le Mercredi 22 mars 2023
le Jeudi 10 mars 2022 6:00 | mis à jour le 7 mars 2023 17:04 Francophonie

Loi sur les langues officielles : un petit pas de plus vers l’égalité réelle

La ministre des Langues officielles Ginette Petitpas Taylor a déposé le projet de loi C-13 sur la modernisation des langues officielles le 1er mars 2022. — Photo : Capture CPAC
La ministre des Langues officielles Ginette Petitpas Taylor a déposé le projet de loi C-13 sur la modernisation des langues officielles le 1er mars 2022.
Photo : Capture CPAC
Le 1er mars aura marqué la francophonie canadienne, et ce, au-delà des activités culturelles des Rendez-vous de la Francophonie. C’est le jour qu’a choisi la ministre des Langues officielles Ginette Petitpas Taylor pour déposer le projet de loi C-13 sur la modernisation de la Loi sur les langues officielles, qualifiant cette journée comme « historique ».

« On a attendu depuis longtemps, mais je pense que le jeu en valait la chandelle! », estime Jean-Sébastien Blais, président de la Commission scolaire francophone du Yukon (CSFY), enthousiaste. Il aura fallu attendre en effet plus de quatre ans pour que le projet de modernisation de la Loi soit déposé à la Chambre des communes.

Protection et promotion du français

Le projet, nommé Loi visant l’égalité réelle entre les langues officielles du Canada, a été plutôt bien accueilli au sein de la francophonie canadienne. Il comporte quelques différences avec sa première version, intitulée C-32, qui avait été déposée juste avant les élections fédérales et n’avait donc pas reçu de suite.

Ce projet de loi inclut « des gains substantiels », soutient la présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada, Liane Roy, par voie de communiqué. L’organisme applaudit en effet les mesures visant la protection et la promotion du français au pays. L’organisation acclame également le concept de « mesures positives que les institutions fédérales peuvent prendre pour mettre en œuvre certains engagements ».

Au Yukon, l’Association franco-yukonnaise (AFY) va dans le même sens et se dit enthousiaste au sujet de l’amélioration du projet de loi et solidaire avec les propos de la FCFA.

Soutenir l’apprentissage des langues officielles

Plusieurs points semblent ravir également le monde de l’éducation. « L’esprit de C-13 reconnaît l’importance du continuum en éducation pour les communautés en situation minoritaire, de la petite enfance jusqu’au postsecondaire », explique Jean-Sébastien Blais, qui mentionne toutefois que les moyens de mise en œuvre ne sont pas encore indiqués dans le projet de loi.

Le président de la CSFY soulève également un autre point positif dans l’analyse de ce projet : « Le projet propose des mesures légales pour obliger le gouvernement fédéral à dénombrer de manière systématique les enfants issus des ayants droit. »

Pour la CSFY, tout comme pour les institutions nationales en éducation, cela représente un enjeu majeur, permettant de donner des bases solides chiffrées afin de justifier les besoins en éducation dans les communautés de langue minoritaire.

Encore du pain sur la planche

Les organismes francophones à travers le pays ont aussi souligné du même souffle quelques bémols.

La FCFA, notamment, mitige ses propos en ajoutant que « certains éléments ne sont pas au point et [qu’il] faut y travailler avant de se dire mission accomplie ».

« Certains éléments sont absents du projet de loi, comme l’obligation d’inclure des clauses linguistiques exécutoires dans les ententes de transfert fédérales-provinciales/territoriales », explique la présidente de la FCFA.

Au Yukon, cela s’appliquerait à certaines institutions, notamment à l’Université du Yukon ou aux hôpitaux, pour lesquels le gouvernement fédéral a signé des accords de transferts avec le gouvernement territorial, qui n’abordent pas précisément la question des droits linguistiques.

