Après 25 années de loyaux et passionnés services au sein de l’Association franco-yukonnaise (AFY), Roch Nadon tire sa révérence de l’organisme porte-parole de la communauté francophone du Yukon. Nous avons saisi cette occasion pour souligner les apports qu’il aura initiés pour la communauté franco-yukonnaise.

Roch Nadon est arrivé au Yukon avec une formation en biologie. Rien ne laissait croire à l’époque qu’il dédierait 25 ans de sa vie au développement de la communauté franco-yukonnaise. Photo : Patric Chaussé.
Lorsqu’on rencontre une personne de la trempe de Roch Nadon sur son chemin, on ne peut faire autrement que de remercier sa bonne étoile. Son enthousiasme, sa générosité, son écoute et sa curiosité alimentent l’esprit de cet homme, dont le cœur bat au rythme de celui de sa communauté franco-yukonnaise.
Pourtant, Roch Nadon s’enlignait initialement vers une tout autre destinée, s’étant engagé pour une carrière en aménagement de la faune au Québec. Il était alors loin de se douter qu’un été passé au Yukon il y a près de 30 ans allait à jamais changer le sens de sa vie.
De Québec à Whitehorse
Le début de cette aventure, si nous devons déterminer un point de départ, remonte au printemps 1992. Roch Nadon et sa conjointe Danièle Rémillard, tous deux alors dans la jeune vingtaine, décident de mettre sur pause leur carrière en environnement pour quelques mois. À l’époque, des amis leur avaient vanté tant et si bien les beautés du Yukon qu’ils avaient décidé d’y faire un tour pour l’été.
« On voulait visiter et explorer le Yukon, puis retourner chez nous au Québec. Mais après quelques semaines seulement, nous avons changé tous nos plans et décidé de nous installer pour de bon au Yukon », raconte Danièle Rémillard.
Pourtant, ce printemps-là n’avait rien de séduisant. La temps maussade persistait tout comme le froid et la neige. Mais la rencontre de certaines personnes clés et d’une communauté francophone dynamique a rapidement charmé le jeune couple.
Il y aura eu entre autres la rencontre avec Carole Trottier, qui gérait les activités culturelles de l’AFY à l’époque. En 1992, l’organisme occupait les locaux de deux vieilles maisons de la rue Strickland. La plus petite des deux, la maison bleue, servait à la fois de bureau et de salle communautaire, où on accueillait depuis une deuxième année consécutive des cafés-rencontres du vendredi soir.
« Comme à leur arrivée Roch et Danièle se cherchaient un endroit où dormir, nous leur avons donné l’accès à la salle communautaire, où j’avais mon bureau. Ils dormaient donc techniquement dans mon bureau, se souvient Carole Trottier. En échange, ils me donnaient un coup de main avec les cafés-rencontres du vendredi soir. En fait, je les ai impliqués assez rapidement dans mes activités culturelles. Ça a toujours été agréable de travailler avec Roch. Il avait déjà un esprit communautaire très développé à son arrivée au Yukon et possédait les aptitudes nécessaires pour travailler dans ce domaine », ajoute-t-elle.
L’homme aux tâches multiples
En 1992, les locaux de l’École francophone Émilie-Tremblay et la Garderie du petit cheval blanc étaient situés à Riverdale. Le programme d’immersion française était également en place depuis près d’une dizaine d’années et la Loi sur les langues officielles venait d’être bonifiée. La communauté franco-yukonnaise commençait ainsi à prendre forme à travers différents projets rendus possibles à coups d’innombrables heures de bénévolat.
Homme d’action, Roch n’a d’ailleurs pas tardé à répondre « présent » à cet appel à la tâche. « Il m’avait approché à l’époque pour travailler de façon bénévole pour l’AFY, partage Pierre Bourbeau, qui était directeur général à l’AFY à ce moment-là. Je lui avais alors proposé un poste au conseil d’administration de l’organisme, mais, après six mois, il est revenu me voir un peu malheureux me demandant de lui trouver plutôt quelque chose de plus dynamique à faire sur le terrain. C’est à ce moment-là qu’il a commencé à aider à la Cabane à sucre, à l’émission de radio Rencontres et pour d’autres activités culturelles. Roch est un homme d’idées et passionné sur lequel on peut compter, et ce, depuis toujours. »
Pendant ses premières années au territoire, on verra Roch occuper différents emplois ici et là, dont à la Garderie du petit cheval blanc. Puis, il obtiendra un premier poste officiel à l’AFY en tant que coordonnateur du comité Espoir Jeunesse, mieux connu aujourd’hui sous le nom de Jeunesse Franco-Yukon (JeFY).
C’est d’ailleurs grâce à sa fougue et à sa détermination à ce poste que le Yukon posera sa candidature pour devenir l’hôte du Parlement franco-canadien du Nord et de l’Ouest en 2004. L’événement rassemblant les jeunes francophones et francophiles canadiens n’avait jamais eu lieu jusque-là dans l’un des territoires du pays.
« C’était incroyable à l’époque de penser pouvoir déplacer tous ces jeunes vers le Nord. Mais Roch y croyait. Il a été un grand ambassadeur pour le Nord, et si nous y allons aujourd’hui c’est grâce à lui », indique Josée Vaillancourt, directrice générale de la Fédération de la jeunesse canadienne-française.
À la fois une personne de terrain et de vision, il a démontré tout au long de sa carrière un leadership positif et collaboratif. Roch Nadon peut ainsi être dans la cuisine pour préparer le souper de Noël communautaire ou être en train de gérer une équipe de bénévoles pour la Cabane à sucre. Il peut aussi bien être affairé à écrire des demandes de financement, que de représenter son secteur, sa communauté ou son organisation auprès de politicien.ne.s ou de hauts fonctionnaires. Il est donc partout!
« Cet homme a une fibre paternelle dans son travail et dans sa façon d’aborder son rôle dans le développement communautaire, indique Jeanne Beaudoin, qui a été tour à tour collègue de travail, directrice puis présidente de l’AFY. Autant chez les francophones que chez les anglophones avec lesquels il a créé des partenariats importants qui ont permis d’offrir plus de variété dans la programmation culturelle en français au Yukon. En fait, le travail communautaire pour Roch ce n’est pas seulement un job, c’est presque une vocation pour lui », ajoute-t-elle.
Cécile Girard, qui était directrice de l’Aurore boréale à l’époque de l’arrivée de Roch au Yukon, se souvient du travail de cet homme au comité du journal franco-yukonnais. « Il a toujours été généreux de son temps pour le journal. C’est un homme intègre et solide. Il apportait au journal une vivacité qu’on lui connaît bien », souligne-t-elle. En entrevue, elle se remémore avec joie les célébrations du 15e anniversaire de l’Aurore boréale alors qu’il s’était proposé comme maître de cérémonie, déguisé en camelot enthousiaste pour l’occasion.
Un être au cœur communautaire
« Roch est le plus « Afyen » de nous tous! , confie sans hésitation Isabelle Salesse, qui partage les tâches de direction de l’AFY avec Roch depuis près de huit ans. C’est notre héros communautaire, toujours ouvert et à l’écoute de la communauté. »
Lors de la récente assemblée générale annuelle de l’AFY, Isabelle Salesse a d’ailleurs profité de l’annonce de son départ imminent en soulignant la contribution de Roch Nadon au niveau de la jeunesse, mais également des arts : « Grâce à son leadership et à sa ténacité, il a amené le secteur des arts et de la culture en français à un niveau plus professionnel. Sous son leadership, l’AFY a développé son rôle de diffuseur dans le domaine des arts et de la culture. Et sous sa direction, le service arts et culture a permis aux artistes franco-yukonnais d’accroître leur visibilité sur la scène locale, territoriale ou nationale. »
Le rayonnement de la francoyukonnie
La reconnaissance de la communauté francophone du Yukon ailleurs au pays et dans le monde doit une fière chandelle à cet homme. Le volet yukonnais du projet international de la Caravane des dix mots en est un bon exemple. Il n’aurait pas pu naître sans son appui.
À l’échelle nationale, il a su représenter les intérêts du Nord francophone à plusieurs reprises au sein de différents organismes.« Roch a été d’une grande importance pour la Fédération canadienne culturelle française (FCCF), explique Martin Théberge, président de la FCCF, qui travaille avec Roch depuis près de 15 ans. Il fait d’ailleurs partie de ceux qui ont le plus d’ancienneté au sein de l’organisme. Il parle peu en réunion, mais lorsqu’il le fait, ses commentaires sont réfléchis. Ils ont à la fois un impact et une force issue de sa longue expertise au Yukon. Il est clair que Roch adore sa communauté et que les francophones du Yukon le lui rendent bien. J’ai pu le sentir lorsque je me suis déplacé il y a quelques années au territoire. Ça démontre sa force et cette soif d’apprendre de l’autre, peu importe son statut social. C’est un grand plaisir de pouvoir travailler avec lui et un privilège d’être associé à cet homme. »
« Roch a été notre point de contact pour les premiers Jeux de la francophonie canadienne en 1999 et le premier à appuyer ce grand projet, ainsi que celui du Parlement jeunesse pancanadien. C’est incroyable, quand on y pense, tout ce qu’il a fait, ajoute Josée Vaillancourt, de la Fédération de la jeunesse canadienne-française (FJCF). Il est la personne la plus humble au monde et veut toujours redonner au prochain sans jamais le faire pour lui-même. »
TÉMOIGNAGES :
Angélique Bernard, ancienne bénévole pour l’émission radiophonique Rencontres
« Roch a été longtemps un animateur bénévole de l’émission de radio franco-yukonnaise Rencontres. Par la suite, il a toujours été présent aux réunions et aidant pour les bénévoles qui voulaient s’initier à l’animation de l’émission. Il a aussi beaucoup travaillé à différents projets radiophoniques, dont le spécial de Noël, réunissant chaque année plusieurs personnes de la communauté. Il a aussi toujours été présent et de bon conseil pour les éditions soulignant les 20e, 25e et 30e anniversaires de l’émission Rencontres, appuyant sans hésiter les nouvelles idées qui émergeaient en réunion de planification. »
Danielle Bonneau, bénévole pour la Cabane à sucre
« Jean-Marc et moi avons aidé Roch à monter et à démonter la structure de la Cabane à sucre du Sourdough Rendezvous pendant au moins une dizaine d’années. Ce n’est jamais compliqué et c’est surtout toujours agréable de travailler avec lui, car il est super bien organisé. Roch aime son monde et si on a fait du bénévolat si longtemps à la Cabane à sucre c’est grâce à son entregent et à son accueil. »
Félix Robitaille, ancien membre du comité Espoir Jeunesse
« À l’époque, je crois que j’étais trésorier au conseil d’administration pour le comité Espoir Jeunesse. Je ne sais pas si c’est une qualité ou un défaut, mais Roch ne dit jamais non à quoique ce soit, peu importe le projet, car il n’y a jamais de projet trop petit ou trop gros pour lui. C’est pour cette raison que beaucoup d’activités n’auraient pas pu voir le jour au Yukon sans lui. Je me souviens d’une fois où nous étions tous les deux en nomination au Gala de la francophonie pour le prix du bénévole de l’année. Cette fois-là, c’est Roch qui l’a remporté et ça ne m’a pas déçu, car j’étais heureux de le voir gagner. Il le méritait tellement. »
Virginie Hamel, gestionnaire en arts et culture pour l’Association franco-yukonnaise
« Roch a été un patron et un collègue de travail très humain qui priorise continuellement le bien-être de son équipe. Toujours enthousiaste, c’est quelqu’un sur lequel on peut s’appuyer à 100 %. Sa personnalité se reflète dans l’ambiance de travail agréable qu’il a toujours su implanter au sein du secteur culturel de l’Association franco-yukonnaise. On va s’ennuyer de lui. »
Marc Champagne, directeur de la Commission scolaire francophone du Yukon
« Roch est responsable depuis longtemps de plusieurs projets auxquels nos jeunes de la communauté ont pu participer. Il a aussi été présent au début de l’élaboration du projet de construction du Centre scolaire secondaire communautaire Paul-Émile Mercier. Il y a joué un rôle très important dans l’attention portée aux espaces communautaires de la nouvelle école secondaire francophone. Il est toujours la bonne personne pour créer des liens et des ponts dans la communauté en cherchant constamment des solutions pour faire avancer les choses. »