le Lundi 13 janvier 2025
le Jeudi 9 janvier 2014 10:30 Art et culture

Artistes francophones: L’art de survie en jungle

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Jean-Pierre Dubé, collaboration spéciale, APF

Les artistes font des choix : ils acceptent la folie du métier à condition de faire ce qui les passionne. Leur autonomie impose souvent d’énormes pressions et compromis.

La situation des artistes est documentée dans une étude publiée le 2 décembre par la Fédération culturelle canadienne-française, intitulée Un regard actuel sur la situation des artistes de la francophonie canadienne. La recherche de Anne Robineau, de l’Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques, révèle entre autres que les artistes francophones ont plus de scolarité mais moins de revenus que la population active.« On ne vit pas gras, on fait des choix difficiles. Je n’ai pas de télé et je ne peux pas partir en vacances dans le Sud. J’ai une vie simple parce que je mets tous mes sous dans la musique. »Janie Myner, pianiste et chanteuse de jazz ‘hybride’, Vankleek Hill (ON)

La mère de deux enfants est ergothérapeute de formation. « Comme entrepreneure, j’ai goûté à l’argent. J’ai travaillé 80 heures par semaine jusqu’à ce que ma santé y passe. À la fin, je me suis dit : je suis le hamster dans la petite roue ou je fais ce que j’aime?

« C’est une décision très consciente que j’ai fait il y a cinq ans. Ce n’est pas lucratif, travailler 16 heures par jour sans être payée. Quand je fais un gig, je partage ma paie. Les musiciens sont mieux payés : ils arrivent, montent sur scène, jouent et rentrent chez eux.

« Si je veux enregistrer une chanson, je loue un studio à 80 $ de l’heure. Je ne fais jamais ça comme salaire! Quand je négocie un contrat, on va me payer juste mon temps sur les lieux. Ça n’inclut jamais le temps que j’ai passé à me préparer. »

Autodidacte? « Je suis auto-toute! Il n’y a pas d’industrie de la musique : on a quelques producteurs et éditeurs, deux labels mais pas d’investisseurs. Alors on est obligé de se produire nous-mêmes. Je passe mon temps à préparer des demandes de subvention. Les artistes, on est les moins bons à se vendre, mais on dépend de ça pour survivre.

« Je ne peux pas tout faire et être partout. Il y a des normes d’éthique qui font que, comme artiste, je ne peux pas juste cogner à ta porte et dire : viens voir mon show. Ça ne se fait pas. Mes réseaux sont très importants, je suis spécialiste du Web, de Twitter et de Facebook.

« Beaucoup de monde pense qu’on fait de la musique parce qu’on sait pas faire autre chose. L’artiste est la personne au monde qui se fait le plus souvent dire non. Toutes les excuses sont bonnes. C’est un monde très dur, les gens n’ont pas de parole. »

Des espoirs? « Je veux pas devenir la plus grande vedette de la planète. Je veux juste être respectée pour mon travail et avoir les moyens de vivre de mon art. »

Julie Lebel, chorégraphe et danseuse contemporaine, Vancouver (CB)

« Avant les enfants, j’avais un travail à temps partiel. Après, je suis restée à la maison parce que je suis le parent qui gagne le moins. La garderie, ça coûte 80 $ par jour. Je réussis à travailler parce que j’ai un réseau incroyable autour de moi. C’est surtout la fin de semaine, quand mon conjoint ne travaille pas. »

Les jumelles ont trois ans et demi. « Le rythme a ralenti à l’essentiel. J’ai quelques projets, comme une résidence dans un centre des arts, le dimanche après-midi. J’ai un mentorat avec une artiste établie et j’apprends de son travail. Le rythme est négociable.

« J’ai un projet de danse dans la communauté, explique la Québécoise d’origine. On danse avec les enfants de parents artistes, des enfants de 0 à 4 ans. C’est très nourrissant : je lie mes deux réalités.

« Quand je fais des demandes de subvention, ça complique les choses. Je n’ai pas le temps, vraiment, mais il le faut pour du revenu. Dépendant des années, j’ai connu une baisse de 50 %. Une partie de mon travail est de demander des fonds et de les distribuer. Dans toutes les études sur les artistes, c’est toujours la danse qui est le parent pauvre.

« La danse contemporaine, c’est un art en développement (de création et de public) qui est moins apprécié et subventionné. Mais on voit de plus en plus des artistes qui ont des partenariats avec le secteur privé. Moins ils ont d’aide gouvernementale, plus ils deviennent créatifs dans la recherche de revenu. »

Julie Lebel est membre de la Canadian Alliance of Dance Artists. « Du travail de fond se fait pour le statut des artistes. Depuis 2008, il y a un salaire minimum établi et accepté dans la province. C’est très bon d’être appuyé par une communauté. »

Des espoirs? « Je voudrais être une artiste à temps plein et être capable de loger ma famille. C’est difficile, surtout à Vancouver. Quand on voudra déménager, ça va coûter le double. Peut-être que je deviendrai enseignante, c’est super intéressant d’enseigner. »

Légende : La chanteuse Janie Myner (Photo : Claude Brazeau).