Le chef du Parti libéral du Yukon, Sandy Silver, souhaite que les Yukonnais puissent accéder à davantage d’information concernant la construction du nouveau centre scolaire communautaire francophone. La Commission scolaire francophone du Yukon (CSFY) et le gouvernement territorial négocient actuellement les nombreux aspects de ce projet au sein d’un comité créé à la fin du mois d’août, mais très peu d’information a depuis filtré. Les deux parties avaient annoncé par voie de communiqué qu’elles n’émettraient aucun commentaire sur la progression des discussions. Une position difficilement acceptable pour le député libéral qui regrette que la commission scolaire en soit arrivée à fournir plus d’information que le gouvernement lui-même.
« Nous avons beaucoup de commentaires de gens préoccupés qui veulent en savoir plus », explique Sandy Silver. « Je pense que la CSFY s’est montrée très disponible pour donner de l’information, et la municipalité aussi, en ce qui la concerne. Nous regardons maintenant vers le gouvernement qui est censé être le meneur de ce projet, et dont nous n’avons entendu que très peu, excepté de l’information anecdotique. Ce n’est pas la façon dont un gouvernement ouvert et imputable devrait aller de l’avant dans ce projet. »
Une école à Riverdale?
Le chef du Parti libéral pointe notamment du doigt la question de l’emplacement de la future école. Alors que la commission scolaire a déjà annoncé que l’école serait construite à l’emplacement du parc de planche à roulettes de Riverdale, le gouvernement territorial n’a encore rien voulu confirmer. La question du trafic automobile et des infrastructures souterraines sont pourtant deux points sur lesquels le député souhaiterait obtenir des éclaircissements.
« Je reçois beaucoup de commentaires de Yukonnais préoccupés par l’emplacement de cette école, et nous ne pouvons baser nos réponses que sur des suppositions et sur ce que les médias publient. Les gens de Riverdale ont le droit de savoir où l’école sera construite et comment cela affectera leur trajet quotidien, pourquoi ça doit se faire dans un certain secteur, ce genre de choses. Et le dialogue est ce dont on a besoin aujourd’hui, c’est la chose la plus importante. Plus de dialogue engendre moins de frustration et encourage les partenariats », affirme le député Silver. « Nous pensons donc que ce serait une belle occasion pour le gouvernement de devenir un peu plus coopératif au sujet des défis auxquels il fait face. Si l’école est construite à l’emplacement du parc de planche à roulettes, par exemple, on sait que la municipalité a exprimé certaines préoccupations, car il y a par exemple une importante canalisation d’eau dans le sous-sol. Donc avant de dépenser de l’argent dans une école, il faudra dépenser de l’argent pour le sous-sol. Il y a aussi des questions concernant le trafic, il faudra peut-être élargir le pont. Encore une fois, toutes ces questions sont actuellement hypothétiques, car nous n’avons pas vraiment eu de début de dialogue avec le gouvernement territorial. »
À court de temps
Alors que la phase de négociations succède à six ans de procès, Sandy Silver affirme comprendre qu’une part des échanges doit rester confidentielle. Mais à l’approche des prochaines élections territoriales, l’échéancier du projet demeure toutefois un point crucial. Bien que le ministère de l’Éducation ait par exemple débloqué cet automne 75 000 dollars pour démarrer le processus de planification de la construction et promis un financement additionnel dans le budget 2016-2017, M. Silver s’inquiète de la capacité du gouvernement à mener ce dossier dans l’échéance et de façon transparente.
« Nous sommes convaincus que les négociations doivent se dérouler entre les deux parties, cependant, nous sommes à court de temps si cela doit être négocié de façon ouverte et honnête devant l’Assemblée législative pour cette session », explique-t-il. « Ce gouvernement a encore un budget et il a promis beaucoup de capitaux à beaucoup de projets. La question est donc de savoir s’il sera capable de gérer ces négociations, car nous ne nous pencherions pas à ce point sur cette problématique si nous n’avions pas de sérieuses préoccupations quant à la capacité de ce gouvernement à mener à bien des projets de grande ampleur », affirme-t-il avant de rappeler les multiples rebondissements survenus dans le dossier de la construction de la nouvelle École F.-H.-Collins.
Très critique sur la forme, Sandy Silver n’en reste pas moins élogieux sur le fond. Interrogé sur la question de la dimension communautaire de l’école et sur l’idée de la commission scolaire d’y aménager une salle de spectacle de 250 places, cet ancien enseignant de mathématiques affirme soutenir le projet dans son ensemble, et regrette même que les écoles en général aient perdu leur dimension communautaire.
« J’ai toujours été impressionné par la commission scolaire et l’Association franco-yukonnaise, car leurs plaidoyers pour la promotion de leur langue et de leur culture sont fantastiques. C’est un modèle qui peut être utilisé dans d’autres communautés », affirme Sandy Silver. « Je pense donc que c’est une superbe idée d’avoir une école où l’on peut promouvoir la culture et l’histoire des gens qui la peuplent. Si nous pouvons changer les écoles pour aller dans ce sens, les enfants pourront se bâtir une confiance en eux. Ils ne veulent plus d’une école à proprement parler, ils veulent un centre communautaire, où il y aura des classes, mais aussi une dimension culturelle, un endroit où les anciens peuvent se réunir et où des débats peuvent avoir lieu en dehors du cursus régulier », conclut-il en évoquant en passant le lourd héritage des écoles résidentielles.
L’opposition officielle s’aligne
Pour le député Jim Tredger, ancien enseignant et critique néo-démocrate pour le ministère de l’Éducation, cette dimension communautaire a également toute sa place au sein de la nouvelle école francophone.
« Il y a une communauté francophone qui travaille à préserver sa culture et sa place au Canada, et ça doit être à cette communauté de décider de la façon dont elle souhaite célébrer sa culture. Il y a des restrictions, des paramètres financiers, etc., mais je pense que c’est une excellente idée d’avoir une salle de spectacle. C’est très important pour la musique, pour le théâtre et pour toute sorte de célébrations culturelles », affirme le député de l’opposition officielle. « C’est aussi une occasion pour la communauté de s’étendre et elle peut bénéficier à tous les Yukonnais. L’un des fondements d’être Yukonnais, c’est d’avoir cette diversité et l’occasion de la renforcer. »
Au chapitre des négociations, tout comme M. Silver, M. Tredgerse montre dubitatif quant à la communication gouvernementale.Selon le député, le dossier peut se transformer du jour au lendemain en pomme de discorde, alors qu’aucune consultation publique n’a pour l’heure été envisagée par le gouvernement ou la commission scolaire.
« Le gouvernement du Yukon et la commission scolaire doivent déterminer ce qui va constituer l’école, donc ils ont besoin d’un concept, et je pense que c’est ce qui est négocié actuellement », explique-t-il. « Mais tôt ou tard, je pense que la communauté francophone dans son ensemble et la communauté yukonnaise devront être engagées et impliquées dans la création de ce centre scolaire communautaire. Ma préoccupation, c’est qu’on manque ici une réelle occasion de bâtir une pièce maîtresse, non seulement pour la communauté francophone, mais pour tous les Yukonnais. »