Reconnecter l’être humain à la nature par l’art, telle est la quête de Marten Berkman qui répond à l’industrialisation envahissante des grands centres. Son exposition, Remote Sensibility VIII : the ecology of Perception, dévoile ainsi l’essentiel de cette force créative qui ne cesse d’animer l’artiste yukonnais.
Marten Berkman est formel : « Cette exposition est une œuvre du cœur qui a commencé il y a bien longtemps », confie-t-il en s’apprêtant à entrer dans la galerie d’art du Centre des arts du Yukon où y est présentée sa plus récente exposition. Dès le seuil de l’entrée franchi, nous voilà immergé dans l’émotion visuelle et sonore du territoire nordique à travers des installations multimédias de l’artiste.
« Enfin! Les gens vont avoir une meilleure idée de ce qui m’habite », lance-t-il, visiblement heureux de partager son univers.
Se reconnecter par l’art
Dès son arrivée au Yukon en 1990, ce Québécois d’origine n’a pas tardé à se faire remarquer grâce à la qualité de ses photos illustrant diverses scènes nordiques.
Ce n’est toutefois qu’à l’été 2003, lors d’un voyage en canot sur les eaux de la rivière Peel au Yukon, que le regard de l’artiste se posera pour la première fois au-delà du paysage pour s’orienter davantage vers la relation de l’être humain à la nature. Cet épisode marque le début d’une longue réflexion qui se matérialise aujourd’hui à travers les œuvres de sa récente exposition. « Je réalise aujourd’hui que le milieu urbain et industriel de Montréal, ma ville natale, m’a toujours amené à chercher une connexion avec la terre dont j’étais coupé », confie-t-il. « J’aimerais aujourd’hui, par mon art, permettre aux gens des milieux urbains de vivre à leur tour l’expérience d’une connexion avec la nature qui n’est pas présente dans leur environnement », explique Marten Berkman. Désormais, il estime pouvoir arriver à ses fins grâce à l’utilisation de la technique de l’image en stéréoscopie sur laquelle repose l’ensemble de son exposition.
La photo 3D
Depuis une quinzaine d’années, l’artiste intègre à ses photos et à ses vidéos l’image en stéréoscopie, c’est-à-dire l’utilisation de la photo en trois dimensions (3D). Cette technologie lui offre enfin le moyen de donner à l’image le sens de la présence qu’il cherche à reproduire depuis si longtemps. « Mes outils de travail ont évolué avec les ans. Aujourd’hui, la technologie me permet de sculpter l’image », précise-t-il.
Aux images spectaculaires des paysages nordiques, l’artiste a superposé différentes formes de témoignages de la relation vécue avec la Terre. C’est ainsi que des scientifiques, dont une astronaute, ont collaboré au processus de création! « L’idée d’intégrer l’astronaute Julie Payette est venue du scientifique et environnementaliste David Suzuki », lance-t-il visiblement heureux de ce clin d’œil vu de l’espace. « Cette suggestion permet de faire intervenir la réflexion que l’on porte à la Terre à un autre niveau », précise-t-il.
On retrouve également la participation d’artistes du Yukon, dont l’artiste visuelle de Joyce Majiski et la danseuse Michaëla St -Pierre, dont les œuvres s’inspirent grandement de leur relation au territoire. À cette longue liste de collaborateurs s’ajoutent les témoignages d’aînés de Premières Nations du Yukon.
La relation des Premières Nations à la Terre
Il était primordial pour Marten Berkman de collaborer avec des aînés Premières Nations dont les histoires et les traditions sont inspirées directement du territoire et de leur relation avec celui-ci. C’est ainsi qu’on peut entendre entre autres Jimmy Johnny, un aîné de Mayo grand défenseur de la rivière Peel au Yukon parler en langue Northern Tutchone des éléments de la nature. « Je lui ai demandé de s’exprimer dans sa langue, car il y a une beauté dans les langues des Premières Nations qui s’intègre entièrement avec la nature ».
L’exposition des œuvres de Marten Berkman est présentée à la galerie d’art du Centre des arts du Yukon jusqu’au 22 février. Une présentation publique par l’artiste, en français, aura lieu le 15 février à 10 h au Centre des arts du Yukon, et une autre présentation, cette fois en anglais, suivra à 11 h. L’entrée est gratuite.