Christian Klein voit le jour en France, en Alsace. Après avoir terminé ses études d’ingénierie en 1961, il y fait son service militaire – c’est là qu’il commence sa carrière – puis a assez rapidement la piqûre des voyages et de l’aventure.
De l’Alsace vers le Grand Nord
En Europe, il travaille en Suisse puis en Allemagne, et part ensuite pour un contrat de deux ans en Afrique. À son retour, quatre mots prononcés le 24 juillet 1967 donnent un tournant à sa vie : la célèbre phrase « Vive le Québec libre ! » éveille son intérêt. Il prend conscience que le Canada est un pays où des gens peuvent vivre en français. En janvier 1968, il foule donc le sol du pays à la feuille d’érable.
« En arrivant au Québec en janvier 1968, je ne parlais pas un mot d’anglais », avouait-il à Françoise Laroche dans une entrevue pour l’Aurore boréale en 2016. Et à l’époque, les entreprises d’ingénierie québécoises se trouvaient sous dominance linguistique anglophone. « Je ne trouvais pas de travail dans les entreprises privées au Québec parce que les patrons étaient anglophones, et ils voulaient que tout le monde parle en anglais avec eux, même si les employés étaient francophones », relatait Christian Klein.
Grâce à la suggestion d’amis, il entame une reconversion professionnelle pour devenir enseignant, et se dirige vers Kangiqsualujjuaq, une communauté inuite du Nord-du-Québec qui cherche alors du personnel enseignant. Rapidement, il y est nommé principal et responsable de l’audiovisuel. Il y crée le comité des parents et publie mensuellement un journal en inuktitut avec l’apport des aides-enseignants inuits. « Après quelques années, ses élèves étaient capables de traduire le français vers l’inuktitut, établissant ainsi la liaison entre tous les francophones venus au village et leurs parents », indique le texte publié par sa famille dans le Yukon News.
C’est à cette époque qu’il rencontre son épouse, Judy, originaire de la région de Seattle, qui travaillait alors pour l’école fédérale.
L’arrivée au Yukon
À Ivujivik, dans le Nord-du-Québec, créer une piste d’atterrissage présentait un grand défi lorsque Christian Klein y était enseignant. Avec des jeunes de son école, il trace alors les limites d’un terrain qu’ils arpentent ensemble et cherchent du gravier. Cinq ans plus tard, la piste est construite et ce succès lui ouvre la porte à un poste de technicien de la Baie d’Hudson pour les Affaires indiennes. Cet emploi lui permet de voyager dans le Grand Nord et l’amène en 1982 au Yukon. Puis, en 1990, on lui propose un emploi de gérant de projets avec le gouvernement du Yukon. « Le musée de la Béringie a été l’un de mes projets, ainsi que l’aéroport de Haines Junction et l’École Holy Family », expliquait Christian Klein à l’Aurore boréale dans un article au sujet de son parcours. Il prend sa retraite en 2000.
Un francophone de cœur
« J’ai rencontré Christian en 1986 à Spirit Lake Lodge », se souvient Jeanne Beaudoin, Franco-Yukonnaise de longue date. « J’étais jeune maman et je parlais français à mon fils. Christian m’a entendu et il m’a parlé. Nous sommes restés en contact. C’était toujours un plaisir de le voir. »
Membre de l’Association franco-yukonnaise (AFY) depuis 1984, il s’engage activement au sein de l’organisme en 1997 à titre de gérant bénévole du projet de construction du Centre de la francophonie. Il collabore notamment avec l’architecte pour s’assurer que les plans répondent bien aux besoins de la communauté. « Christian était un homme bon et doux, très généreux de son temps. Il a siégé au CA de l’AFY alors que j’étais à la direction de l’AFY. Il était membre assidu du comité de construction du Centre de la francophonie. Il avait déjà été gérant de projets de construction du gouvernement du Yukon », partage Jeanne Beaudoin.
Après une absence de huit mois pour explorer le monde avec son épouse, il revient au Yukon en 2000. D’abord membre du CA de la Société des immeubles franco-yukonnais (SIFY), il en devient son président en 2002 et demeure à ce poste jusqu’à la fusion des CA de la SIFY et de l’AFY en 2006. Il a par la suite siégé au CA de l’AFY.
De leur côté, Patricia Brennan et Philippe Cardinal, deux de ses ami·e·s, mentionnent à l’unisson : « Que ce soit pour une rencontre pour les cafés de l’amitié ou pour une randonnée, Christian était toujours là pour les activités en français. » Au-delà de souligner son goût pour les desserts et sucreries qu’il apportait toujours pour les repas-partage des randonnées des P’tits Mollets, les deux s’entendent pour dire que Christian était toujours d’une grande générosité. « Même à l’hôpital, il me demandait des nouvelles de nos projets et des enregistrements des balados », se souvient Philippe Cardinal, qui gère notamment les lectures d’articles pour les balados de l’Aurore boréale.
En 2016, Christian Klein participe au projet Histoires de Guerre, relatant les expériences de personnes aînées du Yukon qui ont connu la guerre étant enfant. Suite à cela, il est invité à l’Académie Parhélie à l’occasion de la Journée du souvenir, le 11 novembre 2017, pour partager son expérience auprès des jeunes de l’école secondaire.
Le site Web est toujours disponible et il est possible de voir les photos et l’enregistrement vidéo de Christian Klein sur histoiresdeguerre.afy.ca/profil/christian-klein.
Le 7 mars 2022, il a envoyé au journal un message à l’intention des personnes qui lui avaient fait parvenir une carte à l’hôpital : « Des membres de l’AFY m’ont fait apporter en fin de la semaine dernière une belle “petite” carte pleine de souhaits et de bons vœux pour un rétablissement de mon cancer que le service médical venait de me découvrir. Comme je ne peux pas remercier individuellement chaque nom sur cette carte, je me suis proposé l’aide de notre journal francophone. À tous je vous dis donc merci pour vos pensées et bons mots à mon égard. Avec mon âge, je ne crains pas de partir vers d’autres cieux sans guerres, violences, mensonges […] » Christian Klein est devenu membre honoraire de l’AFY en 2022.
La famille de Christian indique qu’une célébration de la vie sera annoncée à l’approche du premier anniversaire de sa mort.
« Vous pouvez honorer la mémoire de Christian en prenant un moment pour être reconnaissant envers cet endroit merveilleux où nous vivons et en aidant quelqu’un dans le besoin », peut-on lire dans sa nécrologie.