Selon l’article Géographie du Yukon de l’Encyclopédie canadienne, il y a plus de 600 kilomètres de lacs interreliés au territoire. En ajoutant les nombreuses rivières yukonnaises et les lacs indépendants comme Chadburn à Whitehorse, on obtient un terrain de jeu aquatique immense.
Des rapides de la rivière Watson ou Lapie à la sérénité des lacs Snafu ou Tarfu, en passant par les rivières reculées accessibles uniquement en hydravion comme la Peel ou la White, il y en a pour tous les goûts.
Commencer le packraft
N’ayant pas la place d’entreposer un canot ou un kayak, Alexandre Mischler, technologue en hydrologie au gouvernement du Yukon et passionné de plein air, a opté pour la compacité et la stabilité d’un packraft en 2017. « C’est un peu plus facile pour commencer l’eau vive. Le bateau est plus stable qu’un kayak. Y’a moins de chance de se retourner », résume-t-il. Il attire d’ailleurs l’attention sur ce point : « Comme le bateau est permissif, il va permettre d’aller dans les rapides sans avoir forcément la technique ou le niveau de confort. On peut rapidement se retrouver dans des situations dangereuses. »
Débutant, Alexandre Mischler se familiarise avec sa nouvelle embarcation. « J’ai dû apprendre à pagayer avec ce type de bateau. C’est différent, car c’est comme une sorte de bouée, ça se dirige mal! », explique-t-il. Sur le lac Chadburn, il s’entraîne à sortir du bateau et à remonter dedans sans devoir nager jusqu’à la rive. Puis il s’inscrit à l’un des cours de sécurité en eaux vives du territoire, avant d’aller pratiquer dans le fleuve Yukon, notamment sur le canyon Miles.
Une fois confiant, épaulé par des proches qui savaient pagayer, il s’essaye sur la rivière Takhini, à environ une heure de Whitehorse. « C’est un mélange avec des zones relativement faciles et quelques difficultés avec des roches, les Jaws et quelques arbres en plein milieu. C’est une bonne introduction à l’eau vive », précise-t-il.
Il rappelle qu’en packraft, on accède souvent à des endroits reculés, loin des routes, sur des rivières peu naviguées et sur lesquelles il y a moins de données. Avant de partir, il est donc essentiel de prévenir des proches de sa destination, tout comme d’emporter un moyen de communication.
Découvrir le kitesurf
La Franco-Yukonnaise Luanda Pronovost, 20 ans, s’est illustrée en canot et en kayak pendant son adolescence, participant à des compétitions nationales. Son niveau a été reconnu par les prix du gouvernement du Yukon pour l’excellence sportive dont elle a été lauréate en 2019. Mais c’est finalement le kitesurf, ou planche aérotractée, qui a gagné son cœur. « J’habite dans une maison à Carcross. Mon père m’a initiée quand j’avais 13 ans et je n’ai jamais arrêté », détaille-t-elle. En 12e année, elle intègre une école privée, la World Class Kiteboard Academy, où elle voyage dans le monde assouvir sa passion.
« J’adore être dans l’eau, et ce que j’aime vraiment du kitesurf, c’est que tu continues tout le temps de progresser. Il y a toujours quelque chose à apprendre! », détaille-t-elle.
Pourtant, cette discipline n’est pas facilement accessible. Si l’investissement financier nécessaire pour s’équiper est important, c’est surtout la technique qui est délicate à maîtriser. « C’est difficile d’apprendre tout seul parce que ça peut vraiment être dangereux. On ne peut pas juste louer de l’équipement et se lancer. Le mieux, ce sont des leçons, mais elles sont vraiment chères, et il n’y en a pas au Yukon », constate Luanda Pronovost.
Pour les personnes qui pratiquent déjà le kitesurf donc, Luanda Pronovost recommande, au Yukon, le lac Bennett à Carcross. « La géographie du lac donne une bonne thermale, un vent optimal », observe-t-elle. Selon la jeune femme, le plus important est la consistance de sa force. Avant toute sortie, elle vérifie donc les prévisions météorologiques car les conditions de vent vont avoir un impact sur la grandeur d’aile du kitesurf qu’elle utilisera.
