Pierre Chauvin
Alors qu’Internet et les technologies de l’information occupent une place de plus en plus importante dans nos vies, mais aussi dans celle des entreprises, l’Aurore boréale présente le premier d’une série de quatre articles sur le Yukon et les technologies de l’information. Ce numéro-ci : l’utilisation des logiciels libres par le gouvernement.
À première vue, la gendarmerie nationale française, le parlement français, les gouvernements espagnol, islandais et britannique ont peu de choses en commun, sauf leurs récentes décisions de se tourner vers l’utilisation de logiciels libres.
La gendarmerie nationale en équipant 15 000 de ses ordinateurs avec le système d’exploitation Linux Ubuntu au lieu de Windows a pu réduire son budget informatique de près de 70 %. Les logiciels libres se distinguent par le fait que leur code source, leur contenu, est public et accessible à tous gratuitement.
L’achat de logiciels et le renouvellement des licences représentent des dépenses importantes pour les gouvernements à cause de leur taille. La Ville de Whitehorse dans son budget capital envisage de dépenser 452 500 $ entre 2014 et 2017 pour l’achat de logiciels, et près de 1,4 million de dollars pour la même période pour le renouvellement des licences. Pour le gouvernement du Yukon, les mêmes types de dépenses se chiffrent à plus d’un million de dollars par an.
La liste de gouvernements qui ont décidé de faire le saut s’allonge de jour en jour. Alors, pourquoi le gouvernement et les municipalités du Yukon n’utilisent-ils pas les logiciels libres? « C’est facile d’embaucher des gens habitués aux produits Microsoft, alors que pour les logiciels libres, c’est un peu plus difficile », explique Mike Stevely, responsable des systèmes informatiques à la Ville de Whitehorse. « Ce n’est certainement pas une question “ah! nous haïssons les logiciels libres!”, dit-il en riant.
Il faut trouver un équilibre entre le coût des logiciels propriétaires et « l’efficacité opérationnelle », explique-t-il. Les employés devraient être formés sur les nouveaux logiciels, ce qui prendrait du temps. La Ville a aussi investi de façon importante dans certains logiciels, comme celui qui gère les réservations au Centre des Jeux du Canada, et un changement n’est pas faisable pour le moment.
La Ville utilise quelques logiciels libres et a un œil sur le sujet, mais pour l’instant, aucun changement majeur n’est prévu. Même son de cloche au gouvernement du Yukon. « C’est quelque chose que nous surveillons », dit Sean McLeish, directeur de l’information au ministère de la Voirie et des Travaux publics. « Là où ça se complique, c’est que nous avons beaucoup de connaissances sur les logiciels que nous utilisons en ce moment », dit-il.
Même si comme pour la Ville aucun plan de changement vers les logiciels libres n’est planifié, Sean McLeish prévoit de contacter des municipalités et des gouvernements qui ont fait le changement afin d’en apprendre plus sur le processus. « Les logiciels libres ont prouvé qu’ils peuvent être utilisés de façon fiable pour les systèmes informatiques les plus larges et les plus complexes qui soient », rappelle John Weathersby directeur de l’institut du logiciel libre (OSSI), une association américaine qui promeut l’utilisation des logiciels libres aux acteurs gouvernementaux lors d’une entrevue avec l’Aurore boréale.
« Le débat sur l’adoption par les agences gouvernementales de logiciels libres ou propriétaires peut être résumé par une simple question : lesquels ont le plus de valeur d’un point de vue technique, économique et administratif pour l’utilisateur? Selon notre expérience, la réponse est rarement “libre” ou “propriétaire”, mais plutôt un mélange des deux qui utilise les forces des deux modèles », dit-il.