« Dans un intérêt commun de protéger le français et de concrètement travailler vers une égalité réelle des langues officielles au Canada, nous encourageons [tous les partis à la Chambre des communes] à inclure l’obligation d’avoir des clauses linguistiques dans les ententes fédérales-provinciales/territoriales », soutient également la présidente de la Fédération de la jeunesse canadienne-française (FJCF), Marguerite Tölgyesi.

Pour Jean-Sébastien Blais, une autre déception se situe dans l’absence de majoration prévue par le projet de loi pour augmenter les financements en éducation en français.

Des rôles et pouvoirs à définir

« À la première lecture du projet de loi, nous sommes contents que le gouvernement ait été à l’écoute des besoins de nos communautés en ajoutant des éléments clés au projet de loi, soutient le communiqué de la FJCF, notamment l’ajout du pouvoir d’émettre des sanctions administratives pécuniaires par le Commissaire aux langues officielles, le renforcement supplémentaire des pouvoirs du Conseil du Trésor et l’ajout d’une nouvelle politique en immigration francophone plus détaillée dans le but d’augmenter l’immigration francophone vers les communautés francophones en contexte minoritaire. »

La FCFA, cependant, s’interroge sur le fait que le ministère du Patrimoine canadien conserve un rôle de coordination de la mise en œuvre de la loi, alors qu’il n’a pas autorité sur les autres ministères. Les recommandations qui avaient été émises par la FCFA visaient à désigner le Conseil du Trésor comme agence centrale chargée de la mise en œuvre de la loi.

À ce sujet, le député fédéral du Yukon, Brendan Hanley, a posé une question lors des débats de la Chambres des communes, le 4 mars dernier. « La Loi exige du mordant pour protéger ces droits. » a-t-il déclaré en français avant de demander quelles dispositions prévoyait le gouvernement pour la rendre « plus forte et plus efficace. »

« Notre modernisation de la Loi renforcera les pouvoirs du commissaire aux langues officielles, notamment en lui donnant les pouvoirs d’imposer des sanctions pécuniaires. De plus, pour la première fois, nous centralisons la coordination de la Loi sous un seul ministre qui aura accès aux ressources d’une agence centrale », a répondu le secrétaire parlementaire de la ministre des Langues officielles, Marc Serré.

Au Yukon, l’AFY a appuyé, dans un courriel à ses partenaires, « la décision de la FCFA du Canada quant au besoin de prendre le temps de mieux analyser le projet afin d’aller encore plus loin dans les changements ».

Un projet de loi en deux parties

Le projet de loi C-13 comporte, au-delà des modifications apportées à la Loi sur les langues officielles, l’édiction d’une nouvelle Loi sur l’usage du français au sein des entreprises privées de compétence fédérale. Celle-ci prévoit des droits et des obligations concernant l’usage du français en tant que langue de service et langue de travail relativement aux entreprises privées de compétence fédérale, dans un premier temps au Québec, puis à une date ultérieure dans des régions à forte présence francophone.

À présent, le projet fera l’objet de débats à la Chambre des communes et au Sénat, puis d’une étude au sein des comités permanents aux langues officielles dans les deux chambres. Tout n’est donc pas encore joué.

Changements apportés au projet de modernisation de la Loi sur les langues officielles depuis le dépôt du projet de loi C-32

  • Renforcement des pouvoirs du Conseil du Trésor;
  • Ajout d’un nouveau pouvoir au commissaire aux langues officielles;
  • Plus de détails à la politique d’immigration francophone;
  • Nouveaux droits au sein des entreprises privées de compétence fédérale;
  • Ajout de libellés qui énoncent l’importance des deux grandes communautés linguistiques du pays;
  • Prise de mesures positives par toutes les institutions fédérales;
  • Ajout à la Loi concernant les mesures d’urgence;
  • Ajout du caractère réparateur des droits linguistiques;
  • Appui à l’éducation dans la langue de la minorité;
  • Renforcement des dispositions de traduction des décisions judiciaires.

Source : Patrimoine canadien, via Francopresse

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