Lors de notre pause de deux semaines à San Diego, j’ai découvert par hasard dans un magazine hebdomadaire de la ville un article au sujet d’une artiste qui enseigne la céramique à des filles de 5 à 18 ans dans un orphelinat de Baja California appelé « Rancho El Faro ». L’histoire me touche et je découvre que l’artiste vit dans la région d’Ensenada. Par chance, la ville se trouve sur notre route et je décide de prendre contact avec elle par l’intermédiaire de son site Internet. Sa réponse enthousiaste me réjouit et dès la frontière mexicaine passée, nous nous dirigeons vers notre première entrevue en terre mexicaine.
Beliz Iristay est née et a grandi dans la ville d’Izmir en Turquie. En 2004, elle décide de partir pour les États-Unis, puis se fait un nom sur la scène artistique locale. Aujourd’hui, elle vit entre San Diego (Californie) et la vallée de Guadalupe à une quinzaine de kilomètres au nord d’Ensenada en Baja California. Son travail reconnu internationalement est visible à San Diego et à Izmir en Turquie. Mme Iristay est diplômée de la Faculté des beaux-arts de l’Université Dokuz Eylul avec une spécialisation en technique de la céramique turque. Aujourd’hui, elle produit des céramiques avec la technique raku et incorpore des gestes à la fois traditionnels et non traditionnels à ses œuvres. L’artiste continue d’explorer différentes façons d’enrichir son art sous des formes variées.
Aurore boréale : Où et quand avez-vous appris la céramique?
Beliz Iristay : J’ai appris la céramique à l’université de ma ville natale Smirna en Turquie de 1998 à 2003.
A. B. : Pourquoi avez-vous décidé d’enseigner la technique de la céramique aux filles de l’orphelinat?
B. I. : Je suis allée à la vente aux enchères d’art de la Fondation « Corazon de Vida » (Cœur de la vie). J’y ai découvert les histoires d’orphelines qui ont réussi à aller à l’université. Ces filles vivent des situations très difficiles. J’ai écouté leurs histoires avec beaucoup d’émotion et j’ai décidé d’offrir mon aide. Je pense que la céramique est un art avec une grande valeur thérapeutique.
A. B. : Pensez-vous que l’art fera une différence dans les choix de vie que ces filles feront?
B. I. : Oui, bien sûr! J’ai coordonné un projet avec les filles et je leur ai demandé de concevoir leur propre motif à partir de leur souhait. J’ai décidé d’utiliser le format du bougeoir, car au Mexique, les bougies sont considérées comme des capsules de désir. Pour ce projet, certaines filles ont exprimé le désir de devenir médecin ou faire partie de la police par exemple. Cela montre comment le processus artistique peut influencer le processus de questionnement parce que celui-ci devient thérapeutique.
A. B. : Pourquoi avez-vous choisi aujourd’hui de faire des céramiques raku?
B. I. : La technique du raku me fascine, car c’est un processus expérimental qui n’est jamais prédicable. Dans mon pays, la tradition de la céramique est belle, mais rigide. La technique du raku est à l’opposé, elle est organique et libre et apporte son lot de surprises, je me sens ainsi plus libre et hippie!
Deux techniques, deux façons de créer
Le raku est une technique de cuisson de la poterie développée au Japon au XVIe siècle lors de la cérémonie du thé dont le rituel était étroitement lié à la philosophie zen. On émaillait et on cuisait son bol avant de l’utiliser pour boire le thé. Actuellement, cette technique est utilisée pour la réalisation de diverses poteries allant du simple bol à la sculpture la plus complexe en passant par des vases, coupes ou toutes créations issues de l’imagination du potier.
L’art de la céramique en Turquie
La pâte employée pour la fabrication de la céramique d’Iznik est siliceuse et contient également du plomb. Le plomb y est ajouté afin de baisser la température de cuisson de la céramique. La cuisson de la céramique d’Iznik dure environ vingt heures. Après cuisson, un refroidissement de sept jours intervient. Ce refroidissement permet d’éviter l’apparition de craquelures en surface de la céramique. n
Correspondante de l’Aurore boréale et spécialiste des Premières nations du Yukon, Nelly Guidici s’est lancée sur les routes d’Amérique avec son conjoint et leur petite fille. Retrouvez chaque mois son carnet de voyage dans les pages de votre journal communautaire ainsi que sur son blogue.