Se détendre, s’exercer et travailler son équilibre sur une planche à pagaie
Les adeptes de planche à pagaie se tiennent debout sur une planche, se propulsant sur l’eau avec une pagaie. Kayléanne Leclerc, passionnée de surf et d’escalade, s’y est mise sérieusement à son arrivée au Yukon en 2022. « Au Québec, je faisais surtout du surf de rivière. Quand je suis arrivée à Whitehorse, il n’y en avait pas, et je ne faisais pas de canot. Alors j’ai acheté un paddle board, car c’est un bon entre deux », constate-t-elle.
Selon elle, la planche à pagaie permet une multitude d’activités, allant de la balade sur un lac, à une descente de rivière, en passant par des excursions de plusieurs jours. Sa sortie préférée est d’aller pique-niquer sur les petites îles au large du lac Atlin. « Ça ne serait pas accessible sans paddle. Cela me permet d’explorer de nouveaux endroits. Souvent, avec mon copain, on trouve des places secrètes, on amène nos livres et on relaxe. On bronze, on regarde les poissons, on chill », raconte-t-elle.
Depuis quelques années déjà, des disciplines plus aériennes se développent sur la planche à pagaie. Sa stabilité permet par exemple de réaliser des postures d’équilibre et de yoga, avec une difficulté supplémentaire par rapport à la terre ferme. « Pour moi qui fais beaucoup de sport qui nécessite un bon gainage, comme le surf ou la slackline, l’équilibre est venu naturellement sur un paddle. J’imagine que ça peut être impressionnant la première fois, mais on n’est pas obligé d’être debout! On peut juste se mettre à genoux et profiter pareil », précise Kayléanne Leclerc.
Certaines personnes utilisent aussi la planche à pagaie pour aller méditer au milieu d’un lac. Bercées par le clapotis de l’eau, elles y trouvent une sérénité renouvelée.
Même si l’activité est davantage assimilée à la détente, Kayléanne Leclerc rappelle qu’il peut être dangereux de s’aventurer sur certains lacs lors de vents forts, puisque des vagues s’y formeraient. En cas de chute, une sangle attachée à la cheville permet de rester proche de la planche.
S’initier à l’immersion en eau froide
« Quand on pense à la plongée sous-marine, on pense souvent à la barrière de corail et aux poissons exotiques. Au Yukon, on me demandait ce que je recherchais quand je plongeais », annonce d’entrée de jeu Valérie Girard, une triathlonienne franco-yukonnaise qui adore jouer dans l’eau. « C’est sûr que la sensation d’être en apesanteur dans l’eau, c’est toujours intéressant. Mais c’est surtout le microscopique que je regarde. Dans le fond sablonneux du lac Chadburn, il y a des petits planctons rouge-vert, ou de petits escargots. Il y a aussi des troncs d’arbres avec des algues », raconte-t-elle.
Valérie Girard a longtemps pratiqué la plongée sous-marine – avec scaphandre –, avant de se tourner vers d’autres activités d’immersion. « C’est un sport qui demande beaucoup et qui ne laisse pas de place à l’erreur. J’ai vu l’effet de la fatigue quand j’étais sous l’eau et j’ai décidé d’arrêter la plongée sous-marine, mais pas ma connexion avec l’eau », détaille-t-elle.
La nageuse pratique l’immersion en eau froide de plusieurs manières : de la trempette de plusieurs minutes pour se relaxer, méditer et contrôler sa respiration, à une plongée en apnée pour aller à une grande profondeur le plus longtemps possible, en passant par le snorkelling avec palmes, masque et tuba pour explorer la surface d’un lac.
Pour elle, l’exploration aquatique par immersion en eau froide est unique. Gratuite, elle est accessible à tout le monde et peut être pratiquée n’importe où au Yukon, même en hiver avec quelques adaptations. « Mon objectif est d’éduquer les gens sur les avantages de ces pratiques, afin qu’ils puissent explorer et profiter de leur environnement aquatique en toute sécurité et dans le respect de la nature », prône-t-elle.
Il ne faut cependant pas négliger l’équipement. Dans les eaux froides du Yukon, une combinaison en néoprène sera utile pour les personnes qui souhaitent nager longtemps. Une bouée de flottaison colorée, à attacher à la taille, permet d’être visible des embarcations à moteur.
Apprendre le Swimrun
Le Swimrun est une discipline venant de Suède. Aux débuts des années 2000, quatre amis ont souhaité parcourir le chemin entre deux hôtels situés sur deux îles différentes. Pour relever ce défi, ils ont dû alterner course et natation. Le Swimrun était né.
Marc Champagne, Franco-Yukonnais adepte de nombreux sports aquatiques, nage et court en sentier depuis de nombreuses années. « Un jour, sur les médias sociaux, je suis tombé sur une vidéo de Swimrun. Ça venait chercher mes deux passions. […] Ça a tout de suite piqué mon intérêt », se remémore-t-il.
Il commence alors à explorer les environs de Whitehorse pour tracer des parcours passant par des petits lacs, comme Chadden, Chadburn ou Hidden. S’il n’y a pas de distances préétablies pour joindre un point A à un point B dans ce sport, il y a néanmoins plusieurs segments de course en sentier et de nage en eau libre qui s’alternent.
« Tu t’aventures sur des sentiers, puis tu nages dans des lacs où tu ne nagerais pas autrement, car ils sont souvent très petits donc pas intéressants pour une longue nage. […] En Swimrun, on profite donc du fait qu’on peut nager là pour couper à travers. C’est vraiment amusant! Quand il fait chaud, c’est magnifique parce qu’on se réchauffe en courant et on se rafraîchit en nageant », détaille-t-il.
En juillet 2021, Marc Champagne crée le groupe Facebook « Swimrun Yukon » pour annoncer les prochaines sorties de groupe, mais surtout pour trouver des partenaires d’entraînement. Car la grande particularité de ce sport, c’est qu’il se pratique en duo. « Que tu nages ou que tu cours, tu dois toujours être à moins de cinq mètres de ton partenaire », explique-t-il. « Pour la nage, tu peux t’attacher avec une corde élastique, car avec les vagues, ça peut être difficile de rester ensemble. »
Au niveau du matériel, tout est permis, mais l’équipement choisi doit être transporté du début à la fin. « On a un outil de flottaison entre les jambes pour mieux soulever les pieds parce qu’on ne peut pas vraiment les utiliser pour se propulser dans l’eau avec les souliers. Donc la plupart des gens attachent à leurs mains un genre de gant en plastique pour agrandir leur surface et nager plus rapidement », clarifie Marc Champagne.
Il est à noter que cette liste de sports sur ou dans l’eau n’est pas exhaustive. Au Yukon, il est aussi possible de sortir en rafting, en vélo sur l’eau ou même en voilier.
Pour une pratique sécuritaire de l’eau vive : les conseils de Trevor Braun, propriétaire de yukan canoe depuis 1999
1/ Avoir les compétences pour l’endroit où l’on pagaie
Selon Trevor Braun, il est très facile de surestimer ses compétences. Suivre des cours ou apprendre avec des gens qui savent vraiment pagayer est essentiel. « Les embâcles de bois et les passoires, des arbres tombés en travers de la rivière sont les plus grands dangers que nous avons au Yukon. Ce danger existe aussi sur les rivières lentes et considérées comme faciles! », détaille-t-il.
2/ Effectuer des recherches sur l’endroit où l’on pagaie
Ces recherches permettent de comprendre les dangers inhérents spécifiques de la rivière que l’on souhaite pagayer.
3/ Planifier, être prêt et avoir un plan B
Trevor Braun conseille de toujours aller pagayer avec d’autres personnes et d’emporter le bon matériel. « Les combinaisons étanches sont conçues pour te garder entièrement au sec. Il n’y a pas de choc thermique si tu rentres en contact avec l’eau. C’est plus sécuritaire, plus confortable, mais dix fois plus cher qu’une combinaison isothermique [une combinaison en néoprène qui permet, quand on bouge, de réchauffer la fine couche d’eau entre la peau et la combinaison] », explique-t-il.
Le port d’un gilet de sauvetage est obligatoire au Yukon. Pour une pratique la plus sûre possible, le pagayeur suggère d’y accrocher un sifflet et d’y intégrer un kit étanche pour allumer un feu qui permettra de se réchauffer en cas de retournement. D’autres éléments intéressants à avoir avec soi sont un couteau, une collation et une barrière respiratoire si l’on doit pratiquer une réanimation cardio-pulmonaire sur une autre personne.
4/ Passer un bon moment
« Si tu commences à avoir peur ou à être trop nerveux, c’est que tu es probablement au-dessus de ton niveau de compétence », conclut-il.