Fin avril, l’exposition finale des étudiants de l’École des arts visuels du Yukon (School of visual arts – SOVA) a eu lieu dans les galeries du Centre culturel Dënäkar Zho et de l’École Yùhke Zho.
Cette année, l’École a offert des cours théoriques en ligne, tout en proposant des ateliers pratiques respectant les mesures de distanciation sociale. « C’est un miracle d’avoir pu proposer une exposition en galerie en cette année particulière, s’enthousiasme la directrice des programmes, Aubyn O’Grady. Les cours sont tous les ans, mais nous avons vraiment dû nous adapter », ajoute-t-elle. « J’ai toujours voulu aller dans une école d’art. Quel meilleur moment que pendant une pandémie? », s’amuse l’étudiante Stormy Bradley.
Une exposition aux œuvres hétéroclites
Les instructeurs ont poussé les étudiant.e.s à explorer différents moyens d’expression, les encourageant à utiliser la conceptualisation et l’émotion en se détachant de la théorie. « Je me suis focalisée sur ce qui aiguisait ma curiosité artistique enfant, le sentiment de triomphe absolu que je ressentais en créant des choses sous la table de cuisine. En grandissant, l’art était devenu trop technique », relate l’étudiante sculpteure Page Cowell.
Les onze étudiant.e.s, agé.e.s de 18 à 72 ans, ont pu exposer peintures, collages, photographies, sculptures, pliages, montages photographiques, œuvres participatives, vidéos, albums et vêtements. Certains livres artistiques ont rejoint la bibliothèque permanente de l’école, comme celui de Melissa Naef, A Dad’s day off. « [Il s’agit d’]une collection de clichés de mon père passant du bon temps sur le fleuve Yukon. La couverture est un gilet de sauvetage, les pages sont plastifiées, l’album est hermétique à l’eau et présenté dans une glacière avec des bières », explique la photographe.
L’exploration de nouveaux secteurs artistiques a aussi permis aux étudiant.e.s de se révéler. « J’ai appris tellement de compétences nouvelles et intéressantes à incorporer dans ma pratique traditionnelle », commente Stormy Bradley, artiste perliste. « J’ai beaucoup appris, sur moi-même et sur le monde qui m’entoure », complète Melissa Naef.
Amitiés et communauté au cœur de l’exposition
Les étudiant.e.s ont développé des amitiés fortes et un sens commun de la création. « La plupart du temps, mon travail est un reflet de mes relations humaines – à la maison et interpersonnelles – et de l’identité », précise Melissa Naef. « Je me suis fait des amis pour la vie », ajoute Stormy Bradley.
De nombreuses œuvres finales exposées mettent ainsi de l’avant les élèves de la promotion, telle la série de portraits Aura de Melissa Naef ou la sculpture de Page Cowell Culmunation in Accumulation, présentant dix échantillons de cultures pris sur les étudiants. « L’individu se forme sur une longue période avec différentes expériences, comme une accumulation quotidienne. Ces expériences peuvent être invisibles, mais se développent avec le temps comme les germes, grandissant et devenant des magnifiques âmes distinctes », explique-t-elle.
L’École étant située au cœur du Klondike, la nature et l’art autochtone étaient très présents dans la formation via des ateliers, sorties et conférences virtuelles. « J’ai choisi SOVA étant intéressée par l’art autochtone, la communauté et le mode de vie du Grand Nord », admet l’étudiante Abigail Clapper. L’artiste Jackie Olson a notamment pu initier les élèves à la création de papier et d’œuvres sculptées à partir de fibres naturelles du territoire. Stormy Bradley, autochtone du Clan Corbeau, a proposé une œuvre finale qui lui ressemble. « J’ai créé un châle de cuir d’orignal que j’ai tanné et orné de perles », indique-t-elle. « L’exposition finale est d’une qualité exceptionnelle pour des étudiants de première année, surtout avec les défis qu’ils ont dû relever », résume Aubyn O’Grady.