Rencontres entre le pape et les peuples autochtones
Le dialogue entre les peuples autochtones du Canada et l’Église a pris un nouveau tournant cette année. La visite des trois délégations des Premières Nations, des Inuits et des Métis au Vatican en mars 2022, ainsi que la visite papale au Canada en juillet 2022 représentent une étape majeure sur la voie de la réconciliation.
Au Vatican, les trois délégations ont eu l’occasion, lors d’audiences privées distinctes, de parler au nom des milliers de survivants des systèmes des pensionnats et des mauvais traitements subis dans ces institutions gérées par les Églises catholique et anglicane. Le pape François a présenté ses excuses aux délégations le 1er avril 2022, et il a renouvelé son message lors de sa visite au Canada, où il a notamment rencontré plusieurs survivants à Iqaluit au Nunavut, lors d’une escale de quelques heures le 29 juillet 2022.
Cependant, les réactions sont mitigées. Murray Sinclair, ancien commissaire en chef de la Commission de vérité et réconciliation, estime que ces excuses, somme toute importantes, sont superficielles, car elles omettent de souligner expressément le rôle joué par l’Église dans les institutions des pensionnats canadiens.
Pour Piita Irniq, ancien homme politique du Nunavut ayant rencontré le souverain pontife lors de son escale au Nunavut, les excuses formulées ce jour-là devant 1 000 personnes étaient sincères et significatives.

Aluki Kotierk, présidente de l’organisme Nunavut Tunngavik Incorporated, estime que les rencontres avec la conseillère diplomatique du ministre de la Justice Éric Dupont-Moretti, les Oblats et M. Rivoire sont décevantes. Selon elle, « la vérité inuite doit être entendue et les Inuits méritent justice ».
L’affaire du prêtre Rivoire prend une tournure inattendue
En 1993, quatre plaignants du Nunavut se manifestent et soutiennent qu’entre 1968 et 1970, le père Rivoire les avait sexuellement agressés, alors qu’ils étaient enfants. Ayant la double nationalité, le père Rivoire quitte alors le Canada pour se réfugier en France. En mars 2022, une demande d’extradition a été faite au gouvernement français par le service des poursuites pénales, et a contribué à la relance de ce dossier judiciaire, qui était en suspens depuis 2018. Le 13 septembre 2022, la chancellerie a refusé la demande d’extradition et a motivé sa décision par une tradition constitutionnelle : la France n’extrade pas ses ressortissants.
Cette décision a été prise et communiquée à la délégation inuite de cinq personnes, formée par la société Nunavut Tunngavik Incorporated, en visite en France dans le cadre de cette affaire. Les Missionnaires Oblats de Marie Immaculée (OMI) ont par ailleurs annoncé le 8 septembre 2022 avoir mis en place une procédure canonique de renvoi à l’égard de M. Rivoire.
Selon Ken Thorson, membre des OMI du Canada à Ottawa, Johannes Rivoire doit faire face aux accusations qui ont été portées contre lui, mais, à ce jour, la procédure de renvoi, dont le processus peut prendre plusieurs mois, est toujours en cours.
Les victimes et membres des familles de victimes de Johannes Rivoire ont demandé à l’avocate du barreau de Lyon, Maitre Nadia Debbache, de déposer une plainte auprès du procureur de la République de Lyon à l’encontre des OMI. Cette plainte, qui est en cours de préparation, a pour but de dénoncer l’impunité de l’Église face à la justice selon Maitre Debbache.
L’invasion de l’Ukraine par la Russie : fin de la zone d’exception?
Par le passé, l’Arctique a longtemps été vu comme un endroit d’exception en relations internationales, grâce à l’étroite coopération entre les États membres du Conseil de l’Arctique. Depuis le 24 février 2022, cette réputation est grandement écornée. Après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le Conseil de l’Arctique, sous la présidence russe jusqu’en 2023, a décidé de suspendre toutes ses activités et discussions. « Les principes fondamentaux de souveraineté et d’intégrité territorialaux, fondés sur le droit international, sous-tendent depuis longtemps les travaux du Conseil de l’Arctique. […] À la lumière de la violation flagrante par la Russie de ces principes, nos représentants ne se rendront pas en Russie pour les réunions du Conseil de l’Arctique », ont déclaré le Canada, la Finlande, l’Islande, le Danemark, la Norvège, la Suède et les États-Unis dans un communiqué conjoint. Depuis, plusieurs autres organismes de l’Arctique ont annoncé la suspension des liens diplomatiques avec Moscou, comme le Conseil nordique des ministres, le Conseil International Gwich’in et le Conseil des États de la mer Baltique. La présidence étant tournante tous les deux ans, le prochain pays à prendre les rênes du conseil serait la Norvège, en mai 2023.
À ce jour, les réunions du Conseil de l’Arctique sont toujours en suspens et le conflit en Ukraine se poursuit après plus de 320 jours de combats qui ont fait près de 7 000 victimes parmi les populations d’Ukraine.
Minéraux critiques
En 2022, le Canada a déposé sa première stratégie sur les minéraux critiques, qui jette les bases de l’exploitation minière de 31 minéraux qualifiés de critiques en raison de leur importance dans la lutte contre les changements climatiques. Au sommet du Arctic Circle à Nuuk, au Groenland, en août 2022, les trois têtes dirigeantes des territoires canadiens ont martelé l’importance d’investir dans l’industrie minière en Arctique.
Pendant ce temps, aux Territoires du Nord-Ouest, la première mine canadienne de terres rares a exporté ses premiers minéraux concentrés. La mine Nechalacho, située à environ 110 kilomètres au sud-est de Yellowknife, a commencé la production en 2021. Il sera intéressant de suivre la progression d’autres projets miniers d’envergure dans les territoires en 2023, notamment la mine Casino, au Yukon.
Les cris d’alerte du climat
Le Svalbard, territoire au nord de la Norvège, a pulvérisé un record de chaleur à l’été 2022, selon les données de l’institut météorologique du pays. Plus près de chez nous, le bilan est loin d’être plus reluisant. Les données d’Environnement et Changement climatique Canada montrent qu’entre le 1er juin et le 22 août, 166 records de température quotidiens ont été battus dans les trois territoires, dont 92 au Nunavut, tel que rapporté par Radio-Canada en septembre.
L’agence américaine d’observation océanique et atmosphérique (NOAA) a quant à elle publié son dernier bulletin annuel de l’année en novembre, qui tente de décrire la trajectoire globale des changements dans l’Arctique. La conclusion est sans équivoque : « la température moyenne au-dessus de l’Arctique au cours de l’année (octobre 2021-septembre 2022) était la sixième plus chaude depuis 1900. Les sept dernières années sont collectivement les sept années les plus chaudes jamais enregistrées ».
Ce réchauffement climatique a déjà des conséquences profondes. Si les causes sont multiples, le climat a aussi été pointé du doigt après une année catastrophique pour le saumon quinnat, qui remonte chaque année le fleuve du Yukon en partant de la mer de Béring, en Alaska. La passe migratoire de Whitehorse n’a recensé que 165 saumons au cours de la saison estivale, comparativement à 274 à pareille date l’an dernier, alors que la moyenne depuis 1959 se tient à près de 1 000 spécimens.
Articles de l’Arctique est une collaboration des cinq médias francophones des trois territoires canadiens : les journaux L’Aquilon, L’Aurore boréale et Le Nunavoix, ainsi que les radios CFRT et Radio Taïga.