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le Mercredi 25 septembre 2013 17:19 Scène locale

Départ d’un pionnier de l’éducation en français

Le décès de Bertrand Lacroix, le 12 septembre 2013 a semé la consternation à Whitehorse.

M. Lacroix était arrivé au Yukon en 1986 pour occuper le poste de coordonnateur des programmes du français.

En page 3 de son édition du 21 mars 1986, l’Aurore boréale le présentait dans une entrevue signée par Chantal Rivest. Le titre de l’article était révélateur de la philosophie de l’administrateur, pédagogue et enseignant de formation : « Ma priorité, c’est l’élève. »

Bertrand Lacroix à son arrivée au Yukon. Photo : Archives A.B.

Bertrand Lacroix à son arrivée au Yukon. Photo : Archives A.B.

« Je suis né à Montréal où j’ai demeuré jusqu’à l’âge de 20 ans. Je suis ensuite parti dans le Nord-Est de l’Ontario, à New Liskeard, une communauté située dans la région du Témiscamingue. Le gouvernement de l’Ontario qui finançait à ce moment les écoles publiques françaises a fondé l’école secondaire Sainte-Marie dans les années 1968-1969. J’y ai enseigné de 1969 jusqu’à mon déménagement à Whitehorse.

Ma formation universitaire s’est faite au Campus Loyola de l’Université de Montréal, à l’Université Laurentienne de Sudbury, à l’Université Lakehead de Thunder Bay et à l’Université d’Ottawa où j’ai obtenu ma maîtrise en psychopédagogie. […] En tant que parent, je suis fier de voir que les enfants peuvent être instruits en français dans une école francophone. Chapeau à ceux qui ont réussi cela!

L’esprit de coopération entre la population enseignante, les parents et les responsables du ministère de l’Éducation fait que l’avenir est encourageant. L’enthousiasme actuel est de bon augure. J’en appelle à tous les regroupements avec la clientèle étudiante en tête, pour maintenir cet esprit. »

Un peu plus tard, en page 3 de l’édition du 15 août 1986, on trouve une lettre ouverte à la communauté francophone signée par M. Lacroix : « Pourquoi l’école Émilie-Tremblay pour vos enfants? »

Gilbert Lamarche, un ami et confrère de travail, se souvient d’un homme qui avait de fortes convictions et de nombreux talents. « Enseignant d’histoire et de géographie, il avait perfectionné des talents de négociateur au sein de l’Association des enseignants francophones de l’Ontario (AEFO). Grand amateur de plein air, Bertrand disait fréquemment : “Mes meilleures décisions, je les ai prises auprès d’un feu de camp ou assis sur les rives d’un lac ou d’une rivière.” La cause francophone et la qualité de l’éducation des jeunes lui tenaient à cœur », se rappelle M. Lamarche.

Il souligne encore que M. Lacroix a pris beaucoup de fierté à être un pionnier de l’AFY, l’un des fondateurs de La garderie du petit cheval blanc et sûrement de l’école Émilie-Tremblay. Il a ouvert toute grande la porte avec Patrimoine canadien (les ententes bilatérales).

Bertrand Lacroix sera en poste comme coordonnateur des programmes du français jusqu’en 1993. Sous son impulsion, de grands changements verront le jour dans le domaine de l’éducation en français. Il a travaillé à tailler la place du français au ministère de l’Éducation. Le programme des moniteurs de français s’est épanoui. Travaillant de près avec la communauté francophone, le coordonnateur a trouvé des fonds pour produire différents outils pédagogiques, dont un coffret réunissant Rêves magnétiques, un diaporama produit par des bénévoles, le drapeau de la Franco-Yukonnie ainsi qu’un feuillet de renseignements sur la communauté. Le premier jeu Klondike a aussi profité d’un soutien financier du ministère de l’Éducation.

« À son arrivée, le français langue seconde n’était offert que de la 7e à la 9e année. Quand il est parti, le français langue seconde était offert de la 1re à la 12e année. Il avait aussi un grand intérêt dans la traduction, il a d’ailleurs fait traduire les premières enseignes au gouvernement territorial. Il croyait dans l’éducation préscolaire et la francisation », termine M. Lamarche.

Même son de cloche du côté de Dave Sloan, qui était directeur d’école lorsqu’il a connu M. Lacroix à la fin des années 1980. « On pourrait l’appeler le Parrain de l’éducation en français au Yukon. Bertrand a été instrumental dans l’implantation et la promotion de l’éducation en français. Sa détermination était remarquable. Un homme exubérant qui possédait un magnifique sens de l’humour. Sa bonne humeur était contagieuse. Nous sommes rapidement devenus amis. Nous allons nous ennuyer!»

Après 1993, M. Lacroix occupera plusieurs postes, toujours au ministère de l’Éducation et finira sa carrière en tant qu’analyste senior. En 2003, à cinquante-cinq ans, il prend sa retraite et demeure un porte-parole fervent des beautés du territoire et un fier ambassadeur de la communauté francophone et francophile.