Le gouvernement du Yukon a annoncé vouloir prendre des mesures pour endiguer les abus commis par les campeurs discourtois. De nouvelles régulations devraient ainsi entrer en vigueur afin de décourager les Yukonnais de revendiquer un emplacement de camping sans y être effectivement présents. Une tendance à la hausse, selon les répondants d’un sondage publié par Environnement Yukon, qui jugent scandaleux que des vacanciers puissent en toute impunité « sécuriser » un emplacement un mardi en vue d’en profiter en fin de semaine.
Bien que les abus ne se bornent généralement qu’aux campings les plus proches de Whitehorse, comme ceux de Wolf Creek ou des lacs Fox, Laberge et Kusawa, on ne pourra que saluer la fermeté de la position du ministère de l’Environnement à cet égard. Il sera cependant intéressant de connaître en détail le plan prévu pour joindre la parole aux actes.
La chasse aux campeurs indélicats ne semble pas être une mince affaire ou un travail de tout repos. À moins d’une indécente délation de voisinage ou d’une surveillance orwellienne doublée de caméras forestières, les intéressés pourront toujours se réfugier derrière leur mauvaise foi pour se justifier auprès des autorités d’une hypothétique présence sur le campement à un moment donné de la journée.
La solution à laquelle tout le monde pense pourrait être de renforcer les patrouilles et les effectifs des agents d’Environnement Yukon. Mais alors à quel point le gouvernement voudra-t-il bien investir pour circonscrire ces comportements certes sans élégance, mais bel et bien marginaux?
Cela dit, l’enjeu n’en est pas moins crucial pour la réputation touristique du territoire. Le phénomène grandit bien sûr en même temps que la population yukonnaise, mais aussi à un moment où le territoire ne cesse de gagner en popularité dans les circuits des marchands de voyage. Environnement Yukon ne peut donc pas prendre le risque de décevoir le chaland qu’il attire en le confrontant dès son arrivée à une nouvelle forme de pénurie de logements. Cela n’engendrerait que frustration et n’ajouterait par ailleurs qu’à la mauvaise réputation du territoire en la matière.
Ce nouvel individualisme ne serait-il que la rançon du succès? Le Yukon, que l’histoire et la littérature tendent à nous vendre comme une contrée solidaire et valeureuse, aurait-il finalement à son tour cédé aux égocentrismes des grandes villes, où le chacun pour soi n’est désormais plus qu’une qualité gage de débrouillardise?
Cette montée yukonnaise de je-m’en-foutisme se décline aujourd’hui en différents abus environnementaux tout aussi répréhensibles les uns que les autres. Qu’il s’agisse de revendiquer un fief sur un emplacement de camping, de voler du bois, de souiller la nature d’encombrants et de déchets miniers ou de braconner un grand mammifère, on assiste désormais à une multiplication des incivilités. Certains diront qu’il en a toujours été ainsi ; que les déchets de la ruée vers l’or sont même passés à la postérité sous le nom d’artefacts. Parmi ceux qui tiennent ces discours se trouvent les délinquants.