Pour sa première exposition en solo, l’artiste Catherine Jamnicky a fait sensation avec ses treize œuvres qui dérangent, bousculent et interrogent. Plus de 120 personnes se sont déplacées lors du vernissage de l’exposition Wuthering Beauty qui a eu lieu le 5 avril 2019 à Arts Underground, à Whitehorse. Mot ancien et rarement utilisé aujourd’hui, « wuthering » désigne un vent turbulent et rugissant. « J’aime exprimer la férocité et un pouvoir ancien chez l’homme et la nature », assure l’artiste.
Chaque pièce présentée est élaborée à partir de matériaux collectés et conservés par Mme Jamnicky depuis de nombreuses années. Plumes, feuilles, bois, fourrure, mais aussi fer et artefacts achetés chez l’antiquaire Rustic North; tous ces matériaux prennent vie dans des compositions uniques qui ne laissent pas indifférent. La représentation humaine étant présente dans la plupart de ses œuvres, Mme Jamnicky explore le lien entre l’homme et la nature, mais aussi la frontière parfois invisible qui fait basculer la beauté vers les ténèbres. Influencée par ses nombreux voyages, l’artiste décrit elle-même ses créations comme « éthérées, terrestres, discordantes, stimulantes et fortes ».
Le processus de création
Mme Jamnicky travaille sur plusieurs pièces en même temps, car chaque processus créatif implique une phase initiale de déconstruction/reconstruction et un processus créatif inédit. « Chaque pièce défie mes habiletés techniques parce qu’il n’y a pas de modèle pour ce que je crée.
Chaque pièce est unique et implique de travailler avec des matériaux que je n’avais jamais utilisés avant », explique-t-elle. Parfois frustrée de ne pas savoir comment agencer les différents matériaux collectés, l’artiste ne sait jamais à quoi ressemblera sa création au final : « Je ne sais que très rarement où [ma création] va me mener. C’est à la fois excitant et parfois ma plus grande cause de frustration, car je ne sais pas comment assembler ou accrocher mes pièces. »
Pour la partie méticuleuse, elle utilise des aiguilles et colle morceau par morceau des feuilles ou d’autres matériaux jusqu’à recouvrir le visage (fait en polystyrène), et ainsi lui donner vie d’une façon parfois insoupçonnée. En effet, la colle utilisée sur l’une des pièces a endommagé le polystyrène et a créé des « cicatrices ». Ne pas maîtriser l’ensemble du processus, voilà peut-être le secret de création de Mme Jamnicky.
Le titre de chaque œuvre ne vient qu’une fois le processus terminé. Transhumanism, Belle of the bush; ces titres évocateurs d’un environnement bien particulier laissent la voie à l’interprétation. « Ce que j’aime le plus dans mon processus créatif est la concrétisation de mes nombreuses pensées qui vont et viennent lorsque je pense ou lorsque je découvre un artefact unique, un nouveau textile ou un morceau de bois dans la nature qui m’invite à lui donner une plus grande expression », déclare-t-elle.
Une influence éclectique
La nature et les voyages sont les principales sources d’inspiration de Mme Jamnicky, mais elle estime également que le styliste britannique Alexander McQueen, décédé en 2010 et surnommé « l’enfant terrible » en raison du côté provocateur de certaines de ses collections, a une influence sur ses créations. Mme Jamnicky admire ses créations à la fois belles et menaçantes : « Ses créations étaient dramatiques, tout comme ses défilés de mode théâtraux. Il a mélangé la mode avec l’art. »
Native de Montréal et installée au Yukon depuis 25 ans, Mme Jamnicky, qui a été impliquée auparavant dans la coopérative d’artistes Yukon Artists at Work, est maintenant membre de Arts Underground. Son exposition y est présentée jusqu’au 27 avril 2019.