employé contacté par l’Aurore boréale, avant 2013, une bonne partie de ce surplus était tout simplement brûlée devant la scierie de la compagnie.
Toutefois maintenant, en vertu d’un contrat annuel de 184 000 $, ce bois est taillé en copeaux et livré au hangar des Travaux publics. D’après M. Ken Bach, employé de la Ville, l’usage du bois permet actuellement de réduire de deux tiers la consommation en diesel reliée au chauffage des citernes, et on s’attend à des réductions encore plus importantes avec le perfectionnement du système.
Pour ses défenseurs, cette exploitation de biomasse est un succès sur les plans autant économique qu’environnemental, dans la mesure où on élimine des gaz à effets de serre générés par le diesel alors que le bois produit en surplus par la Arctic Inland Resources aurait fini par être brûlé ou se décomposer dans l’atmosphère de toute façon.
Mike Fraser, gérant de la section des Travaux publics qui administre le projet, ne cache pas son enthousiasme.
« Pour moi, c’est un sujet énorme. On parle d’une nouvelle industrie qu’on peut développer et dans laquelle on peut se rendre experts, », s’exprime le travailleur dans la cinquantaine, affable et volubile, et qui a été élevé en partie à Jonquière.
Selon les chiffres de M. Fraser, il coûte 23,50 $ le Gigajoule (unité d’énergie) pour produire de la chaleur à Dawson à partir des copeaux de bois, alors qu’il revient à quelque 32 $ la même unité, selon le prix actuel, en exploitant le diesel.
Toujours d’après M. Fraser, si certains autres bâtiments publics du Yukon se chauffent déjà par la biomasse (on pense au Pénitencier de Whitehorse, notamment), c’est en acheminant un liquide dans les aqueducs pour transférer la chaleur d’une installation à l’autre que le cas de Dawson se montre novateur et unique.
M. Fraser tient à préciser que la responsabilité pour ce projet de biomasse, actuellement géré par le ministère des Routes et Travaux publics du gouvernement territorial, sera transférée à la municipalité de Dawson à compter du printemps 2016.
Remarquons qu’en plus des citernes, la chaudière de biomasse fournit aussi de la chaleur à la toute nouvelle station d’épuration des eaux usées de la ville. Il y aurait également des plans, moyennant l’achat d’un nouvel engin, pour chauffer plusieurs bâtiments publics situés à proximité de l’installation actuelle, dont le Musée municipal, une résidence de personnes âgées, et la piscine publique, notamment, en utilisant le même système.
Néanmoins, pour cette année, l’heure est à l’expérimentation, au « débogage » et au perfectionnement du système déjà installé.
Pour résumer les paroles de M. Fraser : « Nous espérons avoir de quoi nous péter les bretelles cet hiver. »