Pierre Chauvin
À la suite de l’adoption par le gouvernement de son plan d’aménagement de la Peel, le premier ministre Darrell Pasloski a tenu à justifier cette décision : il s’agit de trouver un équilibre entre la protection du bassin et le développement économique de la région.
L’adoption d’un nouveau plan qui change la protection de 70 % à 29 % du bassin de la Peel a déclenché une vague de fureur parmi les écologistes, l’opposition officielle, mais aussi de nombreux Yukonnais.
La charge a d’abord été menée par le NPD et la Yukon Conservation Society (YCS).
« Je suis déçue que le gouvernement ait choisi la route de la confrontation avec les Premières nations », a déclaré Kate White, critique du NPD sur l’environnement.
« Pour moi, c’est un vrai manque de respect », dit-elle.
Elle rappelle que le NPD avait appuyé le plan final en 2011, et dit s’inquiéter pour le prochain projet d’aménagement du territoire : sur les huit projets prévus, seul le plan du nord Yukon est terminé et à part le Peel, il en reste six.
Or, note la députée du NPD, la participation des Yukonnais dans le processus d’aménagement est cruciale. La décision du gouvernement yukonnais d’aller à l’encontre du souhait de la plupart des citoyens qui sont intervenus en faveur d’une protection complète risque d’en décourager beaucoup, estime-t-elle.
En plus du fait que le gouvernement a considérablement réduit les zones protégées, des routes peuvent être construites à travers ces zones, déplore quant à elle, Karen Baltgailis, directrice générale de la Yukon Conservation Society (YCS). « Nous les appelons de fausses zones protégées », explique-t-elle.
Et même si les routes construites doivent être fermées au public – pour empêcher l’accroissement de la pêche et de la chasse, Karen Baltgailis explique que la taille du bassin rend l’application de cette règle impossible.
« Ils disent qu’ils vont construire les routes de manière à ce que nous ne les voyions pas, mais ce n’est pas possible. Le seul endroit pour placer une route est dans la vallée. »
Elle critique aussi le seuil de 0,2 % de surface perturbée (voir article Écrire le titre de l’article et le no. de page), ce qui représenterait 4 000 hectares de terre, ou quatre mines, près des rivières Wind et Bonnet Plume, avec une route toute saison le long de la rivière. « Comment ce niveau de développement industriel peut-il être considéré comme compatible avec le tourisme et la vie sauvage? », demande-t-elle.
Sur les 10 000 soumissions à la commission, Karen Baltgailis dit que près de 2 000 d’entre elles venaient de Yukonnais.
Toute entreprise qui songe à exploiter le Peel doit être mise en garde que les Yukonnais et les Premières nations concernées sont contre toute exploitation dans les zones qui auront été protégées dans le rapport final de la commission, a-t-elle tenu à préciser.
Mais l’industrie minière n’est pas satisfaite de ce plan non plus. La Chambre des mines du Yukon, qui représente l’industrie minière du Yukon, considère que les nombreuses conditions dans les zones ouvertes à l’exploitation équivalent à une protection complète du bassin.
« (Le plan) fait que de nombreux projets ne sont plus rentables dans cette région », explique Samson Hartland, directeur général, en entrevue à l’Aurore boréale. Pour lui, l’équilibre dont parle le premier ministre n’a pas été atteint.
« Seul le temps nous dira quelles sont les retombées du plan sur les explorations », regrette-t-il.
En entrevue à l’Aurore boréale, le premier ministre Darrell Pasloski a dit être au courant des critiques formulés par les deux camps. « Cela montre que c’est (un plan) équilibré », répond-il. Il a encouragé les Yukonnais à lire le plan. « Ce qui est rapporté au sujet du plan ne reflète pas le plan tel qu’adopté », a rajouté le premier ministre.
Au sujet de la poursuite intentée par les Premières nations, le premier ministre dit qu’une décision sera prise dans les 21 jours, une fois que le dossier aura été examiné. « Notre sentiment est que nous avons suivi et parfois dépassé les exigences de l’accord-cadre définitif (UFA) au sujet du l’aménagement du bassin de la Peel. »
Il a aussi critiqué le NPD et le Parti libéral du Yukon pour avoir, selon lui, appuyé le rapport de la commission avant que celui-ci n’ait été rendu public.
« La commission est composée de personnes qui ne sont pas élues et qui ne rendent compte à personne », a vivement critiqué le premier ministre. « Les Yukonnais s’attendent à du leadership », dit-il, « les décisions doivent être prises par les élus ».