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le Mercredi 9 mars 2016 15:35 Art et culture

Sal Capone, hip-hop et tragédie shakespearienne

Les acteurs de Sal Capone, tous issus de la culture du hip-hop. Photo: urbanink.ca
Les acteurs de Sal Capone, tous issus de la culture du hip-hop. Photo: urbanink.ca

Écrit par Omari Newton et produit par Urban Ink, Sal Capone : The Lamentable Tragedy of est une pièce de théâtre électrique, créée à Vancouver et Montréal en 2013 et 2014, qui suit un jeune groupe de hip-hop arrêté à la suite d’une violente fusillade de la police.

Newton, acteur originaire de Montréal, a été inspiré dans l’écriture de cette pièce par la mort de Fredy Villanueva en 2008, un jeune homme de 18 ans tué par un policier lors d’une altercation à Montréal-Nord. Sa mort a suscité l’indignation, des émeutes et de vives critiques envers le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM).

Du théâtre engagé

Sal Capone est un travail dynamique et nerveux contenant un fort message sociopolitique. C’est un portrait cru et honnête de l’amitié, de la perte et des choix que nous faisons lorsque la confiance est brisée.

Les acteurs de Sal Capone, tous issus de la culture du hip-hop. Photo: urbanink.ca

Les acteurs de Sal Capone, tous issus de la culture du hip-hop. Photo: urbanink.ca

« Le hip-hop a été pour moi la plus grande influence dans ma vie en tant qu’artiste », explique l’auteur. Sal Capone semble être une tragédie au sens shakespearien du mot. Comme dans Macbeth ou Hamlet, un acte de violence conduisant à un autre, plongeant ainsi les protagonistes dans une cascade d’émotions, de mots et d’actions violentes. Dans cette tragédie, les personnages ne sont pas des rois ou des princes, mais des jeunes privés de leurs pleins droits, de leur potentiel et de leur talent. Leur faiblesse n’est pas l’ambition ou l’indécision, mais la colère face à un système qui les stigmatise comme individus dangereux, et qui les déshumanise plutôt que de les protéger.

« Je suis une personne de couleur qui raconte une histoire à propos de personnes de couleurs », déclare Newton. Il y a beaucoup de sujets sensibles à démêler dans ce drame : le racisme, l’homophobie, le sexisme, la critique des médias, la pauvreté, l’abus de drogues, la prostitution, le traitement des Autochtones, de la toxicomanie à la technologie. Newton jongle avec les identités en jeu : Asiatique, Blanc, Noir, Premières nations, homosexuels, immigrants, pauvres, femmes, jeunes… Il souhaite ouvrir les yeux des uns et des autres d’une façon objective sur des situations subjectives. Les amoureux de la politique identitaire seront gâtés.

Une histoire de violence

L’affaire Villanueva, survenue en 2008, a poussé d’autres artistes à écrire et à créer sur le sujet. Ainsi, l’auteure Annabel Soutar a écrit FREDY, pièce de théâtre-documentaire mise en scène par Marc Beaupré et qui est présentée tout au long du mois de mars au Théâtre La Licorne à Montréal.

Mais revenons à notre tragédie shakespearienne. L’une des belles réalisations de Newton dans son scénario est sa capacité à traiter de la violence et de la culture sans avoir recours à une dichotomie manichéenne du noir et blanc, hip-hop = bon, la police = méchant. Marginalisés et mal compris, les personnages de Sal Capone échangent des mots de haine, se blessant les uns les autres avec « chintok », « pédé », etc. Ils comprennent que les mots sont des armes, souvent les seules armes dont ils disposent. Ces mots constituent l’unique soupape pour la violence qu’ils ressentent dans le but de repousser et de retarder la violence physique qui menace de sortir.

Vendredi 18 et samedi 19 mars à 20 h au Centre des arts du Yukon.

Dans le cadre des Northwestel Art Lover’s Series.

Billets sur www.yukontickets